Polémique ethniciste au pays de la «Téranga»: quand l’ethnie passe avant la Nation

Au Sénégal Peuls et Wolofs ont pourtant toujours vécu ensemble

Au Sénégal Peuls et Wolofs ont pourtant toujours vécu ensemble. DR/

Le 04/08/2017 à 08h16, mis à jour le 04/08/2017 à 10h16

Alerte à l’ethnicisme grandissant au Sénégal et aux écarts de langage. Les descendants de Senghor, Lamine Guèye et Mamadou Dia piétinent l’héritage qui leur a été légué.

Le discours éthniciste prend de plus en plus de l’ampleur au Sénégal. Initié par certaines autorités et leaders politiques en manque d’arguments politiques valables, d’une vraie vision pour la société, d’une politique économique et sociale efficace, le mal s’est exacerbé durant la campagne pour les législatives 2017.

Le phénomène s’est maintenant généralisé. Sans que les autorités judiciaires ne s’en émeuvent et des internautes profèrent des injures à l’endroit de leurs compatriotes sénégalais.

D’une ethnie à une autre, les injures sont presque devenues banales. A peine a-t-on fini d’épiloguer sur la vidéo des filles, ressortissantes sénégalaises en France, sur l’apparition d’une petite fille qui lançait des obscénités sur le Net, c’est au tour de Penda Ba, une jeune femme de choquer le pays entier, y compris ceux de son ethnie. 

Dans une vidéo qu’elle a publiée sur les réseaux sociaux, Penda Ba assène des injures aux Wolofs, majoritaires au Sénégal. Son attitude laisse paraître une personne remplie de haine envers ses compatriotes. Mais en ce sens qu’elle montre de vulgarités et incite à la haine entre ethnies, Penda Ba a offensé tous les Sénégalais, au premier rang desquels les peulhs, dont elle se réclame.

En publiant des injures sur internet, la ressortissante du Fouta, dans la région de Matam, croyait accomplir une geste de bravoure, mais elle s’est au contraire ridiculisée. Et depuis quelques jours, la majorité des internautes s’indigne devant les propos dégradants de cette femme.

Des citoyens responsables sonnent l’alerte

Au lendemain des élections législatives du 30 juillet 2017, des citoyens s’étaient levés pour dénoncer les dérives de certains qui sont inconscients du riche héritage laissé par les premiers hommes politiques sénégalais. Décriant les dangers du vote ethnique, le rappeur Mallal Tall, alias «Fou malade», militant du mouvement «Y en a marre», avait tenté de sonner l’alerte au niveau de l’opinion nationale. Ainsi avait-il dit : «Le vote fondé sur l’ethnie ou la religion a créé beaucoup de dommages dans des pays en Afrique. Et le Sénégal ne devrait pas en arriver-là».

Le même constat avait été fait, quelques jours par Demba Abdou Diallo, tête de liste de la coalition gagnante «Manko Wattu Sénégal» à Matam, qui avait appelé les candidats aux élections législatives 2017 de se méfier du discours ethniciste. «Toutes les ethnies sont d’égale dignité et d’égal droit dans ce pays, c’est dangereux que certaines personnes tiennent un discours ethniciste pour tenter de convaincre les populations à voter pour elles. Cela peut créer des précédents incalculables», avait-t-il soutenu.

A la lecture du mauvais comportement de certains sénégalais, qui à travers leurs injures envers leurs compatriotes, font preuve d’une irresponsabilité notoire, le Sénégal pourrait ainsi arriver à une haine sans précédent entre les ethnies. Pour barrer la route à de telles dérives, il faudrait que les autorités judiciaires prennent leurs responsabilités en punissant des individus comme Penda Ba. Ce genre d’individus n’a aucune idée de ce qu’est’une nation aussi soudée que le Sénégal où tout le monde est frère et sœur, mais aussi cousin et cousine. 

Par Mamadou Awa Ndiaye (Dakar, correspondance)
Le 04/08/2017 à 08h16, mis à jour le 04/08/2017 à 10h16