Alors que près de trois mois se sont écoulés depuis son entrée officielle dans ses fonctions, et qu'il s'apprête au passage symbolique de ses cent jours à la tête du pays, le président mauritanien, Mohamed ould El Cheikh Ghazouani, se trouve face à une image encore confuse de la coalition formant la majorité gouvernementale.
Certes, l’Union Pour République (UPR), principal parti de la majorité durant les 10 ans des deux mandats successifs du président Mohamed ould Abdel Aziz, a proclamé son soutien au candidat pendant la campagne précédent le scrutin présidentiel du 22 juin 2019.
Ce parti est également bien représenté au sein de l’attelage gouvernemental, formé une semaine après la prestation de serment du nouveau président de la République, et reste encore très présente dans les ahutes sphères de l'administration.
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Il y a également d’autres entités, alliées historiques de la formation symbole du pouvoir de Mohamed ould Abdel Aziz, à l’image de l’Union pour la Démocratie et le Progrès (UDP) de Naha mint Mouknass, et quelques formations moins en vue, représentées au sein de la nouvelle équipe gouvernementale.
Pour boucler la boucle, il faut ajouter à ce tableau quelques partis de l’ancienne opposition dite «modérée», telle l’Alliance Populaire Progressiste (APP) du vieux leader Haratin Messaoud ould Boulkheir, non représenté dans un gouvernement dit de «technocrates».
Au sein de cette coalition formant majorité, pourtant encore non organisée, Il y aussi des formations de l’ancienne opposition dite «Radicale» comme le Pacte National pour la Démocratie et le Développement (PNDD-ADIL) du député et ancien premier ministre, Yahya ould Mohamed Waghef, la Convergence Démocratique Nationale (CDN) de l’ancien bâtonnier et ex-ministre de la justice, maître Mahfoudh ould Bettah.
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Cependant, ces différents éléments n’ont pas suffi à écarter un débat sur la nécessité pour le nouveau chef de l’Etat d’avoir une "rampe politique", soit des appuis, lui permettant de mettre en œuvre le programme qu'il avait proposé aux Mauritaniens lors de sa campagne pour la présidentielle.
Mieux encore, plusieurs sources concordantes avancent l’idée d’une concertation élargie des mouvements, organisations et personnalités soutenant le président Mohamed ould Cheikh El Ghaouani, en vue de la création d’un nouveau cadre politique, appelé à évoluer vers la constitution d’une formation.
Dans le même temps, dimanche dernier en soirée, plusieurs hauts cadres issus de différents horizons, notamment de la coalition formant la majorité gouvernementale sous les mandats de Mohamed ould Abdel Aziz, ont annoncé leur adhésion au parti «ISLAH».
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Il s’agit d’une formation politique dont «les objectifs sont parfaitement conformes avec le programme électoral de Mohamed ould Cheikh El Ghazouani sur des axes aussi importants que la réforme du système éducatif, la lutte contre toutes les formes d’injustices et la marginalisation», selon les dires de son président, Ahmed Salem ould Talebna.
Un cadre de la mouvance ajoute «qu’ILSHA» ambitionne d’accompagner le nouveau président sur tous les grands chantiers déclinés pendant la campagne électorale 2019.
Ce débat sur la coalition formnt majorité autour du nouveau chef de l’Etat mauritanien est d'ailleurs parfaitement illustré par ces propos de Bodiel ould Houeid, vice-président de l’Union Pour la République (UPR) et vice-président de l’Assemblée Nationale jusqu’au renouvellement récent des instances de la représentation nationale.
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S’exprimant à travers les colonnes de l’hebdomadaire «Jeune Afrique», cet ancien ministre, sous le régime de Maaouya ould Sid’Ahmed Taya, vieux routier de la scène politique nationale, a montré la voie: «le président Ghazouani n’a que deux choix: travailler avec la majorité actuelle, ou dissoudre l’assemblée nationale pour avoir sa propre majorité».
Ces propos, servis par un acteur averti du landernau politique national, suffisent à expliquer les réelles difficultés d’une grille de lecture des rapports entre Ghazouani et le parti du président sortant.
Pire encore, en dépit de toutes les déclarations d’amour entre les deux protagonistes, de nombreux observateurs considèrent désormais l’Union Pour la République (UPR), comme «une coquille vide, condamnée à disparaître sous sa forme actuelle, et dont les derniers responsables à avoir déserté les lieux s’occupent plus de leur propre survie pour négocier quelques prébendes auprès du nouveau locataire du Palais de la République».