Selon les résultats, encore partiels après dépouillement de 89% des voix exprimées, du premier tour de l’élection présidentielle, les Tunisiens ont voté pour des candidats qui ne sont pas soutenus par de grands partis.
Kais Saïed, un universitaire de 61 ans sans parti ni structure, entré en toute discrétion sur la scène politique, recueille 18,9 % des voix, d'après les chiffres de l'Isie, l'instance électorale, publiés lundi 16 septembre dans la soirée et portant sur deux tiers des suffrages. Il devance l'homme d'affaires emprisonné Nabil Karoui, qui recueille 15,5 % des suffrages, devant le candidat du parti islamiste Ennahdha, Abdelfattah Mourou (12,9 %).
Sept millions d'électeurs étaient appelés dimanche à départager 26 candidats pour le premier tour de ce scrutin, qui s'est déroulé sur fond de crise économique et sociale et dans un contexte de rejet des élites politiques traditionnelles.
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La participation a été d'environ 45 %, selon des chiffres encore provisoires de l'Isie, un taux faible en regard des 64 % enregistrés lors du premier tour de la présidentielle de 2014. Kais Saïed et Nabil Karoui, qui ont revendiqué leur qualification dès dimanche soir pour le deuxième tour, ont tous deux fait campagne sur le sentiment de rejet des élites politiques.
Le "Robocop" de la politique tunisienne
Fin connaisseur de la constitution, Kais Saïed s'est fait connaître comme commentateur politique et cultive une image de "M. Propre" incorruptible et au-dessus de la mêlée. Surnommé "Robocop" en raison de son attitude et sa diction rigides, il a multiplié les déplacements de terrain pour sa première campagne électorale.
"Les électeurs ont adressé un message clair, tout à fait nouveau. Ils ont fait une révolution dans le cadre de la légalité, une révolution dans le cadre de la Constitution. Ils veulent quelque chose de nouveau. Nous avons besoin d'une nouvelle pensée politique", s'est félicité Kais Saïed lundi.
Régulièrement entouré d'étudiants ou jeunes actifs, il a défendu des positions socialement conservatrices : il est contre l'abolition de la peine de mort, contre l'abrogation des textes punissant l'homosexualité et les atteintes à la pudeur, ce dernier texte ayant servi à condamner des couples non mariés s'embrassant dans la rue. Il s'est aussi prononcé contre l'égalité en matière d'héritage.
Un candidat en prison
Nabil Karoui, lui, est issu des cercles du pouvoir mais il s'est positionné contre eux et a vu son image d'"anti-système" renforcée par son incarcération fin août dans le cadre d'une enquête pour blanchiment et fraude fiscale.
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Cet homme d'affaires de 56 ans, taxé de "populiste" par ses détracteurs, a bâti sa popularité ces dernières années en organisant des opérations caritatives dans les régions défavorisées, et il a derrière lui la puissance d'une chaîne privée, Nessma, dont il est le fondateur.
Ses avocats vont déposer dans les 24 heures une nouvelle demande de libération, mais trois ont déjà été rejetées par la justice. Être en prison n'empêche pas d'être président, à condition de ne pas être déchu de ses droits civiques, a indiqué l'Isie.
Dans l'éventualité, toujours possible, où Nabil Karoui écope entre les deux tours d'une condamnation le privant de ses droits civiques, "il faudra se passer de lui, et organiser un second tour avec le candidat arrivé en 3e position", Abdelfattah Mourou, estime un responsable de l'Isie, Adel Brinsi.
Les prochaines élections législatives
Des tractations étaient en cours lundi dans les partis qui tentent de tirer les leçons du scrutin pour préparer les élections législatives du 6 octobre.
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Selon les résultats partiels de l'Isie, le ministre de la Défense Abdelkarim Zbidi arrive en 4e position avec 10,1 % des voix et le Premier ministre Youssef Chahed 5e avec 7,4 % des suffrages. Une défaite cuisante pour les candidats de la famille libérale "centriste" issus du parti de l'ancien président Béji Caïd Essebsi, décédé en juillet.