L’Afrique de plus en plus friande de poulet et de porc brésiliens

Un homme prépare du poulet braisé à Abidjan

Un homme prépare du poulet braisé à Abidjan. AFP or licensors

Le 01/12/2024 à 12h36

Les exportations de viande de poulet et de porc du Brésil, premier exportateur mondial de viande de volaille et quatrième exportateur mondial de viande de porc, connaissent un fort engouement sur le continent africain, porté par la demande d’une population urbaine en pleine expansion.

Décidemment, 2024 s’avère favorable aux exportations de protéines animales brésiliennes. En 2024, les chiffres pour les exportations brésiliennes de viande de poulet et de génétique avicole vers l’Afrique se sont améliorés selon les dernières données de l’Association Brésilienne des Protéines Animales (ABPA). Le géant sud-américain consolide ses positions sur ce continent stratégique, profitant d’une demande croissante pour ses produits de qualité. «Une croissance notable est enregistrée sur plusieurs marchés stratégiques, qui sont des destinations pour les produits à haute valeur ajoutée», déclare Ricardo Santin, président de l’ABPA.

Plusieurs facteurs expliquent cet appétit croissant des consommateurs africains pour les protéines animales brésiliennes. D’abord, il faut souligner la vitalité démographique africaine en pleine croissance, avec une population jeune et urbaine en augmentation rapide. Les modes de consommation évoluent, avec une demande accrue en protéines animales abordables comme le poulet. Le dynamisme économique, l’essor d’une classe moyenne consommatrice et les préférences alimentaires en faveur du poulet se conjuguent pour tirer la demande.

Audits sanitaires en Afrique du Sud

Parmi ces marchés stratégiques figurent plusieurs pays africains, désormais incontournables. L’Afrique du Sud se classe au 5ème rang des principales destinations mondiale et 1ère africaine avec 340.435 tonnes importées en 2023 (+19,9%). Elle représente 6,8% du total des exportations brésiliennes, se démarquant par sa forte demande en découpes (338.977 tonnes, en hausse de 19,7% entre 2022 et 2023).

Pour renforcer les liens commerciaux entre les deux pays, les autorités sanitaires sud-africaines viennent d’accorder de nouvelles licences d’importation à plusieurs établissements brésiliens supplémentaires. Parmi les qualifications figurent treize abattoirs de volailles et cinq de porcs.

Cette décision fait suite aux audits sanitaires menés par une délégation sud-africaine dans les installations de production et de transformation brésiliennes. Satisfaits des normes d’hygiène et de biosécurité appliquées, les inspecteurs ont donné leur feu vert pour l’ouverture du marché sud-africain à un plus grand nombre d’usines avicoles brésiliennes.

Cet élargissement devrait permettre d’augmenter les volumes exportés vers l’Afrique du Sud, pays clé pour le Brésil, le 1er exportateur mondial de la filière avicole devant les USA et l’UE, sur ce marché porteur du continent africain.

La Libye, 17ème destination mondiale et 2ème africaine de volaille brésilienne figure parmi les principaux débouchés africains avec 76.401 tonnes importées en 2023, en légère hausse de 0,1%. Ce pays se distingue par sa préférence à la fois pour les découpes de volaille (38.089 tonnes importées, en progression de 19,8% sur un an) et les carcasses entières (38.112 tonnes ; +14,63%). Une demande à mettre en lien avec les habitudes alimentaires locales.

L’Égypte, 20ème destination mondiale et 3ème en Afrique, a quant à elle enregistré une forte croissance de 25,4% de ses importations, à 59.136 tonnes. Les poulets entiers y sont particulièrement recherchés (51.936 tonnes importés en hausse de 16,68%), répondant aux besoins d’une population nombreuse et urbaine.

Deux autres pays se hissent dans le top 5 africain des importateurs de viande de volaille brésilienne. Il s’agit du Ghana, 22ème dans le monde et 4ème en Afrique avec 56.213 tonnes (+79,8%). Le Ghana se distingue par sa préférence marquée pour les découpes de poulet plutôt que pour les carcasses entières (52.314 tonnes importés en 2023, en hausse de 80,88%). Mais c’est surtout la spectaculaire progression de 79,8% en un an qui illustre le fort potentiel de ce marché.

Avec 55.698 tonnes de viande de volaille importée (+47,4%), l’Angola (23ème débouché mondial) complète le top 5 africain. A l’instar du Ghana, l’Angola se distingue par sa préférence marquée pour les découpes de poulet (46.436 tonnes importés) plutôt que pour les carcasses entières (9.207 tonnes). Une demande en nette hausse qui témoigne du dynamisme de la consommation dans ces économies en pleine croissance.

Au total, ces cinq pays concentrent l’essentiel des exportations brésiliennes vers le continent africain. Une diversité de marchés et de produits phares qui reflète l’importance stratégique de cette région pour les professionnels brésiliens de la filière avicole. Répondre aux préférences et modes de consommation locaux s’avère déterminant pour conquérir ces débouchés prometteurs.

Entre autres nouveaux marchés africains des brésiliens figure le marché algérien, ouvert en fin 2023 aux exportations de viande de poulet halal. Une décision motivée par la nécessité de réguler le marché local, caractérisé par des prix élevés et une offre insuffisante de viande de poulet. Comme le souligne un communiqué de l’ABPA, à fin mai 2024, soit «un peu plus de six mois, plus de 10 mille tonnes ont été importées», faisant entrer la destination dans le top 30 des débouchés de l’ABPA. «Le potentiel est énorme», souligne Luís Rua, directeur des marchés de l’Association Brésilienne des Protéines Animales.

