Vidéo. "Pression" de Macron sur Biya: la classe politique camerounaise réagit

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Le 24/02/2020 à 11h52, mis à jour le 25/02/2020 à 14h09

VidéoLes propos d'Emmanuel Macron, vendredi dernier, au Salon de l'agriculture à Paris, alors qu'il était interpellé par un supposé activiste camerounais, n'ont pas laissé la classe politique camerounaise indifférente. Parti au pouvoir, opposition et membres de la société civile montent au créneau.

Dans une vidéo abondamment partagée sur les réseaux sociaux, le président français, Emmanuel Macron, qui a été interpellé vendredi dernier par un supposé activiste camerounais, indique avoir «mis la pression» sur son homologue camerounais, Paul Biya, afin qu'il traite le sujet de la zone anglophone et ses opposants, notamment au sujet de la libération de l'opposant Maurice Kamto, président du Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC).

Invité de l'émission "Club d'élites" sur le plateau de la chaîne de télévision Vision 4, le président du Front pour le salut national du Cameroun (FSNC), Issa Tchiroma Bakary, a qualifié cette déclaration d’Emmanuel Macron d'«attentatoire contre le peuple camerounais».

Il a par ailleurs appelé «le peuple camerounais à protéger» son chef de l’État.

De son côté, Grégoire Owona, secrétaire général-adjoint du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC, au pouvoir), et ministre du Travail et de la Sécurité sociale, a eu des propos plus mesurés. 

«La France restera toujours un grand ami du Cameroun même si des activistes accueillis illégalement font sortir quelques instants certains responsables français de leur réserve habituelle. Le Cameroun continue sereinement son avancée vers la démocratie apaisée, la décentralisation approfondie et le respect des droits de l'homme engagés depuis plusieurs années, au delà de quelques prétendues pressions, à travers ses choix volontaristes et avec détermination sous la conduite inébranlable de Paul Biya. Vive l'amitié et la coopération Cameroun-France», a-t-il écrit sur son compte Facebook.

Pour certains internautes, cette déclaration du président français, qualifiée de «paternaliste», pourrait ne pas être un hasard.

«Nous devons savoir qu'au Salon de l'agriculture, il y a un autre activiste qui a essayé d'interpeller le président de la République française. M. Eric Drouet, du mouvement social des gilets jaunes, n'a pas eu la chance de pouvoir approcher M. Macron. Je ne pense pas que ce soit le fruit d'un hasard», indique l'universitaire et politologue Mathias Eric Owona Nguini.

«Lorsque j'ai vu la vidéo, j'ai immédiatement pensé à Ernest Ouandié, Um Nyobe {des nationalistes camerounais interceptés par l'armée française, Ndlr} en me disant que, sur la forme, sur le ton, ils ont dû se retourner dans leur tombe, ceux-là qui se sont sacrifiés pour notre indépendance et pour notre souveraineté. Depuis 2018, le premier d'entre nous, qui est garant de la souveraineté internationale du Cameroun, c'est celui qui a été proclamé élu, c'est bien Paul Biya. Je crois qu'il doit être le premier à s'indigner, s'il estime que l'amour propre du pays dont il incarne la souveraineté internationale est affecté», affirme Cabral Libii, président du Parti camerounais pour la réconciliation nationale (PCRN), invité hier, dimanche 23 février, dans l'émission «Scènes de presse» sur la CRTV.

Selon Cabral Libii, le Cameroun a perdu en respectabilité, depuis un certain temps, sur la scène internationale.

«Je pense qu'il faut travailler à restaurer cette respectabilité. Ça passe par exemple par un réaménagement de notre diplomatie. Ça passe aussi par des performances économiques, par une bonne gouvernance, par une démocratie pas seulement apaisée, mais effective», ajoute-t-il.

Dans un communiqué publié hier, dimanche, le ministre de la Communication, René Emmanuel Sadi, a essentiellement démonté «les allégations mensongères», de ce «prétendu activiste», dont le gouvernement condamne les déclarations qu'il a émises devant le oprésident de la république française.

Par Patricia Ngo Ngouem (Yaounde, correspondance)
Le 24/02/2020 à 11h52, mis à jour le 25/02/2020 à 14h09