Sénégal. Collision des avions présidentiels français et sénégalais: cela aurait pu être pire

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Le 05/02/2018 à 19h13, mis à jour le 06/02/2018 à 09h28

Emmanuel Macron est finalement rentré en France à bord d'un autre avion que le Falcon 100 qui l'avait amené au Sénégal. L'incident qui a cloué l'avion présidentiel français à Saint-Louis est dû à plusieurs erreurs, mais aussi à un aéroport en deçà des normes de sécurité aérienne. Enquête.

La mésaventure de l'avion présidentiel français n'est toujours pas terminée, deux jours après l'accrochage qui a eu lieu à l'aéroport de Saint-Louis du Sénégal. En effet, lundi 5 février, à l'heure où nous mettons cet article en ligne, le Cotam Unité français est encore entre les mains "des experts des ministères de l'Intérieur et de la Défense français et des techniciens aéronautiques", précise une source à l'aéroport de Saint-Louis. Les premiers doivent déterminer les circonstances dans lesquelles l'accident est survenu, alors que les seconds s'attèlent à réparer l'empennage horizontal, c'est-à-dire le nez, endommagé de l'avion présidentiel, ajoute la même source.

Evidemment, cet incident interroge. Comment les deux avions en sont-ils arrivés à se toucher au point d'endommager le Cotam Unité? D'autant qu'apparemment, ce dernier était en mouvement, alors que l'avion de Macky Sall était à l'arrêt. Or, c'est le nez du Falcon 100 français, donc la partie la plus visible, qui a touché l'aile de l'avion présidentiel sénégalais.

Selon la presse sénégalaise, les personnes impliquées dans cet incident ont chacune donné leur version. Pour l'Agence des aéroports du Sénégal (ADS), c'est la faute du copilote de l'avion présidentiel français, qui guidait la manœuvre de son pilote sans se servir du "placeur", comme l'exige la norme, affirme Papa Maël Diop, le directeur général d'ADS.

"Ce qui s'est passé ce samedi 3 février à 10h57, c'est que le pilote du Falcon, l'avion présidentiel français, a demandé à se déplacer pour éviter le vent fort qui aurait pu le gêner lors de sa mise en route. Malheureusement, lors de sa manœuvre pour faire face au vent du nord, l'empennage horizontal de l'avion français a éraflé le bout de l'aile droite de l'Airbus A319 en stationnement sur le parking", a expliqué le DG d'ADS.

Mais les choses sont beaucoup plus graves que cela. D'après les révélations du quotidien SourceA, le ministère des Transports n'a pas saisi officiellement l'Agence nationale de l'aviation civile et de la météo pour l'instruire des dispositions à prendre pour accueillir des avions présidentiels à l'aéroport de Saint-Louis. Car, faut-il le rappeler, cet aéroport est de niveau 2 et ne reçoit que très peu d'appareils. La dernière liaison internationale régulière date de 2008, quand Air Sénégal exploitait la ligne Paris-Saint-Louis.

Par conséquent, l'arrivée des deux présidents est un évènement plus qu'exceptionnel. Malheureusement, les dispositions ne semblent pas avoir été prises. Ainsi, alors qu'ADS et ANACIM aurait du dépêcher leurs meilleurs hommes à l'aéroport de Saint-Louis pour y sécuriser la visite présidentielle, "rien n'a été fait" de particulier, selon les informateurs cités par SourceA.

Mais ce que SourceA ne dit pas, c'est que même avec les meilleurs hommes, cet incident aurait pu se produire, ou même pire. En effet, l'aéroport de Saint-Louis est sous-équipé, la piste peut même s’avérer dangereuse compte tenu des gravats qui se détachent et de l'absence d'une clôture hermétique autour de l'aéroport. C'est en tout cas ce que révèle le rapport d'une compagnie étrangère qui voulait établir des lignes régulières entre Saint-Louis et des villes européennes. "Notre commandant chef des pilotes s'est rendu à Saint-Louis en juin 2013 pour étudier la faisabilité de l'ouverture d'une route. Ses conclusions ont été sans appel, à cause d'un manque d'équipement et d'une absence de sécurité au niveau de l'aéroport", explique le directeur général de la compagnie à Le360 Afrique.

Parmi les éléments problématiques figurent les petites pierres en béton qui se détachent du tarmac et qui auraient pu endommager les réacteurs des avions. De même, l'absence de clôture sur une partie du pourtour de l'aéroport exposait les appareils à d'éventuelles collisions avec des animaux, d'autant que la zone est connue pour être très fréquentée par les troupeaux. C'est dire que l'accrochage entre les deux avions présidentiels est presque un moindre mal. Le pire aurait pu se produire.

Par Mar Bassine Ndiaye
Le 05/02/2018 à 19h13, mis à jour le 06/02/2018 à 09h28