Rétro 2017. Cameroun: une année d'escalade vers un conflit armé en zone anglophone

Violences dans les régions anglophones du Cameroun.

Violences dans les régions anglophones du Cameroun.. DR

Le 20/12/2017 à 12h09, mis à jour le 20/12/2017 à 12h42

Débutée en octobre 2016 par un boycott des enseignants et des avocats dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, la crise s’est politisée en 2017 avant de virer au conflit armé.

Le 30 novembre dernier, le président de la République, Paul Biya, a prononcé publiquement ses premiers mots au sujet de la crise anglophone, après l’assassinat de six membres des forces armées camerounaises en l’espace de deux jours.

«Les choses sont désormais parfaitement claires pour tout le monde: le Cameroun est victime des attaques à répétition de bandes de terroristes se réclamant d’un mouvement sécessionniste. Face à ces actes d’agression, je tiens à rassurer le peuple camerounais que toutes les dispositions sont prises pour mettre hors d’état de nuire ces criminels et faire en sorte que la paix et la sécurité soient sauvegardées sur toute l’étendue du territoire national», a-t-il déclaré.

Depuis, le ton s’est durci. Les affrontements entre militaires camerounais et bandes armées sécessionnistes se font plus fréquents, même si les autorités démentent toute militarisation des régions occidentales du pays. Cette tournure marque une évolution brutale de la crise anglophone, débutée en octobre 2016.

Car le conflit a commencé par de simples revendications corporatistes. Les syndicats d’avocats anglophones ont d'abord boycotté les prétoires dans les deux régions au sujet de quatre principaux griefs: l’inexistence d’une version anglaise des Actes Uniformes OHADA, l’usage du Code Civil francophone dans les juridictions des régions anglophones, l’absence du droit anglais dans le système judiciaire camerounais et enfin l’exercice dans les deux régions anglophones du pays de magistrats non anglophones.

Puis les enseignants ont présenté différentes revendications, comme le paiement d’arriérés de salaire, la clarification des modalités d’admission des étudiants dans les universités de tradition anglo-saxonne, une meilleure représentation des anglophones lors des recrutements aux postes d’enseignants et de personnels dans lesdites universités, la diminution du nombre (jugé élevé) des enseignants francophones dans les écoles en zone anglophone.

Dans les deux régions, ces remous ont perturbé le déroulement de l’année scolaire tandis que l’économie toussote.

Par la force des choses, ces demandes ont évolué en revendications politiques. Désormais, les mécontents évoquent un système fédéral, voire la partition du pays pour les plus radicaux, qui ont même donné un nom à un Etat fictif regroupant la partie anglophone: l’Ambazonie. Plus récemment, la tension est montée d'un cran. Des attentats ont été perpétrés, des édifices publics ont été incendiés et les forces de sécurité redéployées dans la région.

Au mardi 19 décembre, 14 membres des forces de sécurité camerounaises, des civils et de nombreux sécessionnistes avaient trouvé la mort dans le conflit.

Par Elisabeth Kouagne (Abidjan, correspondance)
Le 20/12/2017 à 12h09, mis à jour le 20/12/2017 à 12h42