Burkina Faso, Mali, Guinée…Ces pays africains qui se réapproprient leurs ressources minières

Une mine de charbon d'Afrique du Sud.

Le 07/12/2023 à 14h12

C’en est fini de l’ère où l’Afrique se contentait des miettes que voulaient bien lui laisser les puissantes compagnies minières occidentales qui exploitent les énormes richesses du sous-sol africain. Désormais, souffle dans plusieurs pays du continent un vent de souverainisme qui promet un avenir radieux au secteur des mines dans cette partie du monde.

Bauxite, cobalt, cuivre, chromate, lithium, fer…L’Afrique regorge de toutes ces ressources souterraines et de bien d’autres encore. Les spécialistes attribuent au continent 30% des réserves mondiales de matières premières non minérales. Paradoxalement, nombreux sont les pays africains détenteurs d’énormes gisements mais qui demeurent pauvres.

Face à ce paradoxe, certains Etats ont décidé de se réapproprier les richesses de leur sous-sol. En Afrique de l’Ouest, les exemples sont légion.

Prenons le cas du Mali qui vient d’opérer une petite révolution dans son secteur minier. La junte, arrivée au pouvoir en 2020 à la suite d’un coup d’Etat, a tenu sa promesse de faire «briller l’or malien pour les Maliens» en adoptant un nouveau code minier permettant à l’État de prendre jusqu’à 30 % de participation dans les nouveaux projets et d’augmenter les revenus tirés du secteur en question.

Principaux avantages du nouveau code minier malien

AvantagesA hauteur de...Bénéficiaires
Participation dans les nouveaux projets30%Etat malien
Hausse de la participation dans les sociétés d’exploitation20%Etat malien
Plus d’implication des investisseurs locaux35%Associés maliens

Source: Le360 Afrique

Le nouveau code minier permet également à l’Etat malien d’augmenter sa participation dans la société d’exploitation par l’achat en numéraire d’une participation complémentaire à concurrence de 20% appelée «participation en numéraire». A cette option, souligne le nouveau texte, s’ajoute l’obligation pour les sociétés d’exploitation, leurs fournisseurs et sous-traitants d’utiliser «autant que possible des services et matières d’origine malienne, des produits fabriqués ou vendus au Mali dans la mesure où ces services et produits sont disponibles au Mali».

Mieux, «Tout sous-traitant étranger qui fournit des prestations de services pour le compte d’une société d’exploitation, est tenu de céder au minimum 35% de participation à des associés maliens.» Par ailleurs, les sociétés d’exploitations minières sont tenues de s’approvisionner «en produits explosifs auprès d’importateurs ou de fabricants dont le capital social est détenu par une personne physique ou morale malienne à hauteur de 35% au minimum», détaille-t-on dans le nouveau code minier.

Une petite révolution qui a fait tache d’huile dans la région. En effet, au Burkina Faso voisin, un pays dirigé par une junte depuis fin septembre 2022, c’est le même vent de souverainisme minier qui souffle.

En adoptant une modification de la loi n°36-2015/CNT du 26 juin portant code minier, Ouagadougou marche en effet sur les pas de Bamako. La principale nouveauté de ce texte réside dans l’introduction de dispositions permettant de reverser une partie des ressources du Fonds minier de développement local (FMDL), au Fonds de soutien patriotique (FSP).

Pour la junte au Burkina Faso, ces modifications devront permettre de tirer le maximum de revenus de la production minière dans le pays. C’est la même ambition qui anime les autorités guinéennes, qui depuis le 1er septembre dernier, exigent des sociétés exploitant les ressources du sous-sol guinéen le rapatriement d’au moins 50% de leurs recettes d’exportation.

Bien entendu, cette révolution minière n’est pas l’apanage des juntes. Souvent cité comme un ilot de démocratie dans cette partie du monde en proie aux coups d’Etat, dès 2016, le Sénégal a revu un certain nombre de dispositions de son code minier. Une révision qui permet au pays de la teranga de percevoir 60% des taxes perçues dans le secteur des mines. Le texte en vigueur donne la possibilité aux collectivités territoriales et à l’administration des mines de capter 20% des taxes manières.

Ce changement a été principalement motivé par un besoin de combler un manque à gagner évalué à 401,2 milliards de FCFA. Il s’inscrit également dans un contexte de forte demande sur le marché mondial en ressources minières.

La demande en matières premières a explosé ces dernières années, tirée principalement par les industries automobiles, tournées vers l’électrique. Les besoins sont également importants dans les secteurs de la fabrication d’ordinateurs et de téléphones. Une aubaine pour les pays africains qui voient ainsi leur production augmenter.

Le Burkina Faso qui a produit 57,65 tonnes d’or en 2022 a vu ses recettes directes engendrées par le secteur des mines augmenter de 25,54% en valeur absolue, soit un montant total de 540,98 milliards de FCFA. Le pays veut aller plus loin et caresse même le rêve de doubler sa production les années à venir.

De même, tablant sur cette forte demande mondiale, le Mali, considéré comme l’un des plus gros producteurs d’or en Afrique avec 72.2 tonnes l’année dernière, veut porter la contribution de l’industrie minière à 15% ou 20% du PIB contre 10% actuellement. Pour ce faire, les deux pays cités ont récemment annoncé la construction de nouvelles raffineries d’or s’évitant ainsi d’exporter leurs matières premières à l’état brut. Ce qui augure de prometteuses perspectives pour leurs recettes minières.

Par Khadim Mbaye
Le 07/12/2023 à 14h12