Air Sénégal: la facture est décidément salée pour la jeune compagnie aérienne

Un appareil d'Air Sénégal S.A.

Un appareil d'Air Sénégal S.A.. dr

Le 26/07/2018 à 11h41, mis à jour le 26/07/2018 à 11h48

Le ciel s’assombrit autour d’Air Sénégal après seulement 2 mois d’activité. Avaries sur ses avions, coût de parking et de réparation... Le360 Afrique fait le point sur les sommes qu'a dû débourser la nouvelle compagnie aérienne.

Lancé il y a seulement 2 mois, Air Sénégal semble déjà battre de l’aile. L’un des deux avions dont dispose la nouvelle compagnie aérienne nationale avait le radôme endommagé à la suite d’une collision avec un oiseau. L’autre, touché par les intempéries qui ont précédé les premières pluies de cette année, doit être convoyé dans une base de maintenance européenne. Ces réparations laissent une facture salée à la direction de la compagnie qui maintient le flou sur leur coût.

La direction d’Air Sénégal et le ministère de tutelle adoptent la loi de l’omerta concernant le montant des réparations des deux avions récemment endommagés. Ce silence des autorités sénégalaises n'efface pas les nombreux millions de francs CFA déjà engloutis par le lancement, quelque peu précipité, de la nouvelle compagnie aérienne. On serait tenté de dire que, le jeu en valait la chandelle pour Maïmouna Ndoye Seck, ministre des Transports aériens et du développement des infrastructures aéroportuaires. En effet, la mise en place d’une nouvelle compagnie nationale était un impératif pour réussir à faire de Dakar, un hub aérien régional, un des projets phares du Plan Sénégal émergent, si cher à Macky Sall.

Une facture au montant difficile à évaluer

Air Sénégal SA a repris ses rotations, ce vendredi 20 juillet. La nouvelle compagnie aérienne a pu réparer l’un des deux avions, après 13 jours d’interruption. Néanmoins, les avaries ayant cloué au sol ses deux appareils a rendu plus difficile l’envol d’Air Sénégal SA.

Ce coup d’arrêt inattendu représente une sérieuse tuile. «Seule la compagnie peut dire à combien se chiffre le manque à gagner de cette interruption d’activité. Mais ce qu’il faut dire, c’est qu’avec des billets à 66 000 FCFA pour un ATR-72 d’une capacité maximale de 74 places pour des dessertes 2 fois par jour, on n’a pas besoin de faire de calculs compliqués pour savoir que les pertes sont conséquentes», nous affirme un technicien de l’aviation sous le couvert de l’anonymat.

A supposer que la compagnie affiche complet à chaque vol, pour chacun des deux avions, le manque à gagner quotidien pourrait être évalué à 9.768.000 FCFA (14.690 euros).

«Il peut arriver que des vols soient annulés durant plusieurs jours à cause des sinistres. Mais dans de pareils cas, ce sont les compagnies d’assurances qui prennent en charge les frais», poursuit notre source qui ne nous a pas précisé qui sont les assureurs en question.

Un parking qui coûte cher à Air Sénégal SA

Pour l’acquisition des deux appareils ATR 72-600 d’une capacité de 68 à78 places auprès d’un avionneur franco-italien, l’Etat du Sénégal avait déjà déboursé la somme de 32,25 milliards de francs CFA (50 millions d’euros, prix catalogue). Cette somme était financée par crédit-export auprès de la société française Coface et de son associée italienne, la SACE.

Livrés en novembre 2017, les deux appareils avaient été gardés à l’aérodrome de Toulouse Francazal jusqu’en mai 2018, ce qui signifie six mois de frais de parking venus se greffer à la facture initiale. En effet, si on réfère au guide tarifaire des redevances de Toulouse Francazal, Air Sénégal a dû verser 250 euros (hors taxe) par jour, ce qui représente un total de 87.200 euros (58 millions de francs CFA), avant même de démarrer son activité. 

Autant de frais et de difficultés qui ont rendu quasi impossible la concurrence avec les grandes compagnies africaines et internationales.

Pour le moment, Air Sénégal SA se contente d’assurer deux vols quotidiens Dakar-Ziguinchor, soit 14 liaisons par semaine. Le trajet vers une compagnie nationale, championne sous-régionale, paraît ainsi très long. Toutefois l’espoir est permis.

«Le Sénégal dispose de tous les atouts pour mettre sur pied une compagnie aérienne viable, pérenne et rentable. Nous l’avons démontré avec l’étude de marché Seabury et le groupe d’experts. Le Plan d’affaires élaboré par les experts sénégalais et le cabinet international Seabury prévoyait 7 destinations, 41 fréquences hebdomadaires et un taux d’utilisation quotidien des deux avions de 14 heures», soutient un membre du groupe d’experts qui a participé aux études avant lancement de la nouvelle compagnie sénégalaise.

Par Moustapha Cissé (Dakar, correspondance)
Le 26/07/2018 à 11h41, mis à jour le 26/07/2018 à 11h48