Mauritanie: l'opposition décide de boycotter le référendum de Ould Abdel Aziz

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Le 04/07/2017 à 17h17, mis à jour le 04/07/2017 à 17h34

L'opposition mauritanienne a décidé le boycott du référendum constitutionnel prévu le 05 août prochain, après plusieurs semaines de tergiversations. Elle ouvre ainsi un boulevard au président Mohamed Ould Abdel Aziz et ses réformes qui vont toucher les symboles de l'Etat mauritanien.

L’opposition mauritanienne regroupant plusieurs partis et organisations, a décidé d’appeler au boycott du référendum pour l’approbation d’un projet de révision constitutionnelle prévu le 05 août prochain.

Cette position a été officiellement annoncée par les responsables de la mouvance à l’issue d’une conférence de presse organisée mardi en début d’après-midi.

Ce vaste rassemblement est composé du Forum national pour la démocratie et l’unité (FNDU, partis politiques, organisations de la société civile, centrales syndicales et personnalités indépendantes), le Rassemblement des forces démocratiques (RFD, principal parti de l'opposition), l’Union nationale pour une alternance démocratique (UNAD), l’Initiative de résurgence du mouvement abolitionniste (IRA), l’Alliance pour la justice et la démocratie/ Mouvement pour la réconciliation (AJD/MR), les Forces progressistes pour le changement (FPC-ex FLAM), le parti SAWAB, Touches pas à ma Constitution, ….

La décision de boycott est l’épilogue d’un débat très vif et d’une bataille d’idées, entre partisans du boycott, à l’image de l’Union des forces de progrès (UFP), le Rassemblement des forces démocratiques (RFD)..., et les adeptes d’une participation pour un vote rejet, tels le que Pacte national pour la démocratie et le développement (PNDD-ADIL, ex formation au pouvoir en 2007 et 2008).

La position du RFD et de l’UFP, estimant qu’il ne sert strictement à rien de participer «à un vote sans garantie, ni transparence, à l’issue duquel le pouvoir proclamera les résultats qui lui conviennent, quel que soit le véritable verdict des urnes», a fini par prévaloir.

Seule la Convergence démocratique nationale (CDN), un parti dirigé par maître Mahfoudh Ould Bettah, ancien bâtonnier de l’Ordre national des avocats (ONA) et ex-ministre de la Justice sous la transition du défunt colonel Ely Ould Mohamed Vall (2005/2007), a décidé de participer dans l’objectif de faire triompher le non.

L’opposition annonce son boycott au moment où le gouvernement mobilise son énergie et toutes ses forces pour pousser les mauritaniens à s’inscrire sur les listes électorales.

Une mobilisation de l’appareil d’Etat qui fait suite à un constat de désaffection des populations qui ne bousculent pas devant les bureaux de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), dans le cadre d’un recensement administratif à vocation électorale complémentaire malgré plusieurs reports de la date de clôture.

Ce référendum, organisé sur la base de l'article 38 de la constitution dont l’usage est controversé, vise la suppression du sénat, la création de conseils régionaux, le changement des symboles nationaux (drapeau et hymne),….

En Mauritanie, la procédure de révision constitutionnelle est encadrée par le chapitre 11 de la constitution du 20 juillet 1991 et ses textes modificatifs, notamment les articles 99,100 et 101.

Les contestataires du recours à l’article 38, décidé par le président Mohamed Ould Abdel Aziz, après le rejet du projet de révision par le sénat, le 17 mars dernier, estiment que la démarche du pouvoir aura pour conséquence de mettre la constitution «dans une situation d’insécurité juridique totale».

Ce qui impliquerait la possibilité de faire adopter par voie référendaire directe (sans passer par le verrou du parlement) toute modification de la loi fondamentale, notamment les dispositions protégées (forme républicaine de l’Etat, multipartisme et limitation des mandats du président de la République). Pourtant, celles-ci sont gravées dans le marbre et érigées au rang «de clauses d’éternité» selon le jargon des constitutionnalistes.

Répondant à la question d’un journaliste à l’occasion d’une conférence de presse organisée le 22 mars dernier, le président Mohamed Ould Abdel Aziz affirmait avoir décidé de recourir à l’article 38, après avoir consulté «d’éminents juristes, non affiliés à des chapelles politiques».

Par Cheikh Sidya (Nouakchott, correspondance)
Le 04/07/2017 à 17h17, mis à jour le 04/07/2017 à 17h34