Côte d’Ivoire: retour de la semaine de 5 jours, polémique et menace sur la rentrée des classes

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Le 14/09/2016 à 15h56

Le retour de la semaine de 5 jours dans le cycle primaire n’est pas du goût d’une partie des enseignants ivoiriens. Et la tension est déjà palpable alors que s’est ouverte la rentrée des classes.

Alors que la ministre de l’Education nationale, Kandia Camara, devait effectuer une visite au groupe scolaire Aghien ce mardi pour marquer la rentrée des classes, ce sont plutôt des membres du MIDD, le principal mouvement syndical des instituteurs, qui ont délogé et les enseignants et les élèves des classes.

Cette saute d’humeur a pour origine la semaine de 5 jours annoncée pour cette rentrée scolaire comme faisant partie des réformes destinées à améliorer le rendement du système éducatif ivoirien. En effet, outre la journée pleine (matinée et après-midi) du lundi, mardi, jeudi et vendredi, les élèves ivoiriens auront désormais cours la matinée du mercredi. Une disposition qui avait eu cours jusqu’au début des années 1990 avant d’être supprimée.

«A l’époque, jusqu’en 1990, les élèves du primaires et du secondaires allaient en classe toute la semaine sauf dimanches. Les cours avaient lieu les matin et soir à l’exception des mercredi et samedi où c’était la demi-journée», se rappelle Roger Tanoh, instituteur à la retraite. «Plusieurs raisons avaient été avancées pour expliquer la suppression de ces deux jours. Vous savez qu’une partie importante vivait en milieu rural et les parents qui avaient besoins de leurs enfants pour les activités champêtres n’étaient pas toujours disposés à les envoyer à l’école. Il s’agissait donc d’un geste pour encourager et faciliter la scolarisation en milieu rural» explique-t-il.

Mais le retour à cette disposition divise tutelle, enseignants et parents d’élèves. «La semaine à 5 jours est par exemple en vigueur au Burkina Faso et au Cameroun et des études ont montré que nos élèves ne disposent que de 20 minutes de cours de mathématiques par semaine (…). Leur niveau, aussi bien en mathématiques qu’en français, a baissé comparativement à ces pays», argumente la ministre Kandia Camara, en charge de l’Education nationale.

«Les cours démarrent à 7h30 pour s’achever à 17h30. Nous avons des journées pleines et pénibles et ne disposons pas de temps pour nous-mêmes puisqu’il faut une fois à la maison corriger les devoirs. En plus, le mercredi est le seul jour ouvrable qu’il nous reste pour effectuer des courses administratives notamment», a rétorqué dans la presse Mesmin Komoé, premier responsable du MIDD.

Au ministère, l’on marque son étonnement devant ce «revirement». «La mesure a fait l’objet de larges consultations avec les syndicats d’enseignants, les parents d’élèves et l’ensemble de la communauté éducative», soutient la ministre, Mme Camara.

Au niveau des parents d’élèves, l’on évoque tantôt une semaine qui ne laissera pas de pause aux enfants s’inquiétant même de surmenage, tantôt l’on salue la décision qui va donner plus de place au travail dans une société ivoirienne abonnée aux loisirs. « Les enseignants font pourtant venir les enfants tous les mercredis matins pour leurs donner des cours privés payants » s’agace Mathurin Kéké, un parent d’élève. «Ils ont encore la possibilité de changer de métier», poursuit-il.

«Les gens ont gardé cette habitudes de semaine à 4 jours. Notre métier est un sacerdoce. Nous l’avons intégré par amour pour l’enseignement mais aujourd’hui avec les jeunes gens, on cherche juste de quoi s’occuper pour avoir un salaire», regrette Roger Tanoh.

Du côté du ministère de l’Education nationale, même si sur l’ensemble du territoire les classes ont ouvert, l’on apprend que des pourparlers ont été engagés avec les responsables du mouvement syndical pour préserver le calme durant cette rentrée. Pour autant, l’on ne compte nullement faire marche arrière.

Pour rappel, cette année va voir nombre l’introduction de nombres d’innovations. Par exemple, le quantum horaire annuel des enseignements est passé de 25 semaines à 31 semaines de cours et désormais et «90% du temps est désormais consacré aux apprentissages fondamentaux que sont le français, les mathématiques et les sciences», a indiqué la ministre Kandia Camara.

Par Georges Moihet (Abidjan, correspondance)
Le 14/09/2016 à 15h56