La Mauritanie est en campagne pour le très controversé référendum constitutionnel prévu pour le 5 août prochain, depuis vendredi dernier.
La Commission électorale nationale indépendante (CENI), arbitre du processus de consultation des populations, a appelé à la «neutralité» de l’administration, et à un traitement «équitable» de toutes les parties, par les médias du service public et les médias privés.
Un appel finalement sans effet et tombé dans un vide sidéral au vu de la configuration des rapports des forces politiques qui répartissent en deux camps.
D'un côté, le pouvoir et quelques partis de l’opposition dite modérée, ayant pris part à un dialogue organisé du 29 septembre au 20 octobre 2016, qui appellent à voter «oui».
De l'autre, une vaste coalition de l’opposition, abusivement qualifiée de «radicale», qui a opté pour un boycott actif et lancé un mot d’ordre pour une journée «pays mort» à la date du scrutin du 5 août.
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C’est dans ce contexte que la Haute autorité de la presse et de l’audiovisuel (HAPA), gendarme des médias, a décidé que seules les forces politiques favorables au «oui» ou prônant le «non» dans le cadre du référendum, auront à un temps d’antenne pour la campagne.
Ce qui d’office, exclut la quasi-totalité de la mouvance issue de l’opposition historique à l’image du Rassemblement des forces démocratiques (RFD), de l’Union des forces de progrès (UFP), des islamistes du Rassemblement national pour la réforme et le développement (RNRD, Tawassoul, etc.).
Un responsable de cette mouvance estime que «mettre même un ”non” dans l’urne c’est voter avec les poissons, car ils sont maîtres des urnes, alors boycottons activement».
Résultat des courses, une seule formation d'opposition, la Convergence démocratique nationale (CDN), un parti dirigé par maître Mahfoudh Ould Bettah, ex-ministre de la Justice et ancien bâtonnier de l’Ordre national des avocats (ONA), qui est membre du Forum national pour la démocratie et l’unité (FNDU), a opté pour une participation à travers un vote négatif et bénéficie d'un temps d’antenne dans les médias de service public.
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En réalité, parler «de médias de service public» relève d’un véritable abus de langage dans le cas de la Mauritanie, notent de nombreux observateurs.
Car, on est en face d’organes de l’Etat, totalement instrumentalisés par la propagande du prince et relayant ses messages en violation du principe même de service public, même si le temps d’une éphémère campagne, ils offrent une petite lucarne aux contradicteurs.
Ce référendum, sur la base de l’article 38 de la Constitution du 20 juillet 1991, une disposition controversée, porte sur la suppression du Sénat, la création de conseils régionaux, la modification des symboles nationaux (drapeau et hymne) et la suppression d’un certain nombre d’institutions.
Le camp du boycott, qui soupçonne «un coup fourré contre le principe» de l’alternance et de la limitation des mandats du président de la République, rappelle que la procédure de révision constitutionnelle est réglée par le chapitre 11 de la loi fondamentale, notamment les articles 99, 100 et 101, exigeant une approbation par une majorité qualifiée au niveau du Parlement.