Le gouvernement et Human rights watch divergent sur les telecoms

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Le 11/02/2016 à 13h22

Le gouvernement guinéen dit avoir décidé d’une nouvelle politique visant à vérifier le trafic voix et data des opérateurs afin d’avoir une idée nette sur leurs assiettes fiscales. A Human Rights Watch, la décision est perçue comme une menace pour la protection des données personnelles.

Le ministre guinéen des Postes, Télécommunications et de l’Economie numérique, Moustapha Mamy Diaby, a réaffirmé par écrit, la détermination de l’Etat guinéen à protéger l’identité et le contenu des données personnelles dans le secteur de la téléphonie.Ce courrier, destiné à l’ONG internationale Human Rights Watch, est daté du vendredi 5 février. Il faisait suite à une première correspondance adressée au Premier ministre guinéen Mamady Youla, le jeudi 4 février, dans laquelle HRW soulève la problématique liée à la protection de la confidentialité des données personnelles dans le secteur des télécommunications.L’Autorité de Régulation des Postes et Télécommunications (ARPT) a adressé des courriers aux opérateurs relatifs à la mise en place d’un centre de contrôle et de suivi du trafic voix et data.L’ONG de défense des droits humains demande au gouvernement de s’assurer que l’ARPT protège effectivement la vie privée et les autres droits de manière adéquate.«Cette démarche pourrait permettre au régulateur de surveiller l’intégralité du trafic voix et données et, en cas d’utilisation abusive, procurer à l’opérateur, au régulateur et éventuellement à d’autres départements gouvernementaux un accès détourné aux fichiers d’appels des clients», souligne la correspondance signée de Cynthia Wong, Chercheuse senior sur l’Internet et les droits humains à Human Rights Watch, et de Corinne Dufka, Directrice de recherches sur l’Afrique de l’Ouest au sein du même organisme.Pour HRW, dans l’intérêt du respect de la vie privée et d’autres droits, le gouvernement doit intimer à l’autorité de régulation l’ordre de «supprimer toute information sensible relative aux clients». Elle propose aussi d’adopter des mesures de protection pour interdire que les données collectées à des fins d’application des réglementations relatives aux télécommunications soient partagées avec d’autres agences gouvernementales ou tierces.Selon sa lettre-réponse le gouvernement reconnait effectivement avoir engagé une opération de contrôle. Mais une démarche qui est censée éliminer les contradictions au niveau des différentes assiettes fiscales et les suspicions de surfacturation aux clients dans le cadre de la protection des consommateurs.«Avec la généralisation de la fraude (sur les appels et le système de facturation aux consommateurs), et dans le souci de la mobilisation des recettes de l'Etat (Impôts et autres taxes), il est prévu une vérification systématique des flux de trafic et du respect des tarifs appliqués aux clients au niveau des opérateurs de télécommunications en Guinée», annonce le ministre des Postes et Télécommunication Moustapha Mamy Diaby.D’après lui le contrôle n’est nullement une «intrusion» dans les données à caractère personnel des usagers du téléphone et de l'Internet. Il vise simplement à «éradiquer» la fraude dans un secteur où un des opérateurs de téléphonie semble opposé à toute mesure de transparence.«On ne peut pas vouloir faire des affaires dans un pays et se soustraire des contraintes règlementaires et fiscales. La loi sur les Télécommunications et les technologies de l'information et de la communication impose à tous les opérateurs de tenir une comptabilité analytique pour permettre une meilleure appréciation de leurs activités», rappelle le ministre, sans nommer l’opérateur soupçonné de fraudes.

Par Ougna Elie Camara (Conakry, correspondance)
Le 11/02/2016 à 13h22