Évasion fiscale: l'Afrique perd plus de 40 milliards de dollars par an

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Le 16/10/2017 à 17h32, mis à jour le 17/10/2017 à 09h53

Les pratiques d’évasion fiscale, imputées notamment aux multinationales, font perdre à l’Afrique des dizaines de milliards de dollars par an. Face à cette situation, les pays africains sont appelés à mettre en place des législations adaptées.

Kiosque le360 Afrique: L’évasion fiscale cause des pertes énormes à l’Afrique. Selon les estimations, ce sont entre 40 et 80 milliards de dollars (34 et 68 milliards de dollars environ) de taxes qui échappent chaque année à l’Afrique. Une manne colossale dont le continent, qui fait face à d'innombrables déficits sociaux, a grandement besoin.

L’annonce a été faite par Tommaso Faccio, Secrétaire général de la Commission indépendante pour la réforme de l’impôt international sur les sociétés (Icrict), co-organisatrice d’une conférence sur les flux financiers illicites, organisée les 11 et 12 octobre 2017 à Nairobi, au Kenya, cité par Le Monde.

Au sens strict du terme, l’évasion fiscale désigne l’action consistant à éviter ou réduire l’impôt en assujettissant le patrimoine ou les bénéfices dans un pays autre que celui auxquels ils devraient être soumis.

Et selon Ifueko Omoigui-Okauru, une spécialiste nigériane de la fiscalité, membre de l’Icrict: «Face aux administrations manquant de compétences techniques, on trouve des entreprises qui ont les connaissances, les compétences et les avocats capables de les aider à monter des stratégies agressives d’évitement de taxes».

Il s’agit de pratiques dont usent notamment les multinationales dans les pays en développement. «Au sein de ces pratiques mêlant évasion et optimisation fiscale –l’une illégale, l’autre légale bien que très critiquée-, les transferts de marge (ou prix de transfert) totalisent à eux seuls 60% des montants en jeu», souligne le quotidien, citant l’Icrict. La pratique la plus courante dans ce cas consiste, pour une multinationale généralement active dans l’industrie minière ou pétrolière, «à vendre à prix limité son or, son cuivre ou son gaz à l’une de ses propres filiales, basée dans un pays à la fiscalité avantageuse. Les taxes, fixées sur les bénéfices, seront d’autant plus réduites».

À titre d’illustration, alors que le niveau d’imposition sur les bénéfices se situait autour de 20% en Afrique en 2012, «nos chiffres montrent qu’en 2012, pour 500 millions de tonnes de cuivre, les retombées fiscales n’ont représenté qu’un taux de 2%». Une différence énorme qui ne peut être justifiée que par des évitements de taxes, explique Logan Wort, secrétaire exécutif du Forum sur l’administration fiscale africaine (ATAF).

Face à cette situation, les pays africains s'engagent contre l’optimisation et l’évasion fiscale. Pour cela, ils doivent d’abord construire des législations adaptées. L’ATAF aide ainsi les pays africains à mettre en place des législations renforcées qui tiennent compte de diverses pratiques, comme les prix de transfert. Et les résultats sont tangibles.

Ainsi, l’Ouganda a remporté un litige qui l’opposait à la multinationale Heritage Oil pour un montant de 400 millions de dollars, devant la Commission des Nations Unies pour le droit commercial international à Londres.

Mieux, d’autres pistes sont avancées. Parmi celles-ci, l’inclusion dans les contrats d'exigences sur le financement de telle ou telle infrastructure: route, chemin de fer, port, etc. Un moyen pour le pays de bénéficier de retombées tangibles dans la mesure où les taxes versées par les multinationales sont parfois détournées par les classes dirigeantes.

Par Kofi Gabriel
Le 16/10/2017 à 17h32, mis à jour le 17/10/2017 à 09h53