Tout est parti de l’échec de la qualification des éléphants au stade Félix-Houphouët-Boigny d’Abidjan. Signe annonciateur? Sidy Diallo, le président de la FIF, d’ordinaire si réservé, avait failli en venir aux mains avec le président de la Fédération marocaine de football.
Quelques semaines après la douche froide des Lions de l’Atlas au stade Félix Houphouët-Boigny, l’ex président de la FIF, Jacques Anoma, dans une interview à la télévision ivoirienne, taclait violemment son successeur à la tête de l’instance fédérale. Il accusait Sidy Diallo d’avoir fait écrouler tout l’édifice qui faisait la fierté du football ivoirien. Jacques Anoma qui a, à son crédit, d’avoir qualifié pour la première fois les Eléphants au mondial, en 2006, en Allemagne, n’a cessé de se lamenter de cette sortie du plus important rendez-vous sportif mondial que le pays n’avait plus raté depuis.
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De cette attaque, s’en est suivie une autre qui couvait depuis longtemps. Le 29 décembre 2017, des présidents et groupements de Club, sous l’appellation G42 font une sortie pour décrier la gestion du foot ivoirien et des détournements de fonds à la FIF avant d’exiger une assemblée générale extraordinaire (AGO) en vue de démettre les dirigeants de l’instance fédérale.
Sauf que, alors qu’ayant atteint le quorum pour organiser l’AGO en vue de démettre le comité exécutif, à quelques jours de la date fixée début janvier, des présidents de club annoncent comme par enchantement leurs retraits du groupement. Des défections dont vont se délecter les dirigeants de la FIF. Le G42, désormais dénommé GX, va continuer de réclamer l’AGO faisant planer une menace sur le championnat.
Après cet échec, la FIFA se saisit de l’affaire, début février, et convoque les parties à une table-ronde à son siège de Zurich avec l’objectif de trouver un compromis le 20 mars. Mais l’instance fédérale ne parvient pas à trouver un point d’accord et appelle au respect des textes de la FIF. Une autre victoire du comité exécutif? Pas pour autant. Les frondeurs avaient en effet a pris soin de convoyer à Zurich tout une documentation pour étayer leurs accusations de mauvaise gestion et de détournement de fonds. Et dans son communiqué final, la FIFA indiquait se donner du temps pour étudier le dossier afin de se prononcer sur les suites à donner à ces accusations.
L’audit de la discorde
De retour de Zurich, les dirigeants de la FIF avaient plutôt crié victoire, faisant fi de la perspective d’un audit financier de la FIFA à la demande des frondeurs. Chose qui va finalement arriver en début de mois.
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En début de semaine, ce 15 mai, des auditeurs du cabinet PriceWaterHouse arrivent au siège de la FIF pour entamer leur travail. Sauf que pour les dirigeants de la FIF, l’audit ne devrait porter que sur les fonds liés à un Programme dit «FIFA Forward». Des fonds pour lesquels ces derniers assurent n’avoir perçu aucun pécule, au point de refuser de fournir des documents aux auditeurs. Pour la FIFA, il s’agit ni plus ni moins que d’un refus de l’instance du foot ivoirien. En conséquence, elle décidait le lendemain 16 mai de suspendre tout décaissement en direction de la FIF.
Un complot?
Ce vendredi, dans une note adressée au Tribunal arbitrale du sport, l’instance judiciaire de la FIFA, les dirigeants du foot ivoirien dénonce un acharnement. «Ces trois dernières années, la FIF a fait le constat qu’elle est l’objet d’un acharnement de la part de l’instance internationale du football, la FIFA. Elle en veut pour preuve plusieurs audits successifs et rapprochés dont les derniers sont ceux des mois de avril et mai 2018» dénonce l’instance fédérale ivoirienne.
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Une adresse qui vient renforcer l’idée d’un complot ourdi contre la FIF depuis Zurich, véhiculée par la FIF et une partie de la presse ivoirienne. Il faut en effet se référer aux récents bouleversements dans le football international pour tenter de comprendre la susceptibilité de la fédération ivoirienne.
En effet, les changements intervenus successivement à la tête de la FIFA et de la CAF ne sont pas faits pour assurer une certaine sérénité aux dirigeants de la FIF. Sidy Diallo fut en effet l’un des fervents soutiens de Issa Hayatou, l’ex-dirigeant de la CAF et baron de la FIFA. Et le fait que le nouveau patron de la CAF, le Malgache Ahmad Ahmad, soit considéré comme un proche de Jacques Anoma, (soupçonné de vouloir reprendre en main la FIF) semble éveiller des craintes du côté de la «maison de verre» (nom donné au siège de la FIF).
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Pis, Jacques Anoma, qui avait été candidat à la présidence de la CAF contre Hayatou avait, par la suite, perdu son poste de membre de comité exécutif de la CAF. Mais, dernièrement en décembre, il a été nommé Médiateur des présidents de la FIFA et de la CAF. De fait, il avait été désigné pour conduire la mission de médiation entre les parties ivoiriennes avant de se retirer suite à l’opposition de la FIF qui l’accuse de connivence avec les frondeurs.
Complot ou pas, la question reste de savoir jusqu’où ira ce bras de fer dans un air de décadence du football ivoirien. Après le départ de Yaya Touré, le dernier de la génération d’or, les Eléphants ne sont plus que l’ombre d’eux-mêmes et, quasiment, plus aucun Ivoirien ne règne sur les stades européens. Nous sommes vraiment à la fin d’une époque.