Son bureau a diffusé samedi soir un communiqué pour tenter de convaincre qu'en «dépit de l'intérêt et de l'inquiétude du public» autour de cette affaire, le président restait «fermement concentré sur la tâche de reconstruire l'économie et le pays».
Ramaphosa, 69 ans, qui a succédé en 2018 au président Jacob Zuma englué dans une série de scandales de corruption, «réaffirme ne pas être impliqué dans une quelconque conduite criminelle».
Le président, à la tête d'une fortune personnelle conséquente et attendu sur la lutte contre la corruption, s'engage «une nouvelle fois» à coopérer «pleinement» à toute enquête. Mais la présidence met en garde qu'elle ne sera «pas en mesure» d'entrer dans les détails de l'affaire, laissant police et justice faire leur travail.
Tout commence en février 2020, selon la plainte déposée mercredi dans un commissariat de Johannesburg par l'ancien chef du renseignement sud-africain, Arthur Fraser.
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Des cambrioleurs s'introduisent dans une ferme appartenant à Ramaphosa dans le nord-est du pays, où ils trouvent l'équivalent de près de 3,8 millions d'euros en espèces, dissimulés dans du mobilier.
La plainte accuse Ramaphosa d'avoir dissimulé ce cambriolage à la police et cet argent au fisc. Elle avance aussi que le président aurait ensuite «payé» les cambrioleurs «pour leur silence».
Fraser, qui dit avoir fourni à la police «photos, comptes bancaires, noms et vidéos», accuse Ramaphosa «d'entrave à la justice» et d'avoir organisé «l'enlèvement des suspects, leur interrogatoire dans sa propriété et leur corruption».
Fragile au sein de l'ANC
Jeudi, la présidence avait confirmé «un vol à main armée» dans la réserve animalière du Limpopo (nord-est) de Ramaphosa, «au cours duquel le produit de la vente de bétail a été dérobé». Le président, qui participait à un sommet de l'Union africaine à Addis Abeba, n'était pas présent à ce moment-là.
«Après avoir été informé du vol, Ramaphosa a signalé l'incident au chef de l'unité de protection présidentielle de la police, pour enquête», a détaillé la présidence.
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Au début des années 2000, après un passé de syndicaliste mobilisateur contre le régime honni de l'apartheid, Ramaphosa, considéré comme «le fils préféré» de Nelson Mandela avant d'être écarté de sa succession à la tête de l'ANC, quitte la politique pour devenir un redoutable homme d'affaires.
Cet homme ambitieux, issu d'un milieu modeste de Soweto, se classe en 2015 à la 42ème place de la liste Forbes des plus grandes fortunes d'Afrique, avec près de 400 millions d'euros. Il développe alors un passe-temps coûteux d'éleveur de bétail rare et possède plusieurs fermes.
Le Congrès national africain (ANC) doit décider d'ici décembre s'il maintient ou non Ramaphosa comme président en 2024.
«Cela ne va pas être facile», commente auprès de l'AFP l'analyste politique Rebone Tau. «Ramaphosa a bien du mal à consolider son pouvoir au sein de l'ANC» et cette dernière affaire est déjà «un problème pour Cyril», comme l'appellent familièrement de nombreux Sud-Africains.
«Reste-t-il populaire?», interroge Tau, ex militant des jeunesses de l'ANC. Rien de moins sûr, alors que le chômage reste fort, les prix à la pompe s'envolent et que le pays a tant de défis économiques à relever.
Si ses prédécesseurs, Thabo Mbeki ou Jacob Zuma, avaient facilement obtenu un second mandat, l'ANC est passé sous la barre des 50% pour la première fois lors des élections locales de 2021. «C'est pour l'instant l'héritage» de Cyril Ramaphosa, met en garde Rebone Tau.