Aux soutiens du maréchal Khalifa Haftar, les menaces et à la Turquie, l'occupation du terrain. Les premiers sont dans le verbe et la seconde est dans l'action.
Hier lundi donc, Emmanuel Macron a plus que regretté l'excès d'engagement turc en Libye, estimant qu'il s'agit d'une menace pour toute la Méditerranée et donc surtout pour l'Europe.
"Je considère aujourd’hui que la Turquie joue en Libye un jeu dangereux et contrevient à tous ses engagements pris lors de la conférence de Berlin", a-t-il lancé à l’issue d’un entretien avec son homologue tunisien Kaïs Saïed à la présidence française. Il affirme même l'avoir dit à Donald Trump dans un entretien téléphonique le même jour. Le fait qu'il en parle à cet incontournable partenaire dans le Traité de l'alliance nord-atlantique (OTAN) montre combien Paris estime cette situation délicate.
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Faisant clairement allusion à la Turquie, à la Russie et aux Emirats Arabes Unis, entre autres pays, Macron a demandé que soit mis fin aux ingérences étrangères et aux actes unilatéraux de ceux qui prétendent gagner de nouvelles positions à la faveur de la guerre en Libye.
Samedi, on a eu droit à des déclarations similaires, venant du Caire et d'Abdelfattah al-Sissi, en visite dans une base militaire vers la frontière avec la Libye.
Le président égyptien Abdelfattah al-Sissi, principal soutien du maréchal avec les Émirats arabes unis, a prévenu que toute avancée des pro-GNA vers Syrte pourrait entraîner une intervention directe de l'armée égyptienne. Le GNA, reconnu par l’ONU, a qualifié les menaces de l’Égypte de "déclaration de guerre".
Sauf que ce ne sont pas ces déclarations venues de Paris ou du Caire qui feront pencher la balance du côté du maréchal Haftar qui a enchaîné ces dernières semaines une série de revers.
Car, force est de constater que dans cette guerre qui se déroule dans l'Est libyen, aucun de ces protagonistes n'est réellement neutre. Bien qu'elle l'ait toujours nié, la France est accusée d'avoir soutenu discrètement le maréchal Haftar et chercherait même à lui trouver un remplaçant.
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La Russie aussi, puisque la très connue société de sécurité privée russe, le groupe Wagner, aurait déployé des centaines de mercenaires sur le sol libyen, lesquels se battraient pour le compte du camp de l'Est contre les troupes du GNA.
L'Egypte et les Emirats Arabes Unis, quant à eux, ne cachent pas leur positionnement dans ce conflit. Les drones de l'un et, dit-on, les armes et les services de renseignements de l'autre se battent du côté de l'homme fort de l'Est libyen.
Sauf que ces implications qui se veulent discrètes ne sont pas de nature à faire le poids face aux milliers de milices syriennes, aux avions et drones turcs, mais aussi et surtout aux centaines de tonnes d'armes qui débarquent régulièrement en Libye, par cargos aéroportés ou maritimes. Très concrètement, la Turquie est en train de gagner cette guerre et tous ceux qui soutiennent le maréchal Haftar sont en train de la perdre, à l'exception de la Russie.
Car, seuls les Russes, dont les intérêts stratégiques ne sont pas menacés en Libye, pourront obtenir dans la négociation finale avec les Turcs, une compensation acceptable pour eux.
La France qui avait déclenché la guerre en Libye en faisant chuter le colonel Kadhafi n'en tirera rien et a perdu toute influence sur le Gouvernement d'union nationale.
Pour l'Egypte, qui entendait défendre ses intérêts en mer Méditerranée, notamment dans les sites pétrogaziers qui font l'objet d'un différend avec les Turcs, la déconvenue sera totale.