Décès de Pascal Lissouba, premier président élu lors d'un scrutin pluraliste au Congo

Pascal Lissouba, ancien président du Congo.

Pascal Lissouba, ancien président du Congo. . DR

Le 24/08/2020 à 18h54, mis à jour le 24/08/2020 à 19h10

Décédé à 88 ans, lundi 24 août en France, où il vivait en exil après avoir été chassé du pouvoir en 1997 par l'actuel chef de l'Etat Denis Sassou Nguesso, Pascal Lissouba fut le premier président du Congo élu lors d'un scrutin pluraliste.

Mais son mandat est entaché par les conflits sanglants entre milices affidées aux dirigeants et partis politiques, débouchant sur une guerre civile qui aura raison de son pouvoir.

Au cours de sa vie, Lissouba aura alterné hautes responsabilités politiques et disgrâce, et connu la prison et l'exil.

Né le 15 novembre 1931 à Tsinguidi, dans le district de Mayoko (Sud-Ouest du Congo), Pascal Lissouba, ingénieur agronome est titulaire d'un doctorat en sciences naturelles obtenu en France.

En 1963, après le renversement de l'abbé Fulbert Youlou, premier président du Congo indépendant, il est nommé ministre de l'Agriculture, de l'élevage, des eaux et forêts par le nouvel homme fort du pays Alphonse Massamba-Débat, dont il devient deux ans plus tard le Premier ministre.

Sur fond de divergences avec lui, il quitte le gouvernement dès 1966. Il enseigne à l'université, mais revient en politique en 1968 au sein d'un Conseil national de la Révolution (CNR), organe formé après une révolte militaire pour dépouiller de fait de son pouvoir le président Massamba-Débat.

Celui-ci finit par démissionner et Lissouba est durant six mois ministre du jeune nouveau président Marien Ngouabi, un militaire de 30 ans, avant d'être arrêté et jugé en compagnie de l'ex-président Massamba-Débat et d'autres anciens de ses collaborateurs, accusés d'assassinats commis sous son régime.

Comme la plupart de ses coaccusés, Lissouba est acquitté mais interdit d'activités politiques. Il est à nouveau plusieurs fois arrêté, parfois emprisonné, entre 1969 et 1977, année de l'assassinat de Ngouabi, pour lequel il est condamné à mort avec d'autres, avant que sa peine soit commuée en réclusion à perpétuité.

Libéré en 1979, il s'exile en France durant plus de dix ans.

"guerre civile"

Il ne revient au Congo qu'à la faveur d'une "Conférence nationale" décidée début 1991 par le président Denis Sassou Nguesso, poussé par le vent de démocratie qui souffle sur l'Afrique après la chute du Mur de Berlin et le discours de La Baule, dans lequel le président français François Mitterrand appelle à des réformes sur le continent.

Une nouvelle Constitution est adoptée, consacrant le multipartisme, et Pascal Lissouba remporte la première présidentielle multipartite en 1992.

Il prend les rênes d'un pays de cinq millions d'habitants majoritairement jeunes, surendetté et dont l'économie est à genoux malgré d'importantes ressources pétrolières.

Son pouvoir est rapidement terni par les sanglants affrontements entre les milices formées sur des bases ethniques et régionales par les principaux dirigeants politiques.

Un premier conflit fait plus de 2.000 morts en 1993-94 après des législatives contestées. Un accord de paix dissout officiellement les milices, mais elles continuent de faire régner la terreur à Brazzaville.

En 1997, le pays en campagne présidentielle plonge dans la guerre civile. Plusieurs mois de combats meurtriers (entre 4 et 10.000 morts) opposent dans Brazzaville les milices de Lissouba et celles de son Premier ministre Bernard Kolélas aux "Cobras" de Sassou Nguesso.

Appuyés par des troupes angolaises, les Cobras prennent finalement la capitale.

Lissouba s'exile et s'installe à Londres, puis en 2004 à Paris, après avoir longtemps accusé la France et la compagnie pétrolière Elf d'avoir aidé Sassou Nguesso à le chasser du pouvoir.

Condamné par contumace dans son pays pour crime de guerre, haute trahison et pour "avoir bradé le pétrole congolais", il est finalement amnistié en 2009.

Pascal Lissouba est décédé à Perpignan (Sud de la France), où il vivait depuis 2011, "des suites de maladie", a annoncé à l'AFP le député Honoré Sayi, porte-parole de l'UPADS, son parti.

Par Le360 Afrique (avec AFP)
Le 24/08/2020 à 18h54, mis à jour le 24/08/2020 à 19h10