«Dans les régions anglophones du Cameroun, des séparatistes armés ont tué des militaires par balle ou à l’arme blanche, incendié des écoles et agressé des enseignants et les forces de sécurité ont infligé des actes de torture, tiré sur des foules et détruit des villages, dans une spirale de violence de plus en plus meurtrière», a déclaré Amnesty International ce 12 juin 2018, à l’occasion de la publication d’un nouveau rapport sur les violences meurtrières dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest du pays, en proie à des tensions depuis le déclenchement de la crise anglophone il y a près de deux ans.
Dans ce rapport intitulé «Une tournure tragique. Violence et atteintes aux droits humains dans les régions anglophones du Cameroun», l’organisation de défense des droits humains montre que la population de cette partie du pays subit les plus lourdes conséquences de l’escalade de la violence, caractérisée par «des homicides aveugles et des déplacements de grande ampleur».
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Le rapport révèle que les forces de sécurité ont détruit des villages et torturé au moins 23 personnes, dont des mineurs, pour leur extorquer des «aveux». De leur côté, des séparatistes armés ont tué 44 membres des forces de sécurité et attaqué 42 écoles entre février 2017 et mai 2018.
«Le fait que les séparatistes armés ne cessent de s’en prendre à la population témoigne d’un mépris total à l’égard de la vie humaine et met en lumière la menace qui pèse sur les habitants des régions anglophones», a déclaré Samira Daoud, directrice adjointe du bureau régional d’Amnesty International pour l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale, lors d’une conférence de presse à Dakar, la capitale sénégalaise.
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«Il faut que les autorités amènent les membres des forces de sécurité et les séparatistes armés qui auraient commis des infractions à répondre de leurs actes. Elles doivent immédiatement mettre fin au recours excessif, illégal et inutile à la force et veiller à ce que la population soit protégée», a-t-elle poursuivi. Ce rapport, apprend-on, se fonde sur des «entretiens approfondis» avec plus de 150 victimes et témoins, ainsi que sur des preuves matérielles, notamment des «images satellites».
Le gouvernement n’a pas encore officiellement réagi à ce nouveau rapport qui épingle une fois de plus l’armée camerounaise. Toutefois, à Amnesty International, l’on assure que le chef de l’Etat, Paul Biya, a reçu une délégation de l’organisation et s’est «dit réceptif» aux conclusions contenues dans ledit rapport. L'ONG espère que «les recommandations formulées dans ce rapport seront prises en considération» par le gouvernement de Yaoundé.