Côte d'Ivoire: Guillaume Soro démissionne de la présidence de l'Assemblée nationale

Guillaume Soro, président du Parlement ivoirien.

Guillaume Soro, président du Parlement ivoirien. . DR

Le 08/02/2019 à 17h35, mis à jour le 08/02/2019 à 17h37

La brouille est désormais ouverte entre le président Alassane Ouattara et l'ancien chef de la rébellion Guillaume Soro, candidat potentiel à la présidentielle 2020, qui, en démissionnant de présidence de l'Assemblée national, se retrouve désormais libre de mener à sa guise sa carrière politique.

"L'heure a sonné", a lancé quelque peu théâtral Guillaume Soro avant de prononcer un court discours devant les 245 députés présents pour la session extraordinaire de l'Assemblée.

Quelques instants plus tard, il annonçait: "A cet instant précis, je rends ma démission (...) Refuser de démissionner conduirait à une crise institutionnelle. On ne peut risquer de mettre en péril la paix fragile (...) pour conserver un poste"

Agé de 46 ans et président de l'Assemblée depuis 2013, Soro, qui a été ovationné par une grande partie des députés après son discours, a été poussé à la démission par le président Ouattara, après avoir refusé de participer à la mutation fin janvier de la coalition au pouvoir, le Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (RHDP), en un grand parti unifié.

Pour le député RHDP Abdoulaye Ben Meite, il s'agit d'avoir un élu de ce parti majoritaire pour présider cette même Assemblée, mais, selon la plupart des observateurs, il s'agit d'une sanction après une tentative de faire rentrer Soro dans le rang avant la présidentielle de 2020.

Désormais en froid, Soro et Ouattara ont longtemps étaient alliés. Chef de la rébellion qui a contrôlé la moitié nord de la Côte d'Ivoire, pendant la présidence de Laurent Gbagbo, Soro s'était rangé derrière Ouattara, lui apportant un soutien décisif pendant la meurtrière crise post-électorale de 2010-11.

Ouattara, Bédié et Gabgbo...

Il avait ensuite été le premier Premier ministre de Ouattara. Toutefois, depuis des mois, les relations se sont tendues au point d'arriver à ce point de non retour. Les observateurs ont vu dans les ennuis judiciaires de plusieurs proches de M. Soro (arrestation en 2017 de Souleymane Kamaraté Koné, dit "Soul to Soul", chef du protocole du président de l'Assemblée, condamnation à un an de prison du député Alain Lobognon en janvier) une mise sous pression de Soro.

Les grandes manoeuvres en vue de la présidentielle de 2020 ont donc bel et bien commencé.

En créant son parti unifié, le président Ouattara, 77 ans, élu en 2010 et réélu en 2015, continue à laisser planer le doute sur ses intentions pour 2020, d'autant qu'aucun candidat de poids ne semble émerger dans son camp et qu'il s'est également brouillé avec le Parti démocratique de Côte d'Ivoire (PDCI) de l'ex-président Henri Konan Bédié (1993-99), qui a claqué la porte du RHDP en août.

Bédié, qui aura 86 ans en 2020, se pose en rassembleur de l'opposition proposant une plateforme à laquelle il a invité à participer... Guillaume Soro mais aussi les partisans de l'ancien président Gbagbo, acquitté en première instance par la Cour pénale internationale et à qui l'on prête aussi des ambitions en 2020 si la procédure de la CPI est terminée.

"Ce parti unifié (RHDP) nous fait reculer de 25 ans avec un parti unique, une pensée unique. Ses convictions ne l'autorisaient pas à rester", a estimé le député pro-Soro Tefhour Koné.

"Je demeure serein tout en quittant ce poste aisé pour l'aventure de mes convictions. Je préfère descendre de mon piédestal, vivre et partager le quotidien de mes semblables, citoyens ordinaires", a conclu Soro, qui a voulu faire de sa sortie un symbole: il a quitté l'institution en conduisant une petite voiture personnelle. Son collègue Soro Kanigui espère le voir rouler prochainement en berline présidentielle, assurant "l'encourager çà faire acte de candidature en 2020 pour que nous construisions un nouveau pays".

Par Le360 Afrique (avec AFP)
Le 08/02/2019 à 17h35, mis à jour le 08/02/2019 à 17h37