Afrique du Sud: Nhlanhla Lux, visage d'un mouvement controversé qui veut "refouler" les étrangers

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Le 29/04/2022 à 09h14, mis à jour le 29/04/2022 à 09h23

Il est devenu pour certains un "héros des townships". Enfant noir de Soweto, Nhlanhla Lux Mohlauli, 35 ans, est le visage d'un courant anti-migrants controversé qui, en quelques mois, est monté en puissance en Afrique du Sud.

Début janvier, le mouvement Opération Dudula, "refouler" en zoulou, fait son apparition dans un pays ponctuellement en proie à des flambées xénophobes.

Les manifestations rassemblent rapidement quelques milliers d'adeptes à Johannesburg, des foules quasi exclusivement noires, en colère contre le manque de moyens, le chômage: "les étrangers volent le travail des Sud-Africains", clament-ils.

Invariablement vêtu d'un treillis et d'un gilet pare-balles, Nhlanhla Lux est en première ligne avec des déclarations choc sur les migrants illégaux qui "occupent" le pays.

Au dernier étage de sa maison à Soweto, il enchaîne les coups de fil. Grand, soigné, il est accompagné d'une poignée de sympathisants qui semblent avoir leurs habitudes dans les lieux équipés d'une salle de sport, un sauna et quelque part, dit-il, une cache d'armes.

"L'objectif est simple: lutter contre les criminels dans nos communautés. Et il se trouve que la majorité des problèmes proviennent des étrangers en situation irrégulière", affirme-t-il dans un entretien à l'AFP.

Près de quatre millions d'étrangers sont présents sur le territoire, selon les statistiques officielles. La première puissance industrielle du continent lutte contre un taux de chômage à 35%, mais attire de nombreux migrants africains.

Confidentialité

Le mois dernier, celui que certains décrivent comme un "leader charismatique" a été arrêté pour violation de domicile. Car une des tactiques du mouvement est d'organiser des raids, sur la base de dénonciations, chez les personnes soupçonnées de vol ou trafic de drogue.

Les échanges se font par messageries dans des groupes privés de plusieurs centaines de membres qui se saluent en termes militaires.

Se défendant de vouloir faire justice lui-même, Nhlanhla Lux affirme mener ces opérations en coopération avec la police.

"La police fait appel à toute personne disposant d'informations sur des actes criminels", déclare cette dernière à l'AFP. "Nous ne confirmerons aucune identité de ceux qui fournissent des informations car nous garantissons la confidentialité".

Début avril, un homme a été tué dans un township au nord de Johannesburg. Ce soir-là, des hommes ont cogné aux portes, réclamant qu'on leur présente des papiers, selon la police. Elvis Nyathi, un Zimbabwéen de 44 ans, a tenté de fuir. Il a été brûlé vif.

Deux semaines plus tard, lors d'une action avec des membres de l'Opération Dudula contre des vols de câbles, une fusillade éclate : un mort, six blessés.

"Toutes les victimes seraient des Sud-Africains. La nationalité des tireurs présumés n'a pas encore été déterminée car ils ne détenaient pas de pièce d'identité", a déclaré la police.

"Nous avons été pris en embuscade par des étrangers en Afrique du Sud", tonne Nhlanhla Lux, marquant chaque syllabe.

Sa récente popularité est née lors de la vague de pillages et d'émeutes sans précédent qui a enflammé le pays en juillet, faisant plus de 350 morts. Son appel à protéger le centre commercial de Soweto a fait le tour des réseaux sociaux.

Copieux et sains

Né juste avant la fin de l'apartheid en 1991 dans un milieu modeste, sa mère, femme de ménage dans des magasins tenus par des blancs, rêve d'une autre vie pour lui et s'arrange pour qu'il fréquente les mêmes "écoles de riches" que les enfants de ses employeurs.

"Je voyais des enfants avec des boîtes contenant des déjeuners bien plus copieux et sains que ce que ma famille pouvait manger", se rappelle celui qui raconte qu'il dormait sur le sol de la cuisine.

Grâce au sport et des bourses, il continue à l'université et entre dans le business lucratif du golf. Il affirme avoir gagné suffisamment à l'époque pour ne pas être "prisonnier" d'un emploi aujourd'hui.

"Nhlanhla dit ce que nous voulons entendre, nous avons besoin de quelqu'un qui a le courage de dire +Fermez les frontières+", explique Thabang Moloi, 54 ans, un fidèle.

Le président Cyril Ramaphosa a récemment mis en garde contre des méthodes comparables à celles employées sous l'apartheid.

En Afrique du Sud, 62 personnes ont été tuées lors d'émeutes xénophobes en 2008. De violents heurts ont éclaté en 2015, 2016 et encore en 2019.

Par Le360 Afrique (avec AFP)
Le 29/04/2022 à 09h14, mis à jour le 29/04/2022 à 09h23