Des propos d’une extrême gravité sur l’unité nationale, tenus dans un cadre restreint, prêtés au Premier ministre mauritanien, Yahya Ould Hademine, et fuités par la presse, défraient actuellement la chronique à Nouakchott.
Un discours dont il est difficile de croire qu’il sort de la bouche du Premier ministre d’une République qui se réclame de la démocratie pluraliste.
Rapportant des propos tenus par le chef du gouvernement dans une réunion restreinte de cabinet, le site d’informations en ligne «Al Akhbar», largement relayé par d’autres organes, écrit: «l’Etat aurait délibéremment délaissé la zone de la vallée du fleuve Sénégal» dans le cadre des programmes de développement en dépit de son énorme potentiel économique et de l’évident intérêt à la développer.
Plus explicite, il souligne, d'après le site d'information, «nous avons pris le soin de ne pas installer le débarcadère de NDiago (localité située à une quinzaine de kilomètres de la ville sénégalaise de Saint-Louis) et le canal de Lemseidi, malgré les avantages économiques considérables que ces ouvrages auraient procurés».
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Et pour ce qui est des raisons de ce désintérêt, le Premier ministre a été on ne peut plus clair. «L'option stratégique de l’Etat est claire. Elle consiste à ne pas développer les zones de la vallée du fleuve Sénégal. Car, il est probable que dans l’avenir cette partie de la Mauritanie devienne une terre exclusive des noirs et pourrait être arrachée par ces derniers. La question des noirs est le plus grand défi auquel fait face l’Etat mauritanien».
Si certains mauritaniens pensent que le Premier ministre n'a fait que pointer du doigt la réalité, citant notamment la non exploitatin des richesses de la vallée comme les importantes réserves de phosphates et l'aggravation des clivages raciaux sans que l'Etat n'essaye d'y apporter des solutions concrètes, beaucoup d'autres préfèrent ne pas croire à de telles grossièreté de la part du Premier ministre.
Ainsi, invité à réagir par rapport aux propos attribués au Premier ministre, Moussa Ould Hamed, ancien directeur général de l’Agence gouvernemental d’informations (AMI), et directeur de publication de l'hebdomadaire "Biladi", estime «qu’un chef de gouvernement ne doit pas tenir un tel discours dans une réunion de cabinet. A la limite, on aurait donné un peu de crédit à l’affaire dans le contexte d’une rencontre familiale ou tribale».
Réaction identique chez Samba Thiam, président des Forces progressistes pour le changement (FPC, anciennes Forces de libération africaines de Mauritanie). «Certes, on voit et entend n'importe quoi actuelement dans notre pays, mais je ne pense pas qu’un responsable gouvernemental puisse tomber aussi bas dans le discours».