Ethiopie: Plusieurs morts après le meurtre d’un célèbre chanteur oromo, l'Internet coupé

Le chanteur éthiopien Hachalu Hundessa, ici en costume traditionnel oromo à Addis-Abeba, en mars 2019, a été tué par balle le 29 juin 2020.

Le chanteur éthiopien Hachalu Hundessa, ici en costume traditionnel oromo à Addis-Abeba, en mars 2019, a été tué par balle le 29 juin 2020. . Tiksa Negeri / REUTERS

Le 01/07/2020 à 14h14, mis à jour le 01/07/2020 à 14h19

Hachalu Hundessa, tué par balle lundi soir à Addis-Abeba, était l’une des voix les plus écoutées de l’ethnie majoritaire oromo, qui s’estime marginalisée.

Trois personnes ont été tuées et plusieurs grièvement blessées en Ethiopie, mardi 30 juin, lors de manifestations provoquées par le meurtre d’un célèbre chanteur, Hachalu Hundessa, membre de l’ethnie majoritaire oromo. Ces violences ont conduit le gouvernement à couper Internet dans la capitale, Addis-Abeba, au risque de fragiliser un peu plus la transition démocratique mise en œuvre par le premier ministre Abiy Ahmed, Prix Nobel de la paix 2019.

La police fédérale a également confirmé mardi soir avoir arrêté Jawar Mohammed, un des dirigeants d’opposition les plus populaires et les plus critiques du gouvernemnt. Fondateur de la plateforme Oromia Media Network (OMN), basé aux États-Unis et qui diffuse principalement via Facebook, il aurait tenté de ramener à Addis Abeba le corps du chanteur qui devait être transporté dans sa ville natale d’Ambo pour y être inhumé.

« Trente-cinq personnes, dont Jawar Mohammed, ont été arrêtées. Les forces de sécurité ont saisi huit kalachnikov, cinq pistolets et neuf transmetteurs radio dans la voiture de Jawar Mohammed », a indiqué la police.

Selon la radio-télévision Fana, proche des autorités, Hachalu Hundessa a été tué par balle lundi soir à Addis-Abeba. Il était l’une des voix les plus écoutées de l’ethnie oromo et s’était notamment distingué pendant les années de manifestations antigouvernementales qui avaient porté Abiy Ahmed au pouvoir en 2018.

Pour lui rendre hommage, des foules de manifestants ont convergé mardi vers la capitale depuis la région voisine d’Oromia, bloquant la circulation. Des violences ont également éclaté à Adama, dans le centre du pays, où des victimes ont affirmé avoir été touchées par des tirs des forces de sécurité, selon un chirurgien de l’hôpital de la ville qui fait état de trois patients morts et un autre dans un état critique. « Il y a aussi plus de dix patients avec des brûlures, a précisé le médecin. Ils ont raconté que leurs maisons avaient été incendiées.»

Violences intercommunautaires

Le mobile du meurtre d’Hachalu n’est pas encore connu, mais le chef de la police d’Addis-Abeba a déclaré à Fana que « des suspects » avaient été arrêtés. Le premier ministre Abiy Ahmed, lui-même d’origine oromo par son père, a appelé au calme et exprimé sa « peine profonde » dans un communiqué publié sur Twitter, décrivant Hachalu comme un « jeune artiste rayonnant ».

Au plus fort des manifestations antigouvernementales, qui avaient commencé en 2015, le chanteur avait donné un concert au Millennium Hall, un centre de conférence à Addis-Abeba, où il avait exprimé dans ses textes les griefs de sa communauté, qui s’estimait marginalisée économiquement et politiquement.

Depuis son accession au pouvoir, le premier ministre s’est efforcé de promouvoir des réformes politiques et économiques. Mais cette ouverture a laissé le champ libre aux violences intercommunautaires, qui mettent à l’épreuve le système éthiopien de fédéralisme ethnique. De nombreux nationalistes oromo reprochent au premier ministre de ne pas assez défendre les intérêts de sa communauté. En novembre 2019, 78 personnes avaient ainsi été tuées en Oromia dans une vague de violences qui avait débuté par des manifestations contre Abiy Ahmed, avant d’évoluer en affrontements alimentés par le ressentiment ethnique et religieux.

Par Le360 Afrique (avec AFP)
Le 01/07/2020 à 14h14, mis à jour le 01/07/2020 à 14h19