Cameroun. Entreprises publiques: une réforme qui met fin à la longévité des PDG, DG et PCA

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Le 21/07/2019 à 16h43, mis à jour le 21/07/2019 à 17h31

De récents décrets signés par le président de la République apportent des innovations qui devraient radicalement changer la gouvernance au sein de ces entreprises étatiques, trop souvent mises à l'index pour leur gabegie. De nombreux renouvellements en perspective au sein des top managements.

Le 19 juin dernier, Paul Biya, le président camerounais, a signé d'importants décrets au sujet du fonctionnement des entreprises publiques.

Il s'agit notamment, d'une part, de la loi fixant les catégories d'entreprises et la rémunération des dirigeants.

Il y a aussi celle, d'autre part, précisant les modalités d’application de certaines dispositions de lois promulguées en 2017, portant statut général des établissements et des entreprises publics.

Depuis, l'opinion publique espère que s'ouvrira ainsi une nouvelle ère en ce qui concerne la gestion de ces entreprises, mais également, qu'elle mettra fin à l'exceptionnelle longévité de certains directeurs généraux (DG) et présidents de conseils d'administration (PCA) à leurs postes.

En ce qui concerne les mandats des DG et DGA, la loi prévoit que ce soit le PCA qui déclenche le processus.

Cette loi stipule que «dans tous les cas, le mandat des DG et DGA ne peut excéder 9 ans».

Ceux-ci sont en effet nommés pour des mandats de trois ans, renouvelables deux fois.

Le DG et le DGA étant rapporteurs au conseil d’administration, ils ne peuvent pas y siéger si leurs mandats sont échus et le conseil ne peut se tenir en leur absence.

«Ce décret marque la fin de la complaisance au sein des conseils d’administration. Aucun conseil ne peut valablement se tenir si les mandats de chaque membre (PCA, administrateurs, DG et DGA) ne sont valables», indique Viviane Ondoa Biwolé, experte en gouvernance publique et enseignante chercheure. 

Au regard de cette nouvelle législation, les mandats de nombreux DG et PCA est échu depuis bien longtemps et d'aucuns espèrent des renouvellements massifs.

Echéance

Le DG de l'Agence de régulation du secteur de l'électricité (ARSEL), Jean-Pierre Kedi, a déjà pris les devants en écrivant au ministre de l'Eau et de l’Energie, Gaston Eloundou Essomba, pour l'informer qu'il avait atteint l'échéance de son mandat de 9 ans à la tête de la structure qu'il dirige.

Une démarche abondamment commentée dans la presse, le renoncement des managers et personnalités publiques à leurs postes de direction étant extrêmement rare dans le contexte camerounais.

Les agissements des uns et des autres sont ainsi guettés avec curiosité, le respect scrupuleux des mandats à la tête des entreprises publiques relevant désormais de la responsabilité des DG, PCA et administrateurs.

Ceux-ci doivent saisir l’autorité compétente pour faire le point de leurs mandatures.

Certains DG, en poste depuis des dizaines d'années, font ainsi les choux gras de la presse.

Autres innovations, la rémunération du top management est désormais adossée à la performance et dépend des catégories des entités publiques, lesquelles sont à présent classées de 1 à 5, en fonction du chiffre d’affaires.

La transparence dans la gestion de l’entreprise occupe aussi une place importante, avec les délais de transmission des rapports aux différentes parties prenantes, les rémunérations et indemnisations des dirigeants sont précisés, etc.

In fine, pour Viviane Ondoa Biwolé, experte en Gouvernance Publique et dans le même temps directrice générale adjointe de l'Institut Supérieur de Management public (ISMP), «le décret du 19 juin 2019 est assimilable à un décret "de libération des mandataires sociaux dont les mandats sont échus"».

Par Patricia Ngo Ngouem (Yaounde, correspondance)
Le 21/07/2019 à 16h43, mis à jour le 21/07/2019 à 17h31