Sénégal: «The Economist» s’inquiète du recul démocratique du Sénégal sous Macky Sall

Le président Macky Sall.

Le président Macky Sall.. DR

Le 03/07/2018 à 12h05, mis à jour le 03/07/2018 à 12h23

Le quotidien britannique «The Economist» relève des signes de régression démocratique au Sénégal, un pays qui était pourtant cité en exemple.

Après la condamnation de l’Etat du Sénégal par la Cour de justice de la CEDEAO sur l’arrestation et la condamnation du maire de Dakar, Khalifa Sall, c’est au tour d’un magazine britannique de tirer la sonnette d’alarme. Dans un article publié jeudi 28 juin dernier, The Economist est revenu sur les emprisonnements des opposants au régime de Macky Sall, Khalifa Sall et Barthélémy Diaz, l’exil forcé de Karim Wade au Qatar et sur l’assassinat de l’étudiant, Fallou Sène à l’UGB. Et cette succession de regrettables événements témoigne selon lui de la fragilité de la démocratie sénégalaise depuis 2012.

«Pour un visiteur étranger, tout semble marcher au Sénégal. Le nouvel aéroport aux normes internationales. Il y a eu une croissance de 6,8% en 2017. La découverte du pétrole et du gaz augure un avenir meilleur», écrit The Economist. Mais selon l’hebdomadaire anglais, ce tableau reluisant du Sénégal cache mal le recul démocratique dans lequel est plongé ce pays depuis quelques années.

«En regardant de près les graffitis le long des murs de Dakar, la capitale sénégalaise, on se fait une idée de l’instrumentalisation de la justice du pays pour écarter des adversaires politiques de Macky Sall», note le journal.

A l’en croire, il est quasi impossible de passer sous silence les contestations des citoyens sénégalais qui ne cessent de dénoncer ce manque de justice dans le pays. «En mars dernier, Khalifa Sall, maire de Dakar, est condamné à 5 ans de prison pour détournement de deniers publics. Son camarade Barthélémy Dias, qui contestait le verdict, a été condamné à six mois de prison pour outrage à magistrat. Karim Wade, fils de l’ancien président, condamné à 6 ans de prison pour corruption avant de bénéficier d’une grâce présidentielle, a été contraint à l’exil politique au Qatar, de peur qu’il se présente à la présidentielle de 2019.

The Econmist revient aussi sur la très controversée loi sur le parrainage qui a été votée à l’Assemblée nationale, le 19 avril 2018. Rappelons que pour faire passer cette loi, le chef de l’Etat a usé de sa majorité au Parlement, malgré les nombreuses protestations. Elle oblige tout candidat à obtenir entre 0,8 et 1% des signatures des électeurs pour se présenter.

Selon la publication britannique, «la loi sur le parrainage sert aussi à écarter les potentiels adversaires de Macky Sall». La répression répétée des manifestations des étudiants par la gendarmerie qui n’a pas hésité à tirer à balles réelles, causant la mort de Fallou Sène, n’a pas non plus échappé aux critiques du magazine britannique. «Récemment, les manifestations estudiantines ont été réprimées avec la mort d’un étudiant à l’université Gaston Berger de Saint-Louis», souligne-t-il avant de revenir sur la précarité dans laquelle vivent certaines couches de la population sénégalaise.

«Beaucoup de Sénégalais se plaignent de leurs maigres revenus. Selon la Banque mondiale, le PIB par habitant était estimé à 2.566 dollars en 2016. Le taux de chômage est supérieur à 15%. Ces chiffres qui rendent amer le gouvernement du Sénégal pourraient accentuer sa volonté de faire taire les critiques», a conclu l’auteur de l’article.

Par Moustapha Cissé (Dakar, correspondance)
Le 03/07/2018 à 12h05, mis à jour le 03/07/2018 à 12h23