Cameroun: quand la drogue fait son entrée à l'école

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Le 13/01/2019 à 12h13, mis à jour le 13/01/2019 à 12h15

Désormais, les écoles ne sont plus épargnées par le phénomène. Le gouvernement a lancé, depuis janvier 2018, une campagne nationale de sensibilisation pour éradiquer l'usage des drogues à l'école. Les détails, en chiffres.

Le premier trimestre de l'année scolaire 2018-2019 a été marqué à Yaoundé, la capitale, par un événement tragique qui a choqué la communauté éducative nationale. Il s'agit du meurtre brutal d'un élève par son camarade, probablement sous l'effet d'une drogue, dont il était sans doute un consommateur régulier.

Les faits se sont produits fin novembre 2018 à l'Institut polyvalent bilingue La Sophia, dans la banlieue de Yaoundé.

Dave Menendi, 18 ans, a été poignardé par son camarade après une altercation. Selon un témoin, tout a dégénéré lorsque la victime a dit à son bourreau, à voix haute: «la drogue que tu prends ne m'influence pas», avant qu'il ne soit mortellement poignardé.

Face l'émoi suscité par ce drame, la ministre des Enseignements secondaires, Nalova Lyonga, a effectué dans la foulée une visite dans cette école afin de sensibiliser sur la violence et les méfaits des drogues, et tout particulièrement des psychotropes, en milieu scolaire.

De fait, la consommation des drogues et autres produits stupéfiants semble aller crescendo dans les établissements scolaires, où il n'est plus rare que des enseignants surprennent des élèves sur le fait et les traduisent en conseil de discipline où ils sont généralement exclus.

Les fouilles inopinées sont désormais régulières pour tenter de confondre les consommateurs et leurs dealers, qui agissent parfois au sein même des établissements scolaires.

Selon une étude menée en 2017 sur la consommation de drogues en milieu scolaire à Yaoundé, notamment dans les établissements confessionnels, il apparaît que les drogues les plus consommées par les élèves, par ordre d'importance, sont: l'alcool, la chicha, la cigarette et le Tramadol (un psychotrope plus connu sous le nom Tramol dans le pays).

On retrouve,mais en plus faibles quantités écoulées, le 010, le Diazépam, deux autres psychotropes, et la cocaïne. Dans leur vie, selon une enquête commandée par le ministère camerounais de l'Education nationale, 82,14% des élèves ont déjà consommé de l'alcool, 25,55% ont déjà fumé une cigarette, 46,25% ont déjà fumé de la chicha, 6,11% des élèves intérrogés ont déjà consommé du Tramol.

«En comparant les données de la présente investigation avec ceux de l'étude publiée en 2008 par le psychologue Théodore Kommegne, clinicien spécialiste en psycho-traumatologie, on remarque que la consommation des drogues dures est en augmentation dans les établissements scolaires au Cameroun (…) Cette étude montre que la drogue touche même les établissements considérés comme les plus performants et disciplinés et au regard du profil des élèves inscrits, les enfants des classes sociales moyenne et même supérieure», conclut le père Joseph Armel Fopa qui a mené cette étude.

D'où, notamment, la campagne de lutte lancée sur le plan national par le gouvernement camerounais depuis le mois de janvier 2018.

Selon le Comité national de lutte contre la drogue, 21% de la population a déjà expérimenté une drogue dure. 10% en sont des usagers réguliers, dont 60% des jeunes âgés de 20 à 25 ans.

Plus de 12.000 jeunes camerounais âgés de moins de 15 ans seraient concernés par l'usage de stupéfiants et produits psychotropes.

Par Tricia Bell (Yaounde, correspondance)
Le 13/01/2019 à 12h13, mis à jour le 13/01/2019 à 12h15