Egypte. Le Caire: interminables bouchons entre mulets, tuk-tuk et voitures

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Le 09/12/2016 à 13h55, mis à jour le 09/12/2016 à 18h54

Dans cette mégalopole de 20 millions d'habitants, la plus grande d'Afrique, se déplacer quotidiennement est une gageure. Le métro récemment lancé transporte déjà 3,5 millions de passagers par jour mais il est loin de satisfaire tous les besoins en transport. Bus et taxis sont vétustes.

Dans un concert de klaxons incessant, Mostafa Ekram à bord de son 4X4, affronte chaque jour la frénésie des embouteillages du Caire, les piétons qui traversent à tout moment, les tuk-tuk qui slaloment entre les voitures et même les carrioles tirées par des ânes.

Au volant de sa voiture, en plein coeur de la capitale égyptienne, il évite sans sourciller un tuk-tuk noir, engin motorisé à trois roues, venant en sens inverse. Une scène familière au Caire, mégalopole de quelque 20 millions d'habitants où le code de la route est rarement respecté et où les embouteillages peuvent durer jusque tard dans la nuit. Le tout sous les yeux de policiers qui semblent dépassés par les événements. "J'ai l'impression d'être un prisonnier dans une voiture qui cherche à s'échapper", se lamente M. Ekram, jeune directeur commercial. "Les embouteillages gaspillent ton énergie et ton temps", soupire-t-il.

Quand ils n'ont pas les yeux rivés à leurs portables, les conducteurs font la course aux bus et minibus qui déboulent à toute allure. Souvent, ils évitent de justesse les piétons, parfois les carrioles, le tout en l'absence quasi-généralisée de feux de signalisation et de passages cloutés.

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Face au chaos, les autorités ont adopté ces deux dernières années un plan - achevé à 80% - qui prévoit l'installation de caméras à tous les carrefours et des radars sur les routes accidentogènes. Elles étudient aussi la possibilité d'espacer les horaires des fonctionnaires pour alléger la congestion.

Le diagnostic du colonel de police Emad Hamad, un responsable de la circulation, est sans appel: "le principal problème, c'est l'attitude des citoyens", dit-il. "Stationner là où c'est interdit contribue aux embouteillages". Car il n'est pas rare de voir un conducteur ralentir pour demander son chemin à son voisin de file, bloquant la route et déclenchant un concert de klaxons, ou encore, deux chauffeurs de minibus à la traîne pour échanger de la monnaie ou s'offrir une cigarette.

Taxis et bus d'un autre âge

Selon des chiffres officiels, environ 3,3 millions de voitures circulent dans les rues du Caire. Et malgré le périphérique et un entrelacs d'autoroutes et de ponts construits pour résorber un trafic en augmentation, les bouchons demeurent.

Retards de livraison, gaspillage de carburant... Le problème a coûté au pays quelque 8 milliards de dollars (7,5 milliards d'euros) en 2011, soit 3,6% du PIB, selon la Banque mondiale, un chiffre qui devrait plus que doubler d'ici 2030 selon elle. Mais Ossama Okail, professeur d'université spécialiste du trafic, doute de l'efficacité des mesures proposées par les pouvoirs publics, qui selon lui ne vont pas "apporter de véritable solution".

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"Le meilleur remède" à la circulation infernale est d'avoir "des transports publics de qualité (...) pour convaincre les gens de les utiliser plutôt que de prendre leur voiture", estime-t-il. Jusqu'à présent, ceux qui en ont les moyens préfèrent utiliser leur voiture malgré une hausse des prix du carburant, plutôt que d'emprunter des transports en commun décrépits. D'autres utilisent les taxis mais se heurtent aux mêmes problèmes d'embouteillages que les automobilistes.

"Un bus peut transporter 50 passagers, qui occuperaient normalement 40 voitures", plaide M. Okail. Les autorités prévoient d'étendre le métro du Caire, relativement récent et jusqu'à maintenant doté de trois lignes accueillant 3,5 millions d'usagers par jour. Mais les bus publics, toujours bondés, sont eux pour la plupart vétustes, brinquebalants et avec des sièges défoncés.

Pour survivre au cauchemar, de plus en plus d'Egyptiens ont recours aux deux-roues. Heba Essam, 36 ans, employée dans une multinationale, a, elle, trouvé une autre solution: elle travaille deux jours par semaine depuis chez elle. Car lorsqu'elle prend la voiture, elle y passe près de quatre heures par jour. "Je suis déjà fatiguée quand j'arrive le matin au travail", assure la jeune femme, qui craint aussi les accidents. En 2015, l'Egypte a connu 14.500 accidents de la route, qui ont fait 6.000 morts et 19.000 blessés, avec en moyenne 17 décès par jour.

Par Le360 Afrique (avec AFP)
Le 09/12/2016 à 13h55, mis à jour le 09/12/2016 à 18h54