Daniel n’a pas présenté le Certificat d’études primaires (CEP), l’examen sanctionnant la fin de son cycle primaire, l’année dernière... Faute d'avoir pu présenter un extrait d'acte de naissance, celui-ci étant inexistant.
«C’est son père qui devait lui en établir un à sa naissance, mais il ne l’a pas fait», se dédouane sa maman, Jeanne.
Conséquence: le garçonnet de 10 ans a dû reprendre le Cours moyen deuxième année (CM2), alors qu’il fait partie des meilleurs élèves de sa classe.
«J’ai beaucoup pleuré quand j’ai su que je ne pouvais pas faire le CEP parce que je n’avais pas d’acte de naissance. Et voir mes camarades passer en sixième et porter la tenue du lycée, ça m’a aussi beaucoup frustré. Mais mes parents ont promis tout faire pour régulariser la situation pour que je puisse passer mon examen cette année», confie l’écolier, inscrit dans une école publique à Yaoundé, la capitale.
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Comme Daniel, de milliers d’enfants au Cameroun ne sont pas enregistrés à l’état civil. Selon le Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef), près d’un enfant sur trois n’a pas d’acte de naissance dans le pays.
Le taux d’enregistrement des naissances des enfants de moins de 5 ans au niveau national est estimé à 66,1% selon l’enquête par grappes à indicateurs multiples (MICS) réalisée en 2014 par l’Institut national de la statistique (INS).
Les taux les plus bas se retrouvent dans les régions de l’Extrême-Nord (42%), du Sud-Ouest (56%), de l’Est (58%) et du Nord (61%).
L’enquête a en effet montré qu’il existait des disparités géographiques et économiques à l’intérieur même du pays.
Ainsi, les enfants dépourvus d'un acte de naissance viennent en grande partie des zones rurales, et sont presque issus des communautés les plus pauvres.
«Les parents habitant dans des zones rurales ou reculées doivent parfois faire un long trajet pour se rendre jusqu’au centre d’état civil. Cette longue distance constitue un frein à la déclaration de naissance», a expliqué, lors d’une présentation sur les problématiques liées à l’enregistrement des naissances au Cameroun, Frédy Bekono Efandene, point focal de l’Unicef au Bureau national de l’état civil (BUNEC).
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Une étude menée récemment par le BUNEC à Maroua, capitale régionale de l’Extrême-Nord, révèle que plus de 400.000 élèves de l’enseignement maternel et primaire n’ont pas d’acte de naissance.
«Lors de nos différentes visites dans les établissements scolaires, nous avons constaté que les enfants n’ont pas d’acte de naissance et que c’est généralement lorsqu’ils sont au CM2 qu’à l’initiative des directeurs d’école notamment, on cherche à leur établir des actes de naissance pour pouvoir se présenter au CEP», rapporte également cette étude.
Ignorance
D’après le BUNEC, certains parents ne jugent plus utile d’établir un acte de naissance à l’enfant une fois que celui-ci déjà scolarisé.
D’autres, apprend-on, abandonnent les actes de naissance dans les centres d’état civil, surtout en zone rurale.
Cette situation se justifie notamment par l’ignorance des parents. Selon l’Unicef en effet, les familles ignorent que l’enregistrement des naissances est un droit fondamental de l’enfant et n’ont pas conscience des conséquences graves que l’absence d’enregistrement peut avoir sur l’avenir de leurs enfants.
«L’enregistrement des naissances garantit les droits fondamentaux tout au long de la vie d’une personne. C’est l’enregistrement à l’état civil qui permet de bénéficier des services sociaux (santé, éducation, etc.)», indique l’agence onusienne.
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En effet, l’enregistrement des naissances établit, au regard de la loi, l’existence de l’enfant et fournit les fondations permettant de préserver ses droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels.
L’article 7 de la Convention relative aux droits des enfants précise d’ailleurs que tous les enfants ont le droit à l’enregistrement de leur naissance sans discrimination.
Mais plusieurs barrières constituent un frein à la pleine réalisation de ce droit. Pour inverser la tendance, le Cameroun, avec notamment l’appui de ses partenaires au développement, multiplie des initiatives visant à établir des actes de naissances aux enfants dès leur naissance.
C’est ainsi que le gouvernement a engagé, avec le soutien de l’Union européenne (UE) et de l’Unicef, le projet d’enregistrement universel des naissances, lequel vise une réforme en profondeur du fonctionnement du système national de l’état civil.
Plus spécifiquement, il s’agit d’augmenter le taux d’enregistrement des naissances, en particulier celui des nouveau-nés, dans deux zones pilotes à l’Extrême-Nord et à l’Est, où se trouvent les taux le plus faible du pays, en ce qui concerne ce droit pourtant fondamental à l'établissement d'un état civil.