Guinée. Manifestations de l'opposition: 4 manifestants et un gendarme tués

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Le 15/10/2019 à 07h16, mis à jour le 15/10/2019 à 20h07

Au moins quatre jeunes manifestants et un gendarme ont été tués lundi en Guinée dans des heurts entre les forces de sécurité massivement déployées dans la capitale Conakry et des milliers d’opposants à un troisième mandat de l’actuel président Alpha Condé, ont indiqué des proches et le gouvernement.

Cette journée de mobilisation à l’appel d’un collectif farouchement opposé à une révision de la Constitution qui servirait les desseins prêtés à M. Condé s’annonçait à hauts risques dans un pays en pleine crise politique où les manifestations donnent régulièrement lieu à des effusions de sang.

Les craintes se sont confirmées, nourrissant l’inquiétude dans l‘éventualité où Condé, 81 ans, confirmerait son intention de briguer un troisième mandat fin 2020.

Quatre jeunes sont morts sous les balles tirées par les forces de l’ordre dans la capitale, ont rapporté un médecin et des proches. Le gouvernement a pour sa part fait état d’un gendarme tué par balle dans la ville de Mamou, à l’est de Conakry, et d’un habitant tué dans la capitale dans des circonstances qui “restent à élucider”.

Selon son père Tély Oury Bah, l’un des manifestants tués, Mamadou Lamarana Bah, “a été froidement abattu par un agent de la force publique, armé par l’Etat guinéen”.

“Je ne peux même pas aller voir le corps à la morgue de l’hôpital puisqu’il n’y a pas de passage, les routes sont bloquées”, s’est ému le père.

La quasi-totalité des quartiers périphériques de Conakry a été la proie d’affrontements entre petits groupes éclatés dressant des barricades, incendiant des pneus, lançant des pierres, et des centaines de policiers et gendarmes répliquant par des tirs de gaz lacrymogène et de grenades assourdissantes, mais aussi à balle réelle, a rapporté un correspondant de l’AFP.

Le centre, siège de la présidence, des ministères et des ambassades, placé sous protection, présentait un air de ville fantôme avec ses magasins fermés.

Le gouvernement a déclaré que la mobilisation était illégale faute de déclaration préalable. Il avait prévenu qu’il ne céderait “pas le moindre centimètre carré au règne de l’anarchie”.

“Quelques échauffourées”

L’opposition a justifié l’absence d’une telle déclaration par l’existence depuis juillet 2018 d’une interdiction officieuse de toute protestation des adversaires du gouvernement.

Les activités étaient paralysées dans plusieurs autres villes où les écoles ont renvoyé les élèves chez eux, ont indiqué des habitants et des journalistes sur place.

Le ministre de l’Intérieur, le général Bouréma Condé, a indiqué que la mobilisation s‘était limitée à “quelques regroupements et échauffourées”, marqués par des “actes d’incivisme (…) mettant en péril la vie de nos concitoyens”.

Plusieurs personnes ont été arrêtées, “les forces de l’ordre maîtrisent globalement la situation et le calme règne sur la majorité du pays”, a-t-il dit dans un communiqué.

La tension n’a cessé de monter depuis l’appel à la manifestation lancé il y a une semaine par le Front national pour la défense de la Constitution (FNDC). Cette coalition rassemblant des partis d’opposition, des syndicats et des membres de la société civile s’oppose résolument à une révision de la Constitution évoquée par le pouvoir.

Elle permettrait à Alpha Condé de se présenter pour un troisième mandat, alors que la Constitution en limite actuellement le nombre à deux. L’opposition s’attend à ce qu’il officialise bientôt la tenue d’un référendum constitutionnel. Fin septembre, il avait demandé aux Guinéens de s’y “préparer”.

L’opposition dénonce un projet de coup d’Etat institutionnel et la dérive “dictatoriale” de celui qui fut lui-même un opposant historique ayant connu la prison pour son engagement contre différents régimes autoritaires, avant de devenir le premier président démocratiquement élu de cette ex-colonie française d’Afrique de l’Ouest.

Au moins une vingtaine d’opposants ont été arrêtés depuis samedi, selon le FNDC.

Policiers et gendarmes ont bouclé lundi les abords des domiciles du chef de l’opposition et président de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG), Cellou Dalein Diallo, et du président de l’Union des forces républicaines (UFR), Sidya Touré. “Je demande aux Guinéens de continuer à manifester, et à bloquer les voies jusqu‘à ce que ce pouvoir comprenne qu’on ne nous imposera pas une dictature par la force”, a promis Sidya Touré, joint au téléphone par l’AFP

Par Le360 Afrique (avec AFP)
Le 15/10/2019 à 07h16, mis à jour le 15/10/2019 à 20h07