Sénégal: les guides religieux déclarent la guerre aux séries TV

Maitresse d'un homme marié

Maitresse d'un homme marié. dr

Le 07/04/2019 à 17h57, mis à jour le 08/04/2019 à 09h40

La polémique enfle entre certaines autorités religieuses sénégalaises et la maison de production Marodi TV à propos de la série «Maîtresse d’un homme marié». Cette série met le doigt, en usant d’un langage cru et des épisodes jugés «obscènes», sur certaines tares de la société.

Au Sénégal, s’il y a une sujet qui a fait couler beaucoup d’encre et de salive ces derniers temps, c’est bien celui de la série «Maîtresse d’un homme marié». Suivie par une bonne partie des Sénégalais, elle fait exploser l’audimat de la maison de production, Marodi TV. L’histoire raconte, sans détours, certains tabous de la société comme les relations extraconjugales et les violences subies par des milliers de femmes dans leurs couples.

Malgré son audience, «Maîtresse d’un homme marié» heurte la sensibilité de certains religieux qui la jugent contraire aux valeurs sénégalaises. Des voix se sont ainsi élevées pour dénoncer cette production qui, selon eux, est en train de pervertir les populations. C’est le cas de l’Imam Omar Sall et de Mame Mactar Guèye de l’ONG Jamra. Quand le premier multiplie ses sorties sur Internet pour dénoncer une production qui «déprave les mœurs et détruit les valeurs», le second va plus loin et parle d’un série «pornographique», de «scènes obscènes» et d’incitation à la débauche.

C’est à cet effet qu’une plainte de l’ONG Jamra avait été adressée au Conseil national de régulation de l’audiovisuel (CNRA). Après avoir visionné les épisodes de la série, l’organe de régulation de l’audiovisuel a rendu un verdict sans appel. Selon le Conseil, «des scènes de grande violence ou susceptibles de nuire à la préservation des identités culturelles» ont été remarquées dans la série «Maîtresse d’un homme marié». Ses membres ont ainsi précisé que la diffusion de cette série ne pourrait se poursuivre qu’à une seule condition: «ses producteurs devrons y apporter des modifications».

Mais tout semble aujourd’hui rentrer dans l’ordre, révèle Mame Mactar Gueye de l’ONG Jamra, après sa rencontre avec les responsables de Marodi TV qui lui ont rendu visite le 25 mars dernier. Ces derniers ont décidé de l’associer à la rédaction du contenu. «Marodi Tv qui a financé la production de la série «Maîtresse d’un homme marié» a décidé de nous impliquer dans la série et je l'en remercie», a-t-il fait savoir sur les ondes de la Rfm.

A noter que c’est la deuxième fois qu’une série montrant des «scènes obscènes» crée une controverse au Sénégal. En juin 2017, une polémique similaire avait éclaté autour de la série sénégalaise Pod et Marichou. Les producteurs n’hésitent plus à user de tous les moyens pour ainsi faire exploser leur audience.

Mais ces scènes érotiques et ces leçons de séduction qui devraient être dispensées dans un cadre privé ne peuvent pas passer inaperçues au Sénégal, un pays composé de 98% de croyants. Certains parents décident tout bonnement d'interdire à leurs enfants de suivre la télé aux heures de diffusion de ces séries. Mais avec la démocratisation de l’Internet, il sera difficile pour eux de les empêcher de suivre les séries. Ils revient ainsi au autorités compétentes de prendre des mesures nécessaires pour interdire et même sanctionner les auteurs de certaines dérives.

Par Moustapha Cissé (Dakar, correspondance)
Le 07/04/2019 à 17h57, mis à jour le 08/04/2019 à 09h40