«On en ressort dégoûté». À Abidjan, les toilettes publiques sont d’une saleté repoussante

Un lieu de toilette publique à Abidjan.

Le 18/08/2025 à 10h24

VidéoDans quel endroit se soulager lorsqu’on est pris par un besoin pressant? Dans les toilettes publiques, évidemment. Sauf que ces lieux d’aisance sont d’une saleté répugnante. Reportage aux relents pas très accueillants.

À Abidjan les toilettes publiques n’ont pas bonne réputation, considérées comme des endroits infectes, elles restent pourtant une nécessité. Dans les marchés, gares routières ou même en plein centre-ville, les toilettes publiques sont parfois la seule option pour ceux qui n’ont pas accès à un sanitaire privé.

Pourtant, l’expérience y est rarement agréable: mauvaises odeurs, manque d’hygiène, absence parfois de produits de nettoyage, ou encore portes cassées.

«On y va parce qu’on n’a pas le choix. On ne peut pas faire les besoins dans la rue, ce n’est pas commode. Mais à chaque fois, on en ressort dégoûté», confie Amoa Olivier, commerçant au marché d’Adjamé.

Comme lui, pour beaucoup d’Abidjanais, se soulager est plutôt problématique.

ques d’infections urinaires, de maladies diarrhéiqueAu-delà de l’inconfort, l’insalubrité de ces espaces représente un véritable danger sanitaire. Les riss ou de contamination par des germes sont élevés.

Les spécialistes de la santé publique tirent régulièrement la sonnette d’alarme: la propreté des toilettes est une question de santé collective. «Quand un lieu est utilisé par des dizaines, voire des centaines de personnes chaque jour, et qu’il n’est pas entretenu, il devient un foyer de microbes», alerte un infirmier à Yopougon.

Alors que les gérants de ces lieux prétendent maintenir la propriété au quotidien, «chaque jour je nettoie avec de la javel, de l’acide et mets souvent du ”woussounan” pour garder la propreté et dissiper la mauvaise odeur. Aussi après qu’un client utilise les toilettes, j’y verse de l’eau pour évacuer la saleté», explique Sidibé Dramane, gérant de WC publique à Yopougon.

Cependant les critiques sont nombreuses et unanimes. Certains dénoncent l’abandon de ces infrastructures par les autorités locales, d’autres pointent du doigt la négligence des gestionnaires qui perçoivent pourtant une redevance à l’entrée. «On paie 50 à 100 Fcfa pour entrer selon le besoin, mais à quoi ça sert si on ne peut même pas garantir la propreté ?», s’indigne Jeannot Amari, riverain.

Face à ce constat, les usagers eux-mêmes avancent des pistes de solution. L’une des plus récurrentes : instaurer un système de suivi strict du nettoyage par les autorités municipales tandis que d’autres insistent sur la sensibilisation aussi bien des gérants que des utilisateurs pour éviter qu’ils ne dégradent les lieux. «Si chacun faisait un effort pour laisser l’endroit propre, ce serait déjà un pas en avant», estime Koumara Mory, également commerçant à Adjamé.

Reléguées souvent au second plan, les toilettes publiques sont avant tout un bien public. Y avoir recours pose une question fondamentale, celle de la dignité humaine et du droit à un environnement sain. Dans une ville comme Abidjan, où la modernisation urbaine avance à grands pas, l’hygiène de ces lieux collectifs devrait être une priorité au même titre que la voirie ou l’éclairage public.

En attendant une véritable prise en considération des inquiétudes des utilisateurs, les Abidjanais continueront de fréquenter, la peur au ventre, ces lieux indispensables mais insalubres, avec le vœu que la propreté y devienne, enfin, la règle.

Par Emmanuel Djidja (Abidjan, correspondance)
Le 18/08/2025 à 10h24