La presse locale impute cette crise aux attaques répétées du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM ou JNIM), affilié à Al-Qaïda, qui cible les convois d’hydrocarbures sur les principaux axes d’approvisionnement du pays. Ainsi, depuis début septembre, plusieurs camions-citernes ont été incendiés ou bloqués sur les routes reliant les ports du Sénégal, de la Mauritanie, de la Côte d’Ivoire et de la Guinée à Bamako, coupant les artères logistiques vitales du pays.
Selon le Think Tank africain «Timbuktu Institute», basé à Dakar, cette offensive s’inscrit dans une stratégie de «jihad économique», visant à asphyxier la capitale et à désorganiser l’économie malienne.
«Ce n’est pas une hostilité ciblée contre un partenaire économique, mais une stratégie destinée à porter un coup direct à l’économie du Mali et à affaiblir l’État, en attaquant ses bases économiques, en perturbant le commerce et en instaurant un blocus logistique», explique Bakary Sambe, directeur régional du Timbuktu Institute, estimant que cette crise marque une évolution majeure du conflit au Sahel.
«Le JNIM mène désormais un jihad économique, visant à affaiblir l’État par la pénurie, à étouffer les circuits de production et à miner la confiance des populations», a-t-il expliqué, notant que la région de Kayes, qui représente près de 80% de la production aurifère nationale et sert de corridor stratégique vers le Sénégal, est au cœur de cette offensive».
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Selon lui, cette stratégie «vise à priver Bamako de ressources vitales, pouvant provoquer une insécurité alimentaire accrue et une hausse des prix des biens de première nécessité». «En s’attaquant à l’offre de carburant, c’est la colonne vertébrale de l’économie qui est touchée», souligne, pour sa part, Madou Cissé, économiste à l’Université de Bamako, estimant qu’«une journée sans carburant réduit la production nationale et contracte les recettes fiscales».
En conséquence de cette crise énergétique, qui exacerbe aussi les coupures d’électricité récurrentes, les stations-service sont saturées, les files s’allongent et le carburant se raréfie, tandis que le marché parallèle flambe, les transports publics tournent au ralenti et les activités commerciales sont paralysées.
Face à cette situation, le gouvernement a validé un dispositif visant à rétablir l’approvisionnement national et à stabiliser durablement le marché des hydrocarbures.
Le plan porte sur la mise en place d’escortes militaires pour sécuriser les convois, le déploiement de brigades de contrôle pour veiller au respect des prix officiels et la surveillance accrue du marché afin de prévenir la spéculation.
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Le plan d’action adopté repose sur une approche à court, moyen et long terme. Il prévoit la sécurisation des convois de camions-citernes, la construction de nouvelles capacités de stockage, la création de stocks dynamiques et la mise en place d’équipes de contrôle chargées de garantir une distribution régulière et transparente. Des facilités douanières et fiscales ont été accordées aux opérateurs économiques pour accélérer les importations et soutenir la continuité de leurs activités.
Outre la menace terroriste, le gouvernement pointe du doigt la spéculation, qui a pris «trois formes».
Le ministre malien de l’Industrie et du Commerce, Moussa Alassane Diallo, a dénoncé la rétention des stocks en violation des règles du commerce, la hausse non justifiée des prix et le comportement des opérateurs économiques accusés par les autorités de créer “une psychose”.
Depuis 2012, le Mali est confronté à une profonde crise sécuritaire, qui se manifeste par des insurrections indépendantistes, des incursions djihadistes et des violences intercommunautaires ayant fait des milliers de morts et des centaines de milliers de déplacés.