Après le grand bruit qui a accompagné l’installation des Agents de sécurité de proximité (ASP), la plupart d’entre eux ont été affectés dans des services (port, aéroport, administration) pour jouer le rôle de vigiles. Les rares agents qui sont aujourd’hui en contact avec la population sont ceux déployés sur les grands axes routiers, pour réguler la circulation. Là aussi, un grand problème se pose avec des automobilistes qui ne leur reconnaissent aucune autorité.
Des agents qui vont au-delà de leurs prérogatives
Beaucoup les appellent "les policiers de Macky", en référence au Président qui a pris le décret de la création de leur Agence de tutelle. Ce qui montre une certaine appréhension qui rappelle leur manque de légitimité. Par exemple, ils peuvent signaler à un policier une infraction commise sur la route, mais ils n'ont aucune prérogative sur le contrôle des documents. Ils ne peuvent pas non plus dresser des procès-verbaux puisqu'il n'ont pas prêté serment. En somme, ce sont des "sous-agents" et la population ne se gêne pas à le leur rappeler.
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Eparpillés un peu partout au niveau des carrefours, ils ont ainsi besoin de l'aide d’un gendarme ou d’un policier, pour assurer la fluidité du trafic et veiller au respect du Code de la route.
Seulement voià, ils dépassent souvent leurs prérogatives. Avec leur gilet de sécurité polyester fourni par la police, ils oublient qu’ils ne sont ni policiers ni gendarmes, et vont jusqu’à retirer le permis à des chauffeurs. Ces derniers, outrés par ce changement de rôle, se demandent à quoi jouent ces "policiers de Macky". Pourtant, la Première ministre de l’époque, Aminata Touré, avait bien défini le travail des ASP. «Ils ne sont ni des policiers ni des gendarmes. Ce sont des volontaires engagés pour deux ans». Mais aujourd’hui, les paroles de l’ancienne Première ministre semblent être oubliées.
Les automobilistes refusent leur autorité
Ibrahima Faye est un conducteur de taxi. Interpellé sur la présence des agents de sécurité de proximité aux côtés des policiers sur les routes, il reconnaît qu’ils sont en train de faire du bon boulot. N’empêche. Il se demande s’il est normal qu’ils lui réclament son permis de conduire, sa visite technique, son assurance ou sa vignette. Même son de cloche chez un autre chauffeur de taxi qui estime que «ces ASP se moquent de nous. Moi, s’ils me demandent mon permis, je ne leur donne rien. Ils ne sont pas des policiers à ce que je sache».
Par ailleurs, ces écarts répétés des ASP ont conduit à des scènes pour le moins ahurissantes. Un passager d’un taxi raconte avoir été témoin d’un accrochage entre un agent de sécurité et le conducteur. Ce dernier a dit niet à l’agent qui lui réclamait son permis de conduire. Le taxi, prétextant que l’agent n’avait aucun droit de lui retirer son permis, s’en est allé, sans se retourner.
Prévention, assistance, secours
Les ASP ont-ils failli à leur mission? C’est la question posée un peu partout au lendemain de la sortie malheureuse du directeur de la police sénégalaise qui demandait en substance aux citoyens de se défendre tout seuls. La proximité devait être le fort de ces agents, et pourtant les crimes, agressions et vols n’ont fait qu’augmenter ces dernières années. Il suffit de se promener dans les rues de Dakar, pour constaer que les seuls ASP qu'on y voit sont soit devant les villas d’une autorité ou devant un bâtiment administratif. Un détournement d’objectifs qui donne aujourd’hui raison à tous ces sceptiques qui disaient que cette agence est créée pour assurer la sécurité de Macky Sall et de ses partisans, tout en redistribuant un peu plus d'argent public aux partisans de la mouvance présidentielle. Car le constat est fait que la plupart des jeunes recrutés sont des militants de l'Alliance pour la République de Macky Sall ou finissent par en être de fervents partisans.