RDC: la coalition pour un candidat unique de l'opposition vole en éclat

Felix Tshisekedi (à g.) et Vital Kamhere en compagnie de Moïse Katumbi (centre)

Felix Tshisekedi (à g.) et Vital Kamhere en compagnie de Moïse Katumbi (centre). DR

Le 13/11/2018 à 08h46, mis à jour le 13/11/2018 à 08h49

L'unité n'a même pas tenu 24 heures: deux poids lourds de l'opposition congolaise ont annoncé dès lundi qu'ils se retiraient de l'accord qu'ils avaient signé la veille pour désigner un candidat unique de l'opposition à l'élection présidentielle prévue le 23 décembre en RDC.

Les présidents de l'UDPS Félix Tshisekedi et de l'UNC Vital Kamerhe affirment avoir reculé sous la pression de leur base à Kinshasa, après l'accord surprise à huis-clos à Genève avec cinq autre ténors sur le nom d'un outsider méconnu, Martin Fayulu.

D'après cet accord, M. Fayulu, à la tête d'un petit parti peu représenté au Parlement, devait défendre les chances de l'alternance face à l'ex-ministre de l'Intérieur Emmanuel Ramazani Shadary, le candidat du président Joseph Kabila, au pouvoir depuis près de 18 ans et qui a accepté de se retirer.

Tout semble à refaire au sein de l'opposition après le coup de théâtre de lundi soir. "J'ai compris que l'acte posé à Genève a été mal compris et rejeté par la base. Par conséquent, je retire ma signature de cet accord que nous avions signé hier dimanche au nom de l'UDPS", a déclaré M. Tshisekedi à la radio Top Congo.

Très en colère, les militants réunis au siège de l'UDPS à Kinshasa lui avaient demandé plus tôt dans la journée de ne pas se retirer au profit de M. Fayulu et de maintenir sa candidature.

"On ne comprend pas pourquoi il peut se désengager pour un candidat impopulaire. Pour nous à l'UDPS c'est un affront. Nous disons que le président Tshisekedi doit se ressaisir et revenir à la raison", avait déclaré le secrétaire général de l'UDPS Jean-Marc Kabund.

Auto-exclusion

"Au cas contraire - c'est la base qui décide - il sera destitué", avait menacé Simon Kashama, militant de l'UDPS. "On n'a pas fait 36 ans de lutte pour chercher un candidat commun, mais pour chercher une alternance, conquérir le pouvoir", a-t-il poursuivi.

Quelques minutes après M. Tshisekedi, l'ex-président de l'Assemblée nationale Vital Kamerhe a embrayé à son tour la marche arrière toute, toujours sur Top Congo: "J'annonce donc que je retire ma signature pour respecter la volonté de ma base. Sans cette base, je vais moi-même m'auto-exclure du parti. A quoi ça sert d'être leader sans base ?".

Avant l'accord de Genève, MM. Tshisekedi et Kamerhe avaient été investis candidats à l'élection présidentielle par le congrès de leur parti. Felix Tshisekedi, fils du fondateur de l'UDPS Etienne Tshisekedi, passait même pour favori dans la course à la candidature unique de l'opposition, devant M. Kamerhe. Un sondage le présentait comme le candidat de l'opposition le plus populaire.

Inversement, l'UDPS et l'UNC déplorent le manque d'assises du candidat unique désigné à la surprise générale à Genève, Martin Fayulu, en dehors de sa province du Bandudu (centre-ouest).

"Le candidat devrait disposer d'une force d'organisation dans le pays pour conduire une campagne présidentielle. Le candidat Fayulu ne dispose pas de cette organisation à travers le pays, son parti ayant une sphère de rayonnement très limité", a écrit l'UNC dans un communiqué lundi.

Agenda caché

La famille Tshisekedi, issue de l'ethnie Luba particulièrement présente dans le Kasaï (centre), avec des communautés importantes dans la capitale Kinshasa et la région minière du Katanga à l'est, également un bastion du pouvoir en place. L'UDPS et l'UNC ont aussi prêté des intentions cachées aux deux autres signataires de l'accord de Genève, l'ex-gouverneur du Katanga Moïse Katumbi et l'ex-vice-président Jean-Pierre Bemba.

Tous deux n'ont pas pu se présenter à l'élection présidentielle. L'accord de Genève et la désignation de M. Fayulu représentent "un hold-up destiné à privilégier d'autres agendas", a accusé l'UNC.

La déclaration de Genève, qui demandait le retrait préalable à l'élection de l'utilisation de machines à voter (qui permettront aux électeurs de choisir les candidats et d'imprimer les bulletins de vote), sans quoi le scrutin serait "une parodie d'élection", "tend vers un boycott et des négociations avec Kabila", a déclaré le secrétaire général de l'UDPS à l'AFP.

"L'UDPS n'est pas partie prenante pour une éventuelle négociation politique avec Kabila au cas où les élections ne seraient pas organisées le 23 décembre. Nous tenons absolument à ce que les élections soient organisées le 23 décembre", a martelé M. Kabund.

L'UDPS est prête à aller aux élections "avec ou sans" la machine à voter, a-t-il rappelé. Vingt-et-un candidatures avaient été validées par la Cour constitutionnelle pour la succession du président Kabila, au pouvoir depuis janvier 2001.

Par Le360 Afrique (avec AFP)
Le 13/11/2018 à 08h46, mis à jour le 13/11/2018 à 08h49