Le pays du million de poètes va vers des élections législatives, régionales et municipales décisives prévues le 1e septembre prochain.
Celles-ci sont caractérisées par «une explosion des ambitions politiques de la part des individus et des petits partis», selon une note du Centre mauritanien d’études et de recherches stratégiques (CMERS), un think-tank proche du pouvoir mauritanien, publiée ce lundi 20 août 2018.
Un constat basé sur les chiffres clefs d’un vote à tiroir, avec cinq scrutins d’un seul coup, impliquant une centaine de partis politiques, 143 listes au niveau des municipales, 67 listes pour les régionales, 96 listes aux législatives et 87 listes de femmes.
Une véritable inflation (en référence à l’histoire électorale du pays) dont l’explication est donnée par la participation de l’opposition dite radicale, qui avait boycotté les législatives et municipales de novembre/décembre 2013, la présence de tous les courants de pensée, notamment les variantes de la mouvance anti-esclavagiste et du courant nationaliste négro africain.
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Signalons cependant que seule l’Union pour la république (UPR) est présente dans toutes les circonscriptions et pour toutes les consultations. Ce qui en principe donne un bonus politique non négligeable. Un avantage à relativiser cependant, du fait d’une autre réalité.
En effet, pour bien des observateurs, la principale cause du phénomène de «l’inflation» des listes en lice pour les élections du 1e septembre 2018, est surtout imputable aux nombreuses frustrations nées des investitures du principal parti de la majorité. Celles-ci sont le fruit d’un choix vertical contesté à la base dans de nombreuses localités.
Ce qui provoque l’inévitable irruption de la donne tribale, massivement présente dans toute bataille politique locale, et même de dimension nationale.
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Le document estime que ces élections vont se dérouler «dans des circonstances sociopolitiques exceptionnelles qui font que leurs résultats directs ou indirects, donneront des indications sur l’orientation que prendra un pays à la croisée de nombreux questionnements relatifs à l’alternance, la nature du contrat social entre les différentes composantes, la place des formations politiques et leur rôle, à moins d’une année d’une élection présidentielle décisive marquée par des supputations relatives à l’identité du dauphin du président en exercice».
Mohamed ould Abdel Aziz achève un deuxième et ultime mandat, du fait d’une disposition constitutionnelle qui ne laisse aucune perspective de révision de la loi fondamentale du point de vue du droit.
Par ailleurs, le document du CMERS ajoute que ces élections coïncident avec «une montée en puissance de la politisation des revendications sociales des catégories de la population ayant subi des injustices historiques, sur fond d’une sourde compétition régionaliste pour le contrôle du pouvoir. Ces deux facteurs nouveaux s’ajoutent au vieil ancrage du tribalisme politique. Un élément qui constitue une menace contre l’exercice citoyen du vote».
Quelle future majorité à l’hémicycle?
La note de l’institution aborde enfin la lancinante question relative à l’identité du futur vainqueur qui disposera de la majorité à l’assemblée nationale.
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Le parti au pouvoir, l’Union Pour la République (UPR) «obtiendra-t-elle une majorité écrasante au vu de l’intérêt accordé au vote par le président Mohamed ould Abdel Aziz? Cet intérêt serait-il lié à une volonté de maintenir une influence active sur la scène politique?».
Pour le CMERS, cette dernière interrogation «soulève la probabilité de l’évolution vers un régime parlementaire, et l’éventualité de faire élire un successeur soutenu par une alliance dominante» dont la locomotive resterait l’UPR. Ou au contraire, la présence de l’opposition dite radicale, notamment le Rassemblement des forces démocratiques (RFD), le Forum national pour la démocratie et l’unité (FNDU) et des islamistes de Tawassoul, permettra-t-elle à cette mouvance, de disposer d’un tiers bloquant à l’assemblée nationale pour s’opposer à toute velléité pouvant conduire vers un changement de régime?
Le Centre mauritanien d’études et de recherches stratégiques (CMERS) est une institution officieuse considérée comme proche du gouvernement, dirigée par Dahane ould Mohamed Mahmoud, un officier à la retraite, qui fût directeur de la marine nationale et membre d’un organe militaire d’exception ayant dirigé la Mauritanie au début des années 1980.