Ce scrutin doit marquer la première transition entre deux présidents élus dans ce vaste pays du Sahel secoué par de nombreux coups d'Etat de 1978 à 2008, date du putsch qui a porté Mohamed Ould Abdel Aziz au pouvoir, avant son élection en 2009. Le président sortant ne pouvait se représenter après deux mandats.
M. Ghazouani s'est déclaré vainqueur à partir des résultats sur 80% des bureaux de vote, au terme d'une veillée électorale dans la nuit de samedi à dimanche en présence de M. Ould Abdel Aziz.
L'opposition, à laquelle appartiennent quatre de ses cinq concurrents, a qualifié cette annonce précoce de "nouveau coup d'Etat" de la part de ces deux anciens généraux, "éternels putchistes" selon elle. Ses candidats crient depuis des mois aux risques de perpétuation d'un régime "militaire" et de fraude.
Dans la soirée, la Commission nationale électorale indépendante (Céni) a confirmé la victoire de M. Ghazouani, qui remporte 52,01% des voix sur l'ensemble des bureaux. Il est suivi par quatre opposants, dont le militant anti-esclavagiste Biram Ould Dah Ould Abeid (18,58%) et l'ancien Premier ministre Sidi Mohamed Ould Boubacar (17,87%).
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Ces résultats doivent encore être transmis pour validation au Conseil constitutionnel après examen d'éventuels recours, alors que les quatre candidats d'opposition ont annoncé qu'ils utiliseraient toutes les voies légales pour les contester.
Les quelque 1,5 million d'électeurs ont voté samedi nombreux - 62,66% de participation, selon la Céni - pour désigner leur président, qui devra préserver la stabilité chèrement conquise par la Mauritanie, mais aussi en assurer le développement économique et y faire progresser le respect des droits humains.
- "Coup d'Etat" électoral -
"Le pouvoir a perdu la bataille électorale", a affirmé Biram Ould Dah Ould Abeid lors d'une conférence de presse conjointe des quatre candidats de l'opposition, qui se sont engagés avant le vote à se soutenir en cas de second tour le 6 juillet.
Sidi Mohamed Ould Boubacar a dénoncé de "multiples irrégularités" qui selon lui "ôtent toute crédibilité" à cette élection. "Nous rejetons les résultats de ce scrutin et nous considérons qu'ils n'expriment nullement la volonté du peuple mauritanien", a-t-il dit, exigeant leur publication par la Céni "bureau par bureau".
M. Ould Abeid a également appelé les Mauritaniens à "résister dans les limites de la loi à ce énième coup d'Etat contre la volonté du peuple".
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Les forces de l'ordre patrouillent Nouakchott pour la présidentielle du 22 juin 2019 en Mauritanie.
Des incidents ont éclaté à la suite des déclarations de M. Ghazouani, en plusieurs endroits de la capitale et à Nouadhibou, (nord-ouest), l'unique province où il ne soit pas arrivé en tête, devancé par M. Ould Abeid.
La police a dispersé les manifestants qui brûlaient des pneus et scandaient des slogans hostiles au pouvoir au moyen de gaz lacrymogènes et de matraques, selon une source de sécurité. Des sources proches de l'opposition ont fait état de blessés.
Le représentant du secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, pour l'Afrique de l'Ouest et le Sahel, Mohamed Ibn Chambas, a félicité les Mauritaniens "pour la tenue paisible de l'élection présidentielle" et réitéré l'appel de M. Guterres "à résoudre tout litige éventuel" par la voie judiciaire.
Une femme vote le 22 juin 2019 à Nouakchott pour la présidentielle en Mauritanie.
M. Ould Abdel Aziz a stabilisé la Mauritanie, frappée dans les années 2000 par des attentats jihadistes et des enlèvements d'étrangers, en menant une politique volontariste: remise sur pied de l'armée, surveillance accrue du territoire et développement des zones reculées.
Mais les critiques se focalisent sur les droits fondamentaux, dans une société marquée par des disparités persistantes entre communautés arabo-berbère, haratine (descendants d'esclaves de maîtres arabo-berbères, dont ils partagent la culture) et afro-mauritanienne, généralement de langue maternelle d'ethnies subsahariennes.
La croissance économique, de 3,6% en 2018, bien qu'en amélioration, reste insuffisante par rapport à la démographie, selon un rapport de la Banque mondiale (BM) publié en mai.
La BM salue le rétablissement de la "stabilité macroéconomique", avec des projections de croissance annuelle de 6,2% en moyenne sur la période 2019-2021 mais appelle à lever les obstacles au secteur privé, en premier lieu les difficultés d'"accès au crédit" et "la corruption".