Algérie. Louisette Ighilahriz: "on ne sait pas qui dirige le pays"

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Le 26/10/2018 à 10h22, mis à jour le 26/10/2018 à 10h24

Militante pendant la Guerre d'Algérie, et donc ayant autant de légitimité que n'importe quel Moudjahid, Louisette Ighilahriz estime ne pas savoir qui dirige l'Algérie. Elle explique les raisons de sa démission du Sénat et en appelle, sur les ondes de RFI, à la conscience des Algériens.

Louisette Ighilahriz est très remontée contre l'entourage de Abdelaziz Bouteflika qu'elle accuse de gouverner à sa place. Dans une interview accordée à Radio France Internationale (RFI) et diffusée ce matin du vendredi 26 octobre, elle a commencé par expliquer les raisons de sa démission du Sénat, qui est uniquement liée à l'Etat de santé et le handicap du chef de l'Etat algérien.

Selon elle, le quatrième mandat de Bouteflika, qui s'achève en ce moment avec une série de scandales de corruption, de trafic de cocaïne ou d'escroqueries est un véritable fiasco.

"On finit un mandat, assez lamentablement et on veut nous en imposer un cinquième", s'alarme-t-elle. Alors "qu'on ne le voit pas. Il ne nous a jamais parlé, on l'entrevoit seulement en quelques minutes", ajoute celle qui a été une résistante algérienne au moment de la guerre d'indépendance et qui a donc autant de légitimité que Bouteflika.

Car Louisette Ighilahriz a vécu les affres de la torture de l'armée française et a un long passé de militante. Dans les années 1980, elle a même été nommée Directrice Centrale du Front de libération nationale. 

Elle décrit un Bouteflika qu'elle a aperçu "hier" à la télé, avec "le regard hagard", "fatigué" et qui est incapable de "gérer un pays". C'est donc, un "clan qui gère en son nom" et qui impose ses décisions aux Algériens, une situation kafkaïenne. 

Pour elle, "c'est son entourage (de Bouteflika, Ndlr) qui le pousse". Mais le plus inquiétant est que "l'on ne connait ni les noms, ni les professions. Ce sont des gens, une sorte de caste, un clan qui parle et qui agit en son nom".

"Donc, basta, ça suffit, niet. Je ne peux pas cautionner cela. J'ai remis mon mandat", tranche-t-elle de manière ferme, de sa voix de 82 ans. 

Selon elle, les Algériens ignorent tout de leur chef de l'Etat. "Est-il conscient? Est-il malade? C'est à vous (Christophe Boisbouvier, le journaliste de RFI qui l'interviewait, ndrl) de nous le dire parce qu'il se soigne chez vous", dit-elle à la fois avec humour et sérieux. 

Louisette Ighilahriz, qui se définit comme "un électron libre" et non un membre du FLN, affirme n'avoir pas peur de précher dans le désert. "Je dois essayer de conscientiser les gens", dit-elle. 

Par Mar Bassine Ndiaye
Le 26/10/2018 à 10h22, mis à jour le 26/10/2018 à 10h24