Josiane Kouagheu, journaliste travaillant pour l’agence de presse Reuters, a été interpellée dimanche 21 octobre 2018 et détenue pendant toute la journée à la Direction de la sécurité du territoire (DST) à Douala, la métropole économique du pays. Elle a été arrêtée alors qu’elle couvrait une «marche pacifique» initiée par le député du Social Democratic Front (SDF, parti historique de l’opposition), Jean-Michel Nintcheu, et interdite par les autorités de la ville.
Selon des sources fiables, la journaliste se trouvait sur le lieu de la manifestation lorsqu’elle a été témoin de l’arrestation d’un homme arborant un T-shirt appelant au départ du chef de l’Etat Paul Biya, qui brigue un septième mandat à la tête du pays à l’élection présidentielle du 7 octobre dernier.
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Alors que la journaliste cherchait à savoir où était conduit l’infortuné, l’un des policiers lui a alors demandé de se présenter. Elle a alors décliné sa qualité de journaliste mais ce dernier a exigé davantage de preuves. Elle s'est alors dirigée alors vers le taxi qui l’a conduite pour prendre ses pièces, suivie par l’agent de police qui a ensuite procédé à la fouille du véhicule.
Pendant la fouille, le policier est tombé sur un gilet pare-balles avec la mention «Press» écrit dessus, ainsi qu’un casque. Il s’agit là du matériel de travail qui accompagne la journaliste lors de ses reportages en zones de conflit. Josiane Kouagheu a, par la suite, été embarquée manu militari et conduite à la DST, où elle a été retenue pendant plusieurs heures (de 13 heures à 18 heures 30).
Elle a été finalement libérée en début de soirée, grâce à l’intervention du Syndicat national des journalistes du Cameroun (SNJC). Elle doit à nouveau être entendue ce lundi 22 octobre 2018 et son matériel lui sera en principe restitué. Son chauffeur, également interpellé, a quant à lui passé la nuit dans les locaux de la Police judiciaire. Ce dernier doit être libéré aujourd'hui.
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Le député Jean-Michel Nintcheu avait appelé à manifester dimanche dernier pour protester contre les résultats de l’élection du 7 octobre dernier, qui doivent proclamés ce lundi par le Conseil constitutionnel. La manifestation a été interdite par le sous-préfet de l’arrondissement de Douala 3e pour «menaces graves de troubles à l’ordre public au regard de son objet et risques de perturbation de la libre circulation des personnes ainsi que des biens sur l’itinéraire choisi».
Aux premières heures de la matinée, la résidence du député du Social Democratic Front a été encerclée par des policiers, l’empêchant ainsi de sortir. Le même dispositif était également visible chez Edith Kah Walla, présidente du Cameroon People’s Party (CPP) et candidate malheureuse à l’élection présidentielle de 2011. Elle devait également prendre part, hier, à cette marche non autorisée.
Au total, une trentaine de personnes qui tentaient de manifester ce dimanche ont été interpellées par les forces de l’ordre.