«Je crois en l’Afrique, je crois en son potentiel, présent et futur. C’est un continent ascendant», dit Benyamin Netanyahu, Premier ministre israélien, qui a assuré «réaliser un rêve» en assistant dimanche 4 juin 2017 au sommet de la CEDEAO –Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest.
II faut dire que depuis quelques années, Israël fait tout pour retrouver sa place sur le continent de toutes les convoitises. Une place pourtant voulue dès les indépendances par Golda Meir, ministre des Affaires étrangères qui s’était résolument tourné vers l’Afrique avant que le conflit avec l’Egypte ne vienne anéantir ses ambitions. Ambitions que ses successeurs n’ont su reprendre.
Toutefois, depuis bientôt une décennie, notamment sous l’égide de Benyamin Netanyahu, Israël accorde de nouveau une importance cruciale à l’amélioration de ses relations avec le continent. Il s’est rendu en 2005 en Ouganda, avant qu’il ne dirige le gouvernement israélien, pour dévoiler une plaque à la mémoire de son frère mort lors de l’opération Entebbe. Et depuis qu'il dirige le gouvernement israélien, il n'a cessé de prôner un retour de l’Etat hébreu sur le continent.
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Cette offensive s’est matérialisée en 2009 par la tournée de son ministre des Affaires étrangères Avidgor Lieberman dans 5 pays africains: Ethiopie, Kenya, Ouganda, Nigeria et Ghana. Le même exercice sera répété en 2014 avec un nouveau périple touchant dans 5 pays encore: Rwanda, Côte d’Ivoire, Ghana, Ethiopie et Kenya. C’est dire que l’Afrique est devenue un enjeu important dans la politique israélienne.
Ensuite, c’est Netanyahu en personne qui entreprend un périple qu’il a qualifié d’«historique» en 2016 en visitant 4 pays d’Afrique de l’Est -Ouganda, Kenya, Rwanda et Ethiopie- à la tête d’une délégation de 80 hommes d’affaires représentant une cinquantaine d’entreprises israélienne de divers secteurs: sécurité, télécom, agriculture, énergie, etc. Il organisera même un mini-sommet régional sur la sécurité avec les dirigeants des pays d’Afrique de l’Est et australe (Ethiopie, Kenya, Rwanda, Sud-Soudan, Zambie, Ouganda et Malawi), désormais en très bonnes relations avec son pays et qui ont promis de soutenir son retour à l'Union africaine.
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Après avoir conquis l’Est, il s’est naturellement tourné vers la CEDEAO. Invité du 51e sommet de cette instance, axé sur l’économie et la sécurité, Netanyahu n’est pas venu les mains vides. Il a annoncé un plan d’investissement de 1 milliard de dollars dans les énergies renouvelables et en a profité pour lever toute brouille avec le Sénégal avec le renvoi immédiat de son ambassadeur au pays de la Téranga. Netayahu a saisi cette occasion pour demander au président sénégalais de soutenir le retour de son pays en tant qu'observateur au sein de l'instance panafricaine.
Et après tant de visites, Benyamin Netanyahu compte mesurer le succès de sa politique africaine lors du 1er Sommet Israël-Afrique qui sera organisé en octobre 2017 à Lomé, la capitale togolaise, par Faure Gnassingbé, président du Togo et nouveau président en exercice de la CEDEAO.
Grâce à cette politique, plus d’une quarantaine de pays du continent ont des relations diplomatiques avec Israël. Le Togo, la Côte d’Ivoire, la RD Congo, le Cameroun, l’Ethiopie, le Kenya et le Rwanda entretiennent des relations spéciales avec l’Etat hébreu. Ce qui fait dire à Netanyahu, «après de nombreuses décennies, je peux dire qu’Israël revient en Afrique et que l’Afrique revient en Israël».
Toutefois, une douzaine de pays du continent n’ont pas encore de relations diplomatiques avec l’Etat hébreu. Outre les pays arabes du continent, le Mali, le Niger et le Tchad y sont toujours opposés.
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Reste que la politique africaine de Netanyahu n’est pas dénuée de tout calcul diplomatique. L’Etat hébreu vise surtout deux objectifs. D’abord, attirer la sympathie d’autres pays africains qui continuent à se liguer contre son pays au profit de la Palestine lors des réunions des instances internationales.
Ensuite, cette dynamique politique vers le continent s’inscrit aussi dans la volonté d’Israël de retrouver sa place d’observateur au sein de l’Union africaine (UA). Une place perdue en 2002.
D’ailleurs, lors de sa dernière visite au Kenya en 2016, Netayahu avait révélé que «ce statut revêt une importance très importante pour nous (…). L’Afrique est un continent composé de 54 Etats. Un éventuel changement de ses orientations et du traitement qu’elle réserve à Israël constitue un changement stratégique pour la place internationale d’Israël».
Au-delà de ces deux objectifs fondamentaux, Israël propose aux pays africains des partenariats dans divers domaines: agriculture, énergies renouvelables, nouvelles technologies de l’information, télécom, médecine, métaux précieux, sécurité et surveillance, etc. Autant de domaines dans lesquels les compétences et le savoir-faire d’Israël sont reconnus.
Au niveau commercial, les changes demeurent globalement faibles. Ceux-ci sont passés de 430 millions de dollars en 1990 à plus de 2 milliards de dollars en 2008. En 2015, les exportations d’Israël vers l’Afrique se sont établies à 1,05 milliard de dollars. L’Afrique du Sud reste le principal partenaire commercial d’Israël. Outre les métaux précieux (or diamant), on recense plus de 800 entreprises israéliennes présentes en Afrique du Sud dans divers domaines: énergie, hydraulique, sécurité, etc. Le pays importe beaucoup de pétrole du Nigeria et d’autres minerais du continent.
En plus, les contacts culturels et universitaires, l’assistance médicale et les formations professionnelles figurent au rang des échanges entre le continent et Israël. En outre, plusieurs chefs d’Etat africains assurent leur sécurité grâce au soutien israélien.
Le premier Sommet Israël-Afrique devrait donner une nouvelle impulsion aux relations entre l’Etat hébreu et le continent, avec en ligne de mire, un retour à l’Union africaine en tant qu’observateur.