Les propos d’un évêque sur la réconciliation créent la polémique

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Le 23/05/2016 à 18h31, mis à jour le 23/05/2016 à 21h17

«Dans le conflit ivoirien, nul ne peut se dire innocent» et «dans un tel contexte, la réconciliation, si elle se veut sincère, exige la libération de tous ceux qui sont poursuivis». Il n’en fallait pas plus pour que ces propos de l’évêque Ignace Bessi Dogbo créent émoi et polémique en Côte d'Ivoire.

Dans un enseignement à relents religieux et philosophique, au cours du «pèlerinage national catholique» rassemblant des fidèles catholiques à la Basiliques Notre Dame de la Paix de Yamoussoukro ce 21 mai, Monseigneur Ignace Bessi Dogbo, évêque de Katiola, a évoqué la nécessité pour tous les Ivoiriens de se rassembler «autour de la table de la réconciliation».Ce qui exige selon lui «la libération des prisonniers dans le cadre advenu dans le pays», d’autant plus que « dans le conflit ivoirien, nul ne peut se dire innocent». Des propos qui font l’objet d’interprétations diverses.«Pour se réconcilier, il faut être libre, (…) il faut avoir la faculté d’aller et venir sans être inquiété. (…) La réconciliation est pré-politique, c’est-à-dire que la réconciliation vient avant la politique» pour favoriser «les retrouvailles» a indiqué l’évêque de Katiola. Avant de déplorer «une réconciliation (…) défigurée» parce que «au service de la politique (…), au détriment de la cohésion sociale».Si l’église catholique en Côte d’Ivoire n’a eu de cesse depuis la fin de crise de 2010 d'appeler à la réconciliation et au pardon, à travers des discours mesurés, les déclarations du prélat ont été appréhendées comme une prise de position officielle. Surtout dans un contexte qui a rassemblé des milliers, voire des dizaines de milliers de fidèles, venus de tout le pays.Le fait est que l’église catholique est, à tort ou à raison, considérée comme plus favorable à l’ancien régime. En cause, une position jugée ambiguë durant la crise postélectorale, pour n’avoir pas, dit-on, clairement apporté son soutien à l’actuel régime alors reconnu par la communauté internationale. Des récriminations dont elle s’est pourtant toujours défendue.«L’église est dans son rôle de montrer la meilleure voie pour amener les Ivoiriens à se pardonner et se rassembler», tonnent certains. Pour d’autres «l’église va un peu trop loin» dans ses propos alors qu’il lui faut «être à équidistance des partis politiques».Pour sa part, le cardinal Jean-Pierre Kutwa, le chef de l’église en Côte d’Ivoire, intervenant à la même occasion, a prié pour que «les cœurs endurcis par les souffrances et beaucoup d’autres choses se ramollissent afin qu’ils se tournent les uns vers les autres, s’acceptent pour une Côte d’Ivoire paisible, …, où il fait bon vivre».

Par Georges Moihet (Abidjan, correspondance)
Le 23/05/2016 à 18h31, mis à jour le 23/05/2016 à 21h17