Mauritanie-France: des relations de plus en plus difficiles

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Le 16/01/2017 à 08h43, mis à jour le 16/01/2017 à 11h34

Les relations entre la Mauritanie et la France ne semblent pas être au beau fixe. Plusieurs signaux le démontrent. La polémique entre le commandement de la force française au Sahel (Barkhane) et l’état-major mauritanien par exemple montre que le courant ne passe plus très bien entre les deux pays.

Nourrie par des efforts communs dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, la parfaite entente dans les relations entre Paris et Nouakchott, constatée au début du règne du président Mohamed Ould Abdel Aziz, semble céder progressivement le pas à des rapports marqués par la méfiance et l’incompréhension.

Ce constat, établi par plusieurs observateurs à l’intérieur et à l’extérieur de la Mauritanie, est illustré par plusieurs signaux diplomatiques et sécuritaires relevés au cours des derniers jours, qui viennent confirmer une certaine grisaille dans les relations entre les deux pays depuis près de 2 ans.

Présents tous les deux à Bamako ce week-end, dans le cadre du sommet France-Afrique, organisé sur les thèmes dominants du «Partenariat, de la paix et de l’émergence», les présidents François Hollande et Mohamed Ould Abdel Aziz n’ont pas eu de rencontre en tête-à-tête. «C’est le signe que le courant ne passe pas bien actuellement entre Paris et Nouakchott» relève un analyste.

La force «Barkhane» apporte son assistance militaire aux unités spéciales mauritaniennes

Par ailleurs, au moment du sommet dans la capitale malienne, une vive polémique se développait entre le commandement de l’opération «Barkhane», dédiée à la lutte contre le terrorisme au Sahel, et l’état-major de l’armée mauritanienne.

Livrant un bilan des activités de cette opération pour l’année 2016, le colonel Patrick Steiger, porte-parole de l’opération française, déclarait jeudi dernier devant la presse que «les troupes ont effectué 125 opérations sur les cinq (5) pays du Sahel (Mauritanie, Mali, Niger, Tchad et Burkina Faso), dans lesquelles elles opèrent seules ou en partenariat avec les forces locales».

Ces pays représentent le Group 5 du Sahel, considérés comme la ligne de front de la lutte contre le terrorisme.

Cette information du responsable de «Barkhane» est aussi formellement démentie par un communiqué de l’état-major général de l’armée mauritanienne. Un document qui réfute toute opération organisée sur le territoire mauritanien avec un ton loin d’être diplomatique. «Cette déclaration étonne à plus d’un titre (...), aucune intervention d’une armée étrangère n’a jamais eu lieu en Mauritanie depuis très longtemps, encore moins en 2016».

Mauritanie: visite du commandant en chef de «Barkhane»

Cependant «dans le cadre de la lutte contre l’insécurité et le crime organisé, la Mauritanie entretient d’excellentes relations de partenariat avec l’ensemble des pays frères et amis, notamment des pays du G5 Sahel, les Etats-Unis et la France», précise le communiqué.

Autre ombre au tableau, les éléments d’un contingent français chargés de former des soldats mauritaniens d’élite aux techniques de lutte contre le terrorisme, longtemps présents à Atar (Nord), ont plié bagages il y a quelques mois.

C’est dire qu’il est loin le temps où une opération commune entre militaires français et mauritaniens tentait de libérer des otages au nord Mali.

L’image de la Mauritanie «pion important» dans le dispositif de lutte contre le terrorisme au Sahel semble avoir pris quelques rides aux yeux des responsables sécuritaires de l’ancienne puissance coloniale.

Quelques explications sont avancées concernant cette nouvelle donne dans les relations entre les 2 pays, sans épuiser toutes les pistes possibles sur l’origine du malaise.

Nouakchott n’a pas reçu des membres du gouvernement français depuis 2 ans, alors que pendant la même période, on note un ballet incessant des ministres français au Sahel.

Le G5 Sahel compte implanter un Centre d’alerte précoce à Nouakchott

Nouakchott se sentirait également quelque peu frustrée par le renforcement des relations entre Paris et Rabat, d’un côté, et Paris et Dakar, de l’autre, pendant que les rapports avec la Mauritanie évoluent en dents de scie.

Pire, les officiels de Paris n’hésitent pas à ouvrir les portes des cercles officiels à des opposants irréductibles au régime de Nouakchott. Dernière en date, la réception du leader de l’Initiative du mouvement de résurgence abolitionniste (IRA), mouvement anti-esclavagiste mauritanien dirigé par Birame ould Abeid, l’un des opposants au régime, à l’Elysée, avait suscité une réprobation des autorités de Nouakchott. Un événement suivi rapidement par le dépôt de plaintes contre des officiers mauritaniens accusés d'avoir torturé certains militants de l’IRA.

Par Cheikh Sidya (Nouakchott, correspondance)
Le 16/01/2017 à 08h43, mis à jour le 16/01/2017 à 11h34