Union africaine. Libre circulation des personnes, les pays africains traînent des pieds

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Le 26/10/2018 à 14h18, mis à jour le 26/10/2018 à 14h34

Si 32 pays ont signé le traité instituant la Communauté économique africaine sur la libre circulation des personnes, le droit de résidence et le droit d’établissement, un seul pays l’a ratifié. Les avancées au niveau de certains regroupements régionaux comme la CEDEAO doivent servir d'exemples.

Quand surviendra donc ce jour où tous les Africains pourront circuler librement sur leur propre continent? Beaucoup espèrent que ce rêve deviendra une réalité. En tout cas, l’Union Africaine en a fait un de ses objectifs fondamentaux, conformément à l’Agenda 2063. C’est dans ce cadre que s’inscrit le passeport unique africain dont certains chefs d’Etat et hauts fonctionnaires sont désormais munis.

A ce titre, les Etats africains sont invités à signer le Traité instituant la Communauté économique africaine sur la libre circulation des personnes, le droit de résidence et le droit d’établissement. En mars 2018, lors du sommet extraordinaire de l’Union africaine à Kigali, au Rwanda, 27 pays ont signé le protocole de libre circulation des personnes sur le continent, soit la moitié des pays membres.

Seulement, à ce jour, si 32 pays africains ont signé le Traité, les ratifications nécessaires à son entrée en vigueur tardent. Ainsi, à l’heure actuelle, un seul pays a ratifié le Traité de la libre circulation des personnes, du droit de résidence et du droit d’établissement. Il s’agit du Rwanda de Paul Kagame, président en exercice de l’Union africaine, qui, en plus de la ratification de ce traité de libre-circulatuion, a aussi ratifié celui concernant le passeport unique africain. D'ailleurs, Paul Kagame a été le premier Africain à voyager muni d'un passeport unique africain.

Or, pour l’entrée en vigueur du protocole de libre circulation des personnes, il faut un total de 15 ratifications. On est ainsi très loin du compte et aucun pays n'a pour le moment montré des signes de volonté d'emboiter le pas au Rwanda.

C’est dire que parmi tous les chantiers visant l’intégration du continent dans le cadre des objectifs de l’Agenda 2063, celui de la libre circulation des personnes, du droit de résidence et du droit d’établissement, est le plus ambitieux mais aussi certainement celui qui sera le plus difficile à atteindre.

En plus, si certains pays sont prêts à s’engager dans un processus de libre circulation des personnes, rares sont ceux qui s’engagent pour le droit de résidence et le droit d’établissement.

Néanmoins, on note quelques avancées en matière de facilitation de la libre circulation des Africains par certains pays africains. Ainsi, quelques pays se sont engagés dans les procédures visant à faciliter l’accès de leur territoire à tous les ressortissants du continent.

Le Bénin dispense de visa tous les ressortissants des pays africains qui souhaitent visiter le pays pour une durée n’excédant pas 3 mois. D’autres pays ont emboîté le pas aux Seychelles, en mettant en place des procédures d’octroi de visas à l’arrivée. C’est le cas du Kenya et plus récemment de l’Ethiopie, qui ont adopté le régime de visa à l’arrivée pour tous les citoyens détenteurs de passeports africains. C'est dire qu'il y a seulement 5 pays qui sont engagés dans le processus de ibre circulation des personnes en Afrique.

Pourtant, la libre-circulation est une réalité entre de nombreux pays africains. Ainsi, sans avoir ratifié le Traité instituant la Communauté économique africaine sur la libre circulation des personnes, le droit de résidence et le droit d’établissement, celui-ci est presque une réalité dans certains espaces régionaux du continent. C’est le cas notamment de la CEDEAO –Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest, l’un des regroupements régionaux les plus avancés du continent.

Dans cet espace, les populations circulent librement au moyen de cartes d’identité (nationale ou CEDEAO) et passeport CEDEAO, même si certains couacs sont enregistrés ici et là (multiplication des points de contrôle, rackets aux frontières de la part des policiers et douaniers, fermeture des frontières au delà de 22h dans certains pays, etc.).

Les ressortissants des différents pays de la région bénéficient aussi des droits de résidence et d’établissement dans cet espace régional. Ainsi, un Nigérien peut traverser le Mali et aller au Sénégal avec une carte d’identité du Niger ou de la carte CEDEAO (en cours de généralisation au sein de l’espace économique) ou un passeport CEDEAO et résider au Sénégal et vice-versa. Cela est valable pour les 350 millions d’habitants de la CEDEAO.

De même, plus récemment, les 6 pays de la CEMAC –Communauté économique des Etats de l’Afrique centrale-, ensemble régional regroupant 6 pays –Cameroun, Congo, RCA, Tchad, Gabon et Guinée équatoriale- on a rendu effective la libre-circulation des ressortissants des pays membres au sein de cet espace en supprimant les visas. 

Ainsi, à défaut d’aller rapidement vers une libre circulation des Africains au sein du continent, il faudrait encourager la libre circulation des personnes, le droit de résidence et le droit d’établissement au sein des 6 espaces régionaux existant et espérer par la suite atteindre l’objectif final souhaité par le Traité instituant la Communauté économique africaine sur la libre circulation des personnes, leur droit de résidence et leur droit d’établissement.

Par Moussa Diop
Le 26/10/2018 à 14h18, mis à jour le 26/10/2018 à 14h34