Après les «rebasages» et la prise en compte du secteur informel par certains pays pour le calcul de leur PIB, les pays africains avancent l’idée d’élargir la base du calcul de la richesse de leurs États en y incorporant leurs ressources naturelles. Une vision que le président de la Banque africaine de développement (BAD), Akinmumi Adesina a confirmé à Reuters, en marge du Sommet africain de l’énergie qui s’est tenu les 27 et 28 janvier, à Dar Es Salaam, en Tanzanie. Il s’agit d’une sollicitation des dirigeants africains qui comptent promouvoir cette idée auprès des autres organisations, notamment le G7 et le G20.
Il s’agit d’une mesure visant à prendre en compte les atouts naturels du continent: ressources minières (cobalt, lithium, or, phosphates….), biodiversité, ressources halieutiques, terres arables… Selon le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), «les forêts naturelles fournissent 21% du revenu des ménages ruraux dans onze pays africains et les aliments récoltés à l’état sauvage (y compris la pêche), contribuent à la santé de millions d’Africains.» Quant aux minerais, à l’échelle mondiale, l’Afrique détient 40% des réserves d’or et 30% des minerais.
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Cette méthode, qui prend en compte le capital naturel des États africains, devrait se traduire par une augmentation sensible de la richesse des pays africains exprimée par le PIB. Cela aura des impacts positifs. D’abord, ce nouveau mode de calcul se traduira par une augmentation sensible de la richesse des Etats du continent et donc du PIB africain qui s’établit autour de 3.200 milliards de dollars. Certains pays très riches en ressources naturelles devraient ainsi voir leur PIB augmenter sensiblement.
C’est le cas notamment de la République démocratique du Congo (RDC), de l’Afrique du Sud, le Gabon, la Tanzanie, le Congo,… Ainsi, selon les estimations de la BAD, le PIB du continent devrait s’établir à 2.500 milliards de dollars en 2028, devrait atteindre 6.250 milliards de dollars à cette date.
Ensuite, en augmentant la richesse des États, cette nouvelle mesure améliorera certains ratios des pays du continent dont particulièrement celui de l’endettement (dette publique/PIB). Celui-ci permet de mesurer le niveau d’endettement et donne donc une idée sur la solvabilité des États.
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Sur ce chapitre, pour les institutions financières, un taux d’endettement de 70% du PIB est considéré comme un seuil d’alerte et les pays ayant des taux proches de ce seuil sont surveillés par les agences de notation et les prêteurs privés qui ne manqueront pas de corser leurs conditions de prêts, notamment en relevant les taux d’intérêt en fonction des risques. En tenant compte du capital naturel qui devrait revaloriser leurs richesses, de nombreux pays africains verront leur ratio d’endettement s’améliorer.
Si cette méthode de calcul qui tient compte du capital naturel des pays du continent a des effets positifs sur la richesse des Etats et du continent, se pose alors la problématique de la méthode d’approche pour monétiser ces richesses naturelles. Ensuite, si la revalorisation du PIB peut améliorer nettement le ratio d’endettement de certains États, il n’en demeure pas moins qu’en l’absence de monétisation de ces richesses posera le problème de disponibilité des ressources financières pour faire face aux services de la dette.
Partant, l’enjeu majeur pour les pays africains sera de pouvoir transformer ces ressources naturelles en moteur de croissance. Or, pour monétiser ces ressources, il faut des politiques à même de permettre aux États d’attirer de nouveaux investissements.