Le Brésil muscle ses exportations de viande de porc vers l’Afrique

En matière de viande de porc, le continent africain se révèle être un débouché de plus en plus prometteur pour les exportations brésiliennes. Selon les dernières statistiques de l’Association Brésilienne des Protéines Animales (ABPA), l’année 2023 a été marquée par une forte croissance des ventes vers plusieurs pays africains, confirmant leur appétit grandissant pour les produits carnés brésiliens.

Dans un contexte international où le principal exportateur de viande de porc, l’Union européenne, a vu ses exportations baisser de 25,74% entre 2022 et 2023. Le Canada, troisième exportateur mondial, a vu les siennes baisser de 8,19% sur la même période. Le Brésil, 4ème exportateur mondial gagne des parts de marché en voyant ces exportations grimper de 9,82% sur la même période. Un peu plus que les États-Unis (2ème exportateur mondial), qui ont vu leurs exportations grimper de 6,67% sur la même période.

«Dans un contexte international où le principal exportateur, l’Union européenne, a systématiquement réduit ses exportations, le Brésil a gagné du terrain sur le marché international. Combinées aux récentes ouvertures ou expansions de marchés, les projections indiquent des volumes records en 2024, avec une diversification des marchés qui achètent notre viande de porc», déclare le directeur des marchés d’ABPA, Luis Rua.

Comme annoncé le 1er août 2024 par l’ABPA, les exportations de viande de porc devraient terminer l’année 2024 avec un volume record atteignant 1,325 million de tonnes, soit une augmentation de 7,7% par rapport à l’année précédente. Pour 2025, la projection initiale indique des exportations jusqu’à 1,375 million de tonnes, soit une augmentation estimée jusqu’à 3,8% par rapport à 2024.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes. En 2023, les exportations totales de viande de porc du Brésil ont atteint 1,23 million de tonnes, en hausse de 10,27% sur un an, pour une valeur de 2,818 milliards de dollars US (+9,5%). Le marché africain a contribué à cette performance, avec plusieurs pays figurant parmi les principales destinations.

L’Angola, 9ème client mondial, a importé 34.325 tonnes en 2023 (+0,75%), représentant 2,82% du total brésilien. Les coupes et les abats dominent la demande angolaise, des produits plutôt basiques mais essentiels pour répondre aux besoins alimentaires de la population.

Idem pour la Côte d’Ivoire qui fait un bond spectaculaire à la 13ème place mondiale avec 18.177 tonnes achetées (+191,75%), soit 1,49% des exportations brésiliennes. A la faveur de cette flambée qui s’explique par l’essor de la classe moyenne ivoirienne, avide de protéines animales à moindre coût, la commune de Yopougon est de plus en plus connue pour sa forte consommation de viande de porc, dans la capitale économique ivoirienne. Cela n’était pas le cas avant 2011. La viande de porc est intégrée dans de nombreuses traditions culinaires locales, et Yopougon, avec ses nombreux maquis et restaurants, est un lieu où cette viande est largement consommée et appréciée. Cela contribue à sa réputation de « capitale du porcodjo », comme le disent certains Ivoiriens pour plaisanter sur cette commune.

Même tendance haussière pour la RDC (16ème) avec 14.467 tonnes (+28,28%) et le Liberia (17ème) à 14.325 tonnes (+105,57%), deux pays très demandeurs en coupes fraîches et abats.

Au total, sept pays africains figurent dans le top 25 des destinations pour la viande de porc brésilienne en 2023, confirmant la diversification des débouchés du Brésil sur le continent. «Le prix moyen à l’export a grimpé de plus de 350 dollars la tonne en 2023, dopant les recettes au Brésil. Ce flux reste positif en 2024 avec des exportations totales encore en hausse», souligne Ricardo Santin, président de l’ABPA.

Les prévisions d’exportations de viande de porc pour 2025 reflètent cet optimisme. La production nationale devrait atteindre 5,2 millions de tonnes en 2024 (+1%) et 5,25 millions en 2025 (+1%). Les exportations sont espérées à 1,325 million de tonnes en 2024 (+7,7%) et 1,375 million en 2025 (+3,8%).

Face à cette appétence continentale, le Brésil mise sur ses atouts compétitifs: sa productivité et ses coûts parmi les plus bas au monde. De plus, les producteurs brésiliens bénéficient d’un avantage logistique pour approvisionner l’Afrique. Les ouvertures de marchés négociées ces dernières années permettent d’envisager un fort potentiel de croissance à moyen terme. Portée par une demande locale dynamique, alimentée par une démographie galopante et l’essor des classes moyennes, la région devrait rester un débouché de choix pour les protéines animales made in Brazil les prochaines années.

Le Top 7 des débouchés africains de la viande de porc brésilienne en 2023 :

Pays importateursVolumes importés (en tonnes)Evolution par rapport à 2022 (en %)Part dans les exportations totales du Brésil en 2023 (en %)Classement mondial dans les débouchés du Brésil en 2023Classement africain dans les débouchés du Brésil en 2023
Angola34.325+0,752,829ème1er
Côte d’Ivoire18.177+191,751,4913ème2ème
RDC14.467+28,281,1916ème3ème
Libéria14.325+105,571,1817ème4ème
Afrique du Sud7.639+34,780,6321ème5ème
Congo (Brazzaville)4.376+166,760,3624ème6ème
Gabon3.944+313,960,3225ème7ème

Source : ABPA.

Par Modeste Kouamé
Le 01/12/2024 à 12h36