Afrique du Sud: l'ANC choisit le successeur de Zuma à la tête du parti

Cyril Ramaphosa et Dlamini Zuma.

Cyril Ramaphosa et Dlamini Zuma. . DR

Le 14/12/2017 à 15h25, mis à jour le 14/12/2017 à 15h39

Le Congrès national africain (ANC) au pouvoir en Afrique du Sud se réunit à partir de samedi pour remplacer son chef très contesté Jacob Zuma, lors d'un vote dont le vainqueur a de bonnes chances de lui succéder aussi à la présidence du pays en 2019.

Depuis des mois, la course s'est résumée à un duel féroce entre le vice-président Cyril Ramaphosa, un ancien syndicaliste reconverti en richissime homme d'affaires, et la candidate soutenue par Zuma, son ex-épouse et ancienne patronne de l'Union africaine (UA) Nkosazana Dlamini Zuma.

Aussi âpre qu'incertaine, la campagne a profondément divisé l'ANC, qui traverse sa plus grave crise depuis la victoire électorale historique de son icône Nelson Mandela en 1994.

Près d'un quart de siècle après la chute de l'apartheid, la popularité du parti a sérieusement pâli. La crise économique persistante et la corruption reprochée au gouvernement menacent de priver l'ANC de sa majorité absolue aux prochaines élections générales de 2019.

Zuma doit rester à la tête de l'Etat jusqu'à ce scrutin, à moins que le parti ne l'évince ou qu'il ne démissionne.

Soutenu par l'aile modérée de l'ANC, apprécié des marchés, Ramaphosa, 65 ans, se présente en champion de la relance de l'économie et de la création d'emplois.

A longueur de discours, il a mis en cause les "échecs" et la corruption du clan Zuma, que ses adversaires lui reprochent d'avoir trop longtemps passés sous silence.

De son côté, Mme Ndlamini Zuma, 68 ans, a repris le flambeau de son ancien mari pour la "transformation radicale de l'économie" en faveur de la majorité noire du pays. Elle a aussi accusé son principal adversaire d'être le "candidat des bourgeois".

'Dans un mouchoir de poche'

Ses critiques lui opposent que cette politique a déjà échoué et la soupçonnent d'avoir promis à son ex-mari l'immunité dans les nombreux dossiers judiciaires qui le menacent.

Après plusieurs mois de lutte, leur duel s'annonce très, très serré.

"Les enjeux sont considérables et les deux candidats sont dans un mouchoir de poche", résume à l'AFP Amanda Gouws, professeur de sciences politiques à l'université sud-africaine de Stellenbosch.

"Soit émerge un nouveau président (Ramaphosa) qui est capable de stabiliser le pays et faire quelque chose pour enrayer son déclin économique et politique. Soit c'est la continuation de ce que nous connaissons."

Au terme d'un processus électoral très complexe perturbé par de multiples contestations, le vice-président se présente avec une petite longueur d'avance sur sa rivale, en termes de nominations par les branches locales du parti.

Mais cet avantage reste symbolique, car les 5.200 électeurs de l'ANC ne sont pas tenus de voter pour le candidat retenu par leur province et gardent jusqu'au bout leur liberté de choix.

Depuis déjà des semaines, les accusations de manipulation et de fraude vont bon train.

Partisan de Cyril Ramaphosa, le chef de la majorité ANC au Parlement, Jackson Thembu, a dénoncé sur Twitter "ceux qui essaient de faire voter de faux délégués".

'Rupture'

"Si le processus a jusque-là fait l'objet de nombreux recours en justice, il y a fort à parier qu'il en sera de même à la conférence" qui se tient jusqu'à mercredi 20 décembre, pronostique auprès de l'AFP l'analyste Ralph Mathegka, anticipant même une sérieuse "escalade".

En plus des deux favoris, cinq autres candidats briguent la présidence du parti. Si leurs chances sont infimes, leur soutien à Ramaphosa ou à Mme Dlamini Zuma peut s'avérer déterminant.

A en croire les sondages réalisés ces dernières semaines et la plupart des analystes, l'actuel vice-président serait le seul patron susceptible de permettre à l'ANC de conserver sa majorité absolue lors des élections générales de 2019.

En cas de défaite de Ramaphosa dans la bataille pour le contrôle du parti, beaucoup anticipent son éclatement.

"Le choix de la conférence va probablement déterminer si l'ANC conserve encore une chance de gagner en 2019", estime Susan Booysen, de l'université du Witwatersrand à Johannesburg.

"Les deux camps sont tellement éloignés que je ne vois pas comment ils pourraient encore coexister à l'avenir", poursuit l'analyste, "et si il y a rupture, elle pourrait faire tomber l'ANC sous la barre des 50% et décider s'il restera au pouvoir".

A quelques jours du verdict, tous les candidats se sont cependant engagés à respecter les résultats du scrutin et à défendre l'unité du parti.

"Nous travaillons très dur pour faire en sorte que cette conférence se déroule avec succès et en bon ordre", a promis devant la presse le secrétaire général de l'ANC, Gwede Mantashe, "vous allez assister à une conférence réussie".

Par Le360 Afrique (avec AFP)
Le 14/12/2017 à 15h25, mis à jour le 14/12/2017 à 15h39