«Nous allons reprendre le contrôle de cette armée afin qu'elle soit vraiment au service de la nation, pour ne pas que les populations aient peur de leur armée», affirmait le 18 janvier le ministre ivoirien délégué à la Défense, Alain Donwahi, en pleine mutinerie de l’armée en Côte d’Ivoire. L’exercice s’avère périlleux.
A peine a-t-il annoncé son ambitieuse loi de programmation militaire (2016-2020) –d’un coût de 80 milliards FCFA destiné à moderniser l’outil militaire- qu’Alain Donwahi doit ranger sa paperasse au tiroir. Depuis le début de l’année 2017, il multiplie les négociations avec les soldats de l’armée pour mettre un terme aux nombreuses mutineries déclenchées le 6 janvier à Bouaké avec les anciens soldats de l’ex-rébellion et qui se poursuivent avec les Forces spéciales à Adiaké.
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Le vaste changement au sein de la chaîne de commandement de l’armée engagé fin janvier n’a manifestement pas eu l’effet escompté à savoir celui de rétablir la confiance et le fil du dialogue entre les hommes et leurs hiérarchies en vue de donner la priorité aux négociations.
Au micro de TV5 ce mercredi, le porte-parole des mutins des Forces spéciales s’est voulu clair : «nous maintenons notre mouvement et le pays va le subir jusqu’à ce que nos revendications soient réglées. Nous voulons 17 millions FCFA chacun et nous sommes prêts à mourir pour cela».
Une posture radicale qui ne fait pas l’affaire des négociateurs désignés, notamment le chef d’état-major des armées, le général Sékou Touré et le patron des Forces spéciales, le général Lacina Doumbia.
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«Le président Ouattara a inéluctablement fait une grave erreur en accordant les primes après la première mutinerie. Le gouvernement n’a pas suffisamment pris la mesure du problème ni analyser ses contours. Aujourd’hui, il est pris en tenaille et il lui sera difficile de s’en sortir. Le contrôle de l’armée lui échappe de plus en plus», commente Romain Dagnogo, politologue.
Mercredi, au terme du conseil des ministres et au cours de la conférence de presse animée à la présidence de la République, le porte-parole du gouvernement, le ministre Bruno Koné a certes fermement condamné «ces formes violentes de revendications», mais il a reconnu de façon voilée, la difficulté de mettre les soldats au pas.
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«Face aux différents problèmes, nous ne baissons pas les bras, mais il y a la difficulté de surveiller 30.000 soldats sur le territoire. Tout ce que nous disons, c’est que ce type de revendications par la force n'est pas la bonne option. Il existe des canaux pour faire remonter les informations», a-t-il répondu à la question des journalistes.
«Tous ces événements ternissent l'image de notre pays. Ce type de revendications risque d’amenuiser les ressources de l'Etat», a dit Koné Bruno, rappelant que le gouvernement doit aussi faire face aux revendications des fonctionnaires qui avaient paralysé l’administration, trois semaines durant, au mois de janvier.