A 210 km d’Abidjan, dans la région du Loh-Djiboua, département de Divo, le tchétchra ou dossouun est un mets traditionnel qui captive toutes les convoitises et fait la fierté des habitants de Didoko.
Visiteurs et habitants en consomment au déjeuner, au dîner ou à n’importe quelle cérémonie. Connue pour son héritage culturel riche et varié, cette localité a su préserver ses traditions et son art de vivre. Cette spécialité culinaire de ce village est le fruit d’une histoire qui remonte à des siècles, fruit des influences autochtones.
«Ici, c’est notre nourriture préférée. Nos parents la préparaient pour recevoir les étrangers, visiteurs ou personnalités de marque. Et maintenant, nous prenons la relève. On en consomme à tout moment de la journée et même la nuit, à la maison comme au restaurant», fait savoir Coulibaly Mohamed, un habitant de Didoko.
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Sur les berges ombragées de Didoko, la préparation de la sauce Tchétchra, ce plat, dont la renommée a franchi les limites du village, est un incontournable des grandes rencontres. «C’est un mets facile à préparer en apparence, mais qui requiert une certaine technicité pour en tirer toute la saveur», confie Victorine, une habitante réputée pour son savoir-faire culinaire.
La recette transmise de mère en fille, repose sur des ingrédients simples mais savamment assemblés donnent un plat à nul autre pareil: poisson frais ou viande, épices locales, légumes, l’huile de palme et potasse. Chaque cuisinière doit apporter une touche personnelle au risque d’échouer, ce qui confère au Tchétchra un goût unique, sans jamais trahir son identité.
«Quand on mange cette sauce, on sent toute l’âme du peuple Dida. C’est pourquoi on en trouve presque dans tous les espaces de restauration au village ici et même à Divo», lance avec fierté Blicou Madelaine, une habitante rencontrée au marché de Didoko.
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Avant de donner des détails des étapes de la cuisson. «Dans un premier temps, on fait cuir les ingrédients (aubergines, piments, poissons ou viande, tomates…). Après on laisse 20 minutes de cuisson et on sépare les poissons pour les écraser», poursuit-elle.
Et d’ajouter, «l’étape la plus délicate, c’est lors du mélange parce il faut ajouter de la potasse à quantité mesurée à la patte obtenue à laquelle on ajoute de l’huile de palme. On mélange enfin le tout à plusieurs reprises de sorte à obtenir un liquide homogène: la sauce finale. Avec 5.000 Fcfa, on peut faire un repas pour sept personnes».
D’après elle, la moindre inattention peut faire foirer la cuisson. «En pays Dida, la sauce Tchétchra est notre identité culturelle, c’est le repas préféré de nos maris. C’est pour cela que toute femme qui veut rentrer dans un foyer doit savoir cuisiner cette sauce».
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Les habitants de Didoko sont fiers de cette cuisine et la transmettent généreusement aux visiteurs, offrant ainsi une opportunité unique de se plonger dans la culture locale. «Avant j’étais indifférant, mais depuis que je suis venu au village, je ne peux m’en passer. J’adore cette sauce. Surtout qu’elle peut s’accompagner du foutou ou du bon riz local», vante Yao Hervé, désormais «amoureux» du Dossou.
Ce mets traditionnel n’est pas seulement une affaire de cuisine. Il est au cœur de la convivialité et du partage. Dans les familles, on le sert accompagné de foutou, de riz ou d’igname pilée. Pour beaucoup, sa saveur unique traduit l’hospitalité et la chaleur humaine caractéristiques du pays Dida.