«La revanche du sol sur le sous-sol». Ces mots qui résonnent comme un slogan de campagne résument pourtant bien les grandes ambitions des autorités congolaises qui veulent faire de leur pays un grenier africain.
Ce pays de l’Afrique centrale a annoncé en effet, récemment, qu’il comptait investir 6,6 milliards de dollars sur dix ans dans son Programme de transformation de l’agriculture (PTA) pour réaliser son engagement de nourrir le continent. L’annonce a été faite lors du « Forum sur l’agribusiness en RDC » (« DRC Agribusiness Forum »), tenu à Kinshasa.
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L’investissement permettra de réussir le fort engagement et la détermination du président congolais Félix Antoine Tshisekedi qui cherche à se faire réélire pour un deuxième mandat à la tête du pays. Bon d’accord, on n’est pas loin d’une promesse électorale à l’africaine. Mais en réalité, cette ambition qui peut paraître folle, n’est pas forcément un fantasme pour qui connaît l’étendue des richesses naturelles dont dispose la RDC, onzième plus grand pays au monde.
«Avec ses 80 millions d’hectares de terres arables, ses quatre millions d’hectares de terres irrigables, sa diversité climatique permettant une exploitation agricole toute l’année, ses 7 à 8 % d’eau douce exploitable du monde, ses pâturages d’environ 125 millions d’hectares ayant une capacité de charge de 40 millions de têtes de gros bétail, l’importance de sa population, notamment jeune et féminine, la RD Congo a les moyens indéniables d’être le grenier de l’Afrique, l’épicentre de l’industrie agricole continentale et également un vivier de prospérité» se laisse convaincre Solomane Koné, directeur général adjoint de la Banque africaine de développement (BAD) pour l’Afrique centrale et responsable pays pour la RDC.
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Ce dernier s’exprimait lors du Forum organisé les 4 et 5 octobre 2023 à Kinshasa à l’initiative du gouvernement congolais, avec l’appui de la BAD et de la Société financière internationale, afin de stimuler l’investissement du secteur privé dans les chaînes de valeur agricoles et de dynamiser l’agribusiness afin de développer l’agriculture dans ce pays d’Afrique centrale qui dispose de grandes ressources agricoles.
«À la demande de la RD Congo, la Banque africaine de développement consacrera la totalité des allocations disponibles du pays, au cours du cycle du FAD-16 en 2023-2025, au soutien des opérations d’appui au programme de transformation de l’agriculture, qui constitue l’épine dorsale du Document de stratégie pays de la Banque pour la RDC ces cinq prochaines années», a souligné de son côté Serge N’Guessan, directeur général de la Banque africaine de développement pour l’Afrique centrale.
Cinq grandes recommandations ont été formulées pour développer les chaînes de valeur agricoles. Il s’agit notamment d’adopter une approche par filière et par projet, avec un véritable accompagnement du gouvernement (facilités fiscales et administratives, disponibilité des infrastructures socio-économiques de base et énergétique etc.)
Les autorités congolaises sont appelées à limiter toute charge, frais et imposition, à un maximum de 25 % de la valeur pour les activités relatives à la production et aux exportations, tout en mettant en place un fonds souverain pour soutenir l’agriculture et des centres d’agrégation pour appuyer et accompagner les petits investisseurs agricoles.
Selon les spécialistes, la RDC gagnerait également à renforcer les capacités et le rôle des entités territoriales décentralisées dans la gouvernance du secteur agricole, l’appropriation et l’application effective de l’approche chaînes de valeur et agriculture durable, mécanisme de garantie et d’atténuation des risques et accès au financement.
De son côté, le gouvernement congolais, appelé par ailleurs à harmoniser le cadre réglementaire (loi sur les zones économiques spéciales, loi portant principes fondamentaux relatifs à l’agriculture, loi sur les partenariats publics-privés), a réaffirmé son engagement à faire de la transformation de l’agriculture un moteur essentiel du développement de la RDC. Pour se faire, le pays veut compter notamment les réformes nécessaires et la mise en place d’une taskforce regroupant plusieurs départements ministériels et les parties prenantes pour le suivi de l’exécution des recommandations du Forum.