Egypte: Mohamed Ali, homme d'affaires et bête noire du régime d'Al Sissi

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Le 26/10/2019 à 09h46, mis à jour le 26/10/2019 à 09h50

L’homme d’affaires égyptien exilé en Espagne Mohamed Ali, à l'origine de rares manifestations contre le président Abdel Fattah Al-Sissi en septembre, dit travailler avec l'opposition pour renverser le dirigeant égyptien et évoque une nouvelle mobilisation à venir.

"Nous lancerons un appel aux masses, mais pas maintenant (...) dans deux ou trois semaines", a-t-il dit dans un entretien à l'AFP en Espagne où il assure être exilé depuis un an. "Nous voulons réduire les risques d'affrontement (avec les forces de l'ordre) (...). La prochaine étape doit être mesurée car nous ne voulons pas de bain de sang", a-t-il précisé.

Homme d'affaires dans le secteur du bâtiment et acteur âgé de 45 ans, M. Ali s'exprimait depuis un bureau au décor minimaliste donnant sur la Méditerranée près de Barcelone, d'où il a posté en septembre des vidéos accusant M. Sissi de corruption et appelant à manifester contre lui. Face à la caméra, enchaînant les cigarettes, M. Ali avait assuré dans des monologues de 30 minutes visionnés des millions de fois que les hauts responsables militaires dépensaient l'argent public dans des projets inutiles, tels que des palais présidentiels.

Ces vidéos ont abouti le 20 septembre à de rares manifestations de centaines de personnes au Caire et dans plusieurs autres villes égyptiennes. Bien qu'ayant surpris les autorités dans un premier temps, les rassemblements ont été rapidement dispersés par la police. Un nouvel appel à manifester la semaine suivante a rassemblé quelques centaines de personnes, très vite dispersées également.

Mais les propos de M. Ali ont fait mouche parmi de nombreux Egyptiens, victimes d'une baisse spectaculaire du pouvoir d'achat depuis 2016 en raison de réformes économiques. "J'ai dit aux gens de sortir le vendredi dans un moment d'exaltation. Certain m'ont même reproché d'avoir appelé à une révolution à moi seul", a-t-il dit. Après ces rares manifestations, quelques 4.000 personnes ont été arrêtées, soit la pire vague de répression depuis l'arrivée au pouvoir de M. Sissi en 2014, selon les organisations de défense des droits humains. Certains, dont des enfants, des femmes, des personnes âgées et des étudiants, ont été remis en liberté, mais aucun chiffre n'a été communiqué par les autorités.

"Des gens ont été arrêtés à cause de moi... Cela montre au monde que (sous le régime de M. Sissi), il n'y a pas de liberté", a estimé M. Ali. "Leurs arrestations m'ont attristé", a-t-il ajouté, "mais elles me donnent l'énergie de continuer pour qu'ils soient relâchés, ainsi que ceux qui ont été arrêtés avant" eux. Depuis la destitution en 2013 du président Mohamed Morsi, issu des Frères musulmans, M. Sissi a sévèrement réprimé toute opposition, islamiste comme libérale, emprisonnant journalistes, blogueurs, comédiens ou encore avocats.

La sécurité a été renforcée dans la capitale égyptienne depuis septembre, la police procédant à des arrestations et des contrôles d'identité de citoyens au hasard, vérifiant le contenu de leurs téléphones portables. Les manifestations sont interdites en Egypte depuis 2013 et l'état d'urgence est en vigueur depuis 2017. Même si l'opposition a été décimée par le pouvoir de M. Sissi, M. Ali affirme avoir noué contact avec certains de ses représentants.

Par Le360 Afrique (avec AFP)
Le 26/10/2019 à 09h46, mis à jour le 26/10/2019 à 09h50