Sud-Soudan: Kiir-Machar, des retrouvailles pour quels lendemains?

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Le 22/06/2018 à 17h46

Les frères ennemis sud-soudanais, le président Salva Kiir et son ancien vice-président Riek Machar, se sont retrouvés à Addis-Abeba le mercredi 20 juin 2018. Une première depuis 2015 sous l’égide du présent éthiopien Abiy Ahmed. Les observateurs restent toutefois sceptiques.

Le nouveau Premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed, poursuit sa politique de pacification en Afrique de l’est. Après avoir tendu la main au président érythréen Issayas Afwerki, rendu visite au président somalien, il a réuni les frères ennemis sud-soudanais, le président Salva Kiir et son ancien vice-président Riek Machar, dans le cadre d’une politique d’apaisement des tensions en Afrique de l’est.

En tant que président de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) de l’Afrique de l’est, il appelé les protagonistes du conflit sud-soudanais à la discussion. Les deux hommes sont en conflit depuis 2013 lorsque le président Kiir a accusé son vice-président Riek Machar d’avoir tenté de le renverser.

Il s’ensuit des affrontements sanglants entre les partisans des deux hommes, alimentés par des dissensions ethniques entre Dinkas (affiliés à Kiir) et Nuers (tribu dont est originaire Machar). C'est lors d'affrontements d’une rare violence en 2015 que Machar s’est enfui de la capitale, Juba. Ces combats fratricides ont fait 300.000 morts et quatre millions de déplacés.

Depuis, les deux hommes ne se sont plus revus. Riek Machar a séjourné à Pretoria, en résidence surveillée, pendant que Kiir s’employait à accélérer la dissolution du clan de son ennemi en interne, représenté par le SPLM/A-IO.

Du coup, la nouvelle rencontre suscite légitimement des espoirs de paix pour l’avenir du Soudan du Sud. Dans une déclaration, Abiy appelle les deux responsables «à réduire leurs divergences et à travailler à la pacification du Soudan du Sud...».

Mais selon certains observateurs, cette tentative, aussi encourageante soit-elle, a toutes les chances de demeurer infructueuse, tant elle ne correspond qu’à un duplicata amélioré des multiples efforts entrepris depuis 2013 pour mettre fin au conflit. Aussi, la hâte dans laquelle la rencontre s’est décidée rappelle les pressions internationales qui ont participé à sa mise en place. Les sanctions brandies par l’Organisation des Nations-Unies (ONU) ont augmenté la pression sur les deux camps.

Seulement, au niveau régional, l’Ouganda s’est montrée réticente à la résolution de cette crise en négociant avec Machar. Du coup, au lendemain même de la rencontre, l’annonce du ministre de l’Information sud-soudanais, Michel Makuei, est venu refroidir les plus optimistes. «En tant que Sud-Soudanais, nous disons qu’assez c’est assez et s’il (Machar) veut être président, il n’a qu’à attendre les élections». Or ces élections sont prévues en ce juillet 2018, alors que Machar est en exil forcé.

Par Ali Choukroun
Le 22/06/2018 à 17h46