Seule une faible partie des exportations de minerais s’effectue au sein même du continent. La récente étude publiée par l’Agence Française de Développement (AFD), intitulée «Le potentiel minier de l’Afrique: Panorama, enjeux et défis», analyse les principaux acteurs et dynamiques du commerce intra-africain de produits miniers.
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Selon l’étude, plusieurs facteurs peuvent expliquer cette faible intégration régionale autour des filières minières en Afrique. Tout d’abord, de nombreux pays africains riches en ressources minérales n’ont pas encore développé des capacités de transformation locale suffisantes. C’est le cas notamment de la RDC, citée dans l’étude, qui doit exporter une partie de son minerai de cuivre brut vers la Zambie voisine pour le faire raffiner, faute d’usines adéquates sur son territoire.
Une bijouterie vend des pièces en or made in Tanzanie. La Tanzanie est un exportateur clé d'or transformé et semi-fini en Afrique de l'Est, notamment vers l'Ouganda.. DR
Ensuite, le manque d’infrastructures de transport reliant les différents pays constitue un frein majeur aux échanges commerciaux terrestres de minerais. Les coûts logistiques deviennent alors prohibitifs. Par ailleurs, les cadres réglementaires et fiscaux hétérogènes selon les pays complexifient les échanges régionaux. Un meilleur alignement des politiques minières serait nécessaire. Enfin, l’importance du commerce informel et illégal dans certaines filières comme l’or en Afrique de l’Ouest nuit à la traçabilité et à la fluidité des échanges.
Malgré ces défis, l’étude met en évidence des dynamiques prometteuses, avec l’émergence de deux pôles régionaux: l’Afrique australe avec l’Afrique du Sud comme plaque tournante pour le fer, et l’Afrique de l’Est autour de la Tanzanie et du Kenya pour l’or.
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Ces premières intégrations commerciales régionales autour des filières minières gagneraient à être renforcées et étendues à d’autres zones et d’autres minerais, afin que le potentiel minier africain joue pleinement son rôle de catalyseur du développement économique et de l’intégration régionale sur le continent. Cela dit, qui sont ces 5 pays africains ayant les parts les plus importantes dans les exportations intra-africaines de produits miniers?
Afrique du Sud (30,4% des échanges)
L’Afrique du Sud arrive en tête, avec près d’un tiers des exportations intra-africaines de minerais. Son secteur phare est celui du fer, dont elle est le 7e producteur mondial: «L’Afrique du Sud exporte en majorité des produits semi-finis et finis de fer (22%) vers les pays d’Afrique australe et d’Afrique de l’Est.»
Zambie (16,8%)
La Zambie, premier exportateur continental de cuivre, vient en 2e position grâce à ses exportations de « cuivre transformé pour 15%, se répartissant vers la Namibie (11%), l’Égypte (3%) et l’Afrique du Sud (1%). »
Namibie (10,6%)
Riche en diamants, la Namibie exporte principalement ce minerai « vers le Botswana (4,5%) et de l’or semi-fini vers l’Afrique du Sud (4,5%). »
RDC (9,3%)
Bien que possédant d’immenses réserves de cuivre, la RDC exporte une partie de son minerai brut « vers la Zambie (4,5%) pour y être raffiné » avant une possible réexportation.
Tanzanie (5,7%)
Ce pays d’Afrique de l’Est est présent pour ses exportations d’or transformé, notamment «vers l’Ouganda.»
Globalement, le commerce intra-africain de minerais concerne pour 20% des minerais bruts, 24% de produits transformés, 33% de produits semi-finis et 23% de produits finis. On constate que l’Afrique du Sud, la Zambie et la Namibie exportent surtout des produits déjà transformés ou semi-finis, contrairement à la RDC qui exporte surtout des minerais bruts.
«Au total, 51% du commerce intra-africain repose sur dix flux principaux qui concernent dix pays, dont d’Afrique australe (Afrique du Sud, Zambie, Zimbabwe, Namibie), d’Afrique de l’Est (Kenya, Tanzanie, Ouganda, Mozambique), dont enfin la RDC et l’Égypte.»
Deux pôles régionaux se dégagent donc nettement: l’Afrique australe d’une part, avec l’Afrique du Sud comme plaque tournante pour le fer, et l’Afrique de l’Est d’autre part, avec la Tanzanie et le Kenya exportant de l’or vers leurs voisins.
Les pays d’Afrique du Nord sont en revanche quasi-absents des principaux flux intra-africains selon les données fournies, à l’exception de l’Égypte comme importateur de cuivre zambien.
Si ces échanges régionaux sont prometteurs, plusieurs défis et limites sont à relever: le commerce intra-africain ne représente que 5% des exportations totales du continent, un chiffre très faible. Une grande partie du commerce de l’or, pourtant majeur, s’effectue de manière informelle selon l’étude: «Notons que la plupart du commerce de l’or se fait de manière non officielle, en particulier en Afrique de l’Ouest.»
Certains pays riches en minerais comme la RDC n’ont pas encore les capacités de transformation suffisantes et doivent exporter leurs minerais bruts. L’infrastructure de transport fait souvent défaut pour faciliter les échanges terrestres.
Principaux exportateurs intra-africains de produits miniers :
Pays exportateurs | Pays importateurs | Produits | Part des échanges | Étape | Rang |
---|---|---|---|---|---|
Afrique du Sud | Kenya, Zimbabwe, Botswana, Zambie, Namibie, Mozambique et Tanzanie | fer | 30,4% | Semi-finis et finis | 1er |
Zambie | Namibie, l’Égypte et l’Afrique du Sud | cuivre | 16,8% | transformé | 2ème |
Namibie | diamant vers le Botswana; et l’or vers l’Afrique du Sud | diamant, or semi-fini | 10,6% | semi-fini | 3ème |
RDC | minerai de cuivre vers la Zambie pour y être raffiné, et du cuivre raffiné vers la Namibie et l’Égypte | cuivre | 9,3% | brut et raffiné | 4ème |
Tanzanie | Ouganda | Or | 5,7% | transformé | 5ème |
Source : la base de UN Comtrade Database